''L'indépendance des journalistes'' dans tous ses états
Quelle réforme apporter à la problématique de l'indépendance de la presse ? Telle était le thème central de l'édition 2012 des Assises francophones du Journalisme et de l'information de Poitiers, à laquelle ont pour la première fois participé de jeunes journalistes-étudiants africains, dont ceux du Centre d’études des sciences et techniques de l'information (Cesti). Ce fut un moment fort d'introspection enrichissant.
La question de ''l'Indépendance des journalistes'' a fait couler beaucoup d'encre et de salive les 2, 3 et 4 octobre 2012 à Poitiers, en France, dans le cadre de la 6e édition des Assises francophones du Journalisme et de l'information. Autour de ce thème central de cette édition, une trentaine d'ateliers professionnels et de débats au total a intéressé les préoccupations des journalistes et chercheurs francophones. Au plan éthique, par exemple, les professionnels de l'information se sont interrogés sur le sens qu'il faut donner à la carte de presse, car de plus en plus de personnes participent à l'élaboration de l'information sans détenir cette pièce d'identifié professionnelle.
En outre, il a été question de l'Indépendance de la presse. Quelle réforme à ce propos ? Cette interrogation relance le sujet de la loi sur la protection des sources. Comme enjeu démocratique, celle-ci aiguise les débats dans les médias français. En France, les journalistes attendent toujours la nouvelle loi sur la protection des sources, la mise en place d’une taxe sur les moteurs de recherche, la redéfinition des aides à la presse, une modification des règles de temps de parole en période électorale et de publication de sondage sortie des urnes. Grosso modo, les insuffisances de la loi 2010 ont participé à relancer le débat pendant cette 6e édition des Assises à Poitiers. Nail Bouricha, Conseiller de la Garde des Sceaux Christiane Taubira, a fait une promesse que cette loi verra le jour en 2013.
Le taylorisme dans les médias
En attendant, les échanges sur l'indépendance et la déontologie ont mis l'accent sur la charte, l'instance de médiation et la reconnaissance des équipes rédactionnelles. Patrick Eveno, historien des médias, pense que ''le journalisme est un artisanat collectif qui a des pratiques déontologiques''. Pour Dominique Pradalié, secrétaire national du SNJ, une organisation syndicale française, ''les pressions industrielles sont énormes parce qu'on taylorise les journalistes avec le ''va chercher l'information''. ''Cette taylorisation est la destruction de la profession'', prévient-il.
Par ailleurs, les ''assisarts'' se sont penchés sur les nouvelles pratiques du journalisme. Car si les nouveaux médias ont fait bouger les lignes de l'information, bien peu ont réussi pour le moment à en vivre uniquement. Ce nouveau modèle économique après lequel courent les nouveaux médias est-il une chimère ? Peut-on faire payer l'info ? Si oui, comment ? À qui ? Sur quels supports et pour quelle info ? Les discussions autour de la question ont enregistré beaucoup de participants. Le débat a été passionnant. Prévu pour trois heures, le temps a paru court, tellement il y a à dire quand il s'agit d'économie, surtout en temps de crise mondiale ! L’information en continu et le web bousculent l’écriture Tv traditionnelle des journaux télévisés (JT) et newsmags. Comment réinventer l’info face à la concurrence des chaînes en continu, mais aussi du web et de la télé connectée ? Des journalistes comme Vincent Vanderstuyf de TF1, Richard Sénéjoux de Télérama, et bien d’autres, se sont accordés sur l’urgence et la nécessité de repenser à de nouvelles écritures de l’info TV.
L’autre question qui a retenu l'attention porte sur les nouvelles pratiques du journalisme. En ayant conscience du progrès grandissant des technologies de l'information et de la communication (TICs), la place des développeurs et designers au sein des rédactions en France, voire en Afrique, semble être une préoccupation lancinante. La question est d’autant plus importante qu’il ne s’agit plus de chercher à savoir si graphistes et designers doivent intégrer les rédactions, mais plutôt comment ? A l’heure où le ''journalisme de données'' (ou datajournalisme) est en plein essor, doit-on tendre à une ''fusion'' de ces métiers ? Faut-il former tous les journalistes au datajournalisme (consiste à exploiter des données pour produire de l'information) ou donner leur carte de presse aux designers ? Réponses mitigées cependant : la plupart des professionnels de la presse pensent que former au datajournalisme est une bonne chose pour l’indépendance du journaliste, puisqu’il ne s’agit pas de réinventer la roue ; donner la place aux développeurs et designers dans des rédactions semble aussi être une idée approuvée.
Idelette BISSUU
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