Publié le 30 Aug 2014 - 04:42
FAITS MARQUANTS DE LA SAISON 2014

La couronne change de camp, les promoteurs dans les difficultés…

 

La saison de lutte 2013 / 2014 a pris officiellement fin le 31 juillet dernier. EnQuête en a profité pour faire un bilan des évènements marquants de cette saison qui a été surprenante.

 

Les défaites surprises

Il y a eu lors de cette saison des défaites auxquelles personne ne s’attendait. La première qui en a surpris plus d’un a été sans doute la défaite d’Eumeu Sène de l’écurie Tay Shinger, le 31 janvier 2014, face à Modou Lô de l’écurie Rock Energie. Eumeu Sène était pour beaucoup le favori de ce combat pour avoir battu Balla Gaye 2, infligé à Lac de Guiers 2 la première défaite de sa carrière et avoir terrassé Gris Bordeaux lors d’un combat mémorable. A l’arrivée, il sera malmené, amené chez Ardo à deux reprises et battu avec une technique imparable par Modou Lô. Une reconfiguration s’était déjà dessinée au soir de ce 31 janvier 2014.

L’autre défaite surprise est sans nul doute celle de Balla Gaye 2 de l’école de lutte Balla Gaye face à Bombardier de l’écurie Mbour. Qui aurait pensé à un tel scénario le 8 juin dernier ? Alors que Balla Gaye 2 avait fini de faire le vide autour de lui, battant un à un tous ceux qui se dressaient sur son chemin, comme l’indéboulonnable Yékini qui n’est pas tombé 15 ans durant, il ne lui restait que Bombardier et Eumeu Sène pour boucler la boucle. Hélas, son rêve se brisera devant le B 52 qui le freinera comme il l’avait fait avec Tyson quelques années plutôt. Lui enlevant du coup la couronne de roi des arènes qui n’aura duré que 2 ans sur sa tête.

 Une autre défaite surprise, celle de Malick Niang face à Ama Baldé, le 1er juillet dernier. Une défaite qui a mis fin à une série de 10 combats sans défaite. Personne ne donnait le fils de Falaye Baldé gagnant dans ce combat, mais il y a cru jusqu’à la fin et a fini par avoir raison sur ceux qui misaient sur sa défaite.

Les combats qui ont foiré

D’aucuns pensent que c’est une poisse qui suit certains promoteurs. En effet, Aziz Ndiaye qui avait été obligé de renvoyer le combat Eumeu Sène / Modou Lô la saison dernière a connu le même scénario cette saison. Le combat qui devait opposer Gris Bordeaux de l’écurie Fass à Tyson de l’écurie Bul Faale a été annulé à seulement quelques jours de la date prévue. Pour cause, une déchirure musculaire du troisième Tigre de Fass. Une blessure qui a obligé le promoteur à repousser le combat pour la saison prochaine. Autre affiche qui a accouché d’une souris, celle qui a opposé Zoss de l’écurie Door Dooraat à Gouye Gui de l’école de lutte Mor Fadam.

Ce combat, très attendu par les amateurs, tellement les deux lutteurs avaient tenu en haleine les amateurs à travers leurs face-à-face, s’est terminé en moins d’une minute, Zoss ayant brisé les doigts de son adversaire. La victoire lui a été donnée sur décision médicale.  Que dire aussi du report récent du combat qui devait opposer Papa Sow de l’écurie Fass à Lac de Guiers 2 de l’écurie Walo pour le 3 août passé. Le promoteur Gaston Mbengue a finalement renvoyé le combat pour la saison prochaine. La raison de ce report selon le promoteur est à rechercher dans le changement à la tête du ministère des Sports, ce qui fait que la saison n’a pas été prolongée.

Certains promoteurs et lutteurs attraits en justice, d’autre dans des difficultés

La lutte connaît des lendemains incertains. Parce que non seulement les gros sponsors ont pris la poudre d’escampette, mais les promoteurs sont dans des difficultés sans précédent. En effet, durant cette saison, Luc Nicolai a été libéré de prison après plus d’un an de détention. Mais le promoteur de la Petite Côte semble s’être détourné de la lutte. Impliqué dans une affaire de trafic de drogue, le promoteur, même s’il est en liberté conditionnelle, risque de ne plus avoir droit à une licence.

Car selon les textes et règlements du Comité National de Gestion de la lutte (Cng), un promoteur qui a été condamné et reconnu coupable par la justice n’aura plus le droit à une licence en son nom. Hormis lui, il y a Assane Ndiaye qui a été reconnu coupable dans une affaire de visas et a été condamné à 2 ans avec sursis. Il a annulé les dernières journées qui lui restaient. Que dire d’Aziz Ndiaye qui a affirmé que le combat Gris Bordeaux/Tyson était le dernier combat de sa carrière de promoteur. Lui aussi est cité dans une affaire de riz pendante devant la justice.

Si certains promoteurs ont des problèmes avec la justice, d’autres ont des difficultés économiques. C’est le cas de Gaston Mbengue qui, depuis quelques années, se bat pour un plafonnement des cachets à 75 millions. Celui que l’on surnomme le Don King de l’arène peine à organiser de grands chocs. Au-delà de ses problèmes économiques, Salif Mbengue est plus tourné maintenant vers le football. Membre de la Fédération sénégalaise de Football, il est aussi le Président du Ndiambour Club.

 La lutte va-t-elle vers des saisons incertaines après les déceptions de 2014 ? En tout cas, jusqu’à présent, aucun promoteur ne s’est signalé pour organiser un combat, alors qu’en cette période de la saison, les manœuvres pour décrocher les grosses affiches étaient déclenchées. Mais jusqu’à présent, toujours rien.

De leur côté, certains lutteurs ont eux aussi des démêlés avec la justice. Malick Niang de l’écurie Yoff a même passé une nuit à Rebeuss après avoir frappé un jeune qui le prenait en photo alors qu’il préparait le combat contre Ama Baldé. Le monde de la lutte s’était mobilisé pour le tirer d’affaire, c’est ainsi qu’il a eu une liberté conditionnelle. Bébé Sa Cadior de l’école de lutte Boy Niang aussi a goûté à la prison après avoir été accusé de viol sur une fille, il sera libéré lors de son procès pour le bénéfice du doute.

Les lutteurs qui sont revenus après un passage à vide de plusieurs années

Ils sont nombreux ces lutteurs qui démarrent en fanfare dans le milieu de la lutte, mais au bout de quelques années, s’enfoncent aussi vite qu’ils ont démarré. Dans ce lot, on peut compter Balla Diouf, Mbaye Diouf, Tyson, Tapha Guèye 2 entre autres. Tyson avait l’occasion de revenir face à Gris Bordeaux cette saison, mais une blessure du troisième Tigre de Fass a plombé son retour. Tapha Guèye 2 qui était très réputé pour sa technicité a vu sa cote de popularité baisser du jour au lendemain, après une brève immigration en Espagne. Il a aligné défaite sur défaite durant des années. Les promoteurs ne le comptant plus dans leurs journées, il faisait le tour des médias pour maintenir le cap.

En 2014, il va renaître de ses cendres en mettant à terre un jeune espoir, il s’agit du lutteur Armée de l’écurie Ben Barack, qui n’avait jamais connu de défaite jusque-là. La victoire de Bombardier sur Balla Gaye 2 peut être aussi mis dans ce registre puisque le nouveau roi des arènes était dans le trou noir, alignant deux défaites successives face à Yékini et Tapha Tine entre autres, mais il a signé le retour le plus remarquable de cette saison.

REACTIONS DES ACTEURS DE LA LUTTE

Malick Thiandoum, chroniqueur à la Sen Tv :

‘’Ce qui m’a le plus marqué dans cette saison…’’

‘’La perte prématurée du titre de roi des arènes de Balla Gaye 2 face à Bombardier a été une grande surprise. Au départ, les gens prédisaient une victoire de Balla Gaye 2. Peut-être que c’est dans les dernières semaines que le doute a commencé à s’installer, mais il y en a qui n’auraient pas parié sur Bombardier. Le retour de Tapha Guèye 2 sur Armée a été aussi une surprise pour le monde de la lutte. Tapha Guèye 2 était dans une très mauvaise pente, beaucoup l’avaient déjà rangé dans les oubliettes ; Armée était quant à lui dans une bonne dynamique de victoires, donc c’était tout simplement incroyable. Un autre fait marquant, ce sont les difficultés financières et les grosses pertes de certains promoteurs. Jusqu'à présent, Gaston Mbengue qui n’a jamais eu d’arriérés doit de l’argent à certains lutteurs.

C’est la même chose pour Prince qui, à mon avis, a eu un problème de management. Il a monté de grosses affiches, espérant que les sponsors allaient suivre. Malheureusement cela n’a pas été le cas et il s’est trouvé dans de gros problèmes et il doit de l’argent à beaucoup de lutteurs. Boy Niang 2 était peut-être obligé, à un certain moment, de l’assigner en justice pour l’obliger à lui payer son reliquat. Les démêlés d’Assane Ndiaye avec la justice pour des histoires de faux et usage de faux, cela peut laisser croire que les promoteurs sont dans d’autres activités, peut-être parfois illicites pour pouvoir joindre les deux bouts. Je peux aussi dire que cette saison ne m’a pas beaucoup emballé et il n’y a pas de faits majeurs qui m’aient véritablement beaucoup marqué.’’

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Boy Kairé, Président de l’association des lutteurs en activité

‘’Les gens s’alarment pour rien, la lutte n’a aucun problème’’

‘’Pour moi, c’était une très belle saison, mais ce qui m’a le plus marqué, c’est le fait que cette année, beaucoup de ténors qui sont tombés ont cherché à mettre leurs défaites sur le dos de quelqu’un, une trahison, ou le mystique. Ces lutteurs doivent savoir qu’ils sont avant tout des sportifs. Sport rime avec victoire et défaite. C’est une pratique qu’il faut bannir de la lutte. En ce qui concerne ceux qui veulent enterrer la lutte, je ne vois pas de quoi fouetter un chat. Il y a eu une saison pleine. Pratiquement, tous les ténors ont eu des combats à l’exception de quelques-uns.

Moi je pense que les sponsors reviendront. Nous avons eu une audience avec le ministre des Sports hier, il nous a rassurés parce que pour lui, si la lutte échoue, c’est son échec en tant que ministre de tutelle. Il nous a assurés que les stades seront fonctionnels et ouverts à la lutte, sauf Demba Diop qui sera en réfection. J’ai vu le promoteur qui a en charge les travaux de Léopold Sédar Senghor faire une sortie dans la presse pour dire qu’il n’y aura pas de combat dans ce stade parce que le gazon en souffrirait. C’est inconcevable qu’il puisse dire cela. La lutte nous a toujours valu des satisfactions contrairement à d’autres disciplines. Les lutteurs vont lutter, j’en suis sûr. L’Etat doit sommer les sponsors de venir investir dans la lutte, c’est un secteur qui génère beaucoup d’emplois.’’

KHADY FAYE

 
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