Publié le 19 Apr 2014 - 23:11
TRAQUE DES BIENS MAL ACQUIS

Ces compagnons de galère de Karim Wade

 

Ils peuvent être considérés comme des victimes collatérales de l'affaire Karim Wade. Ibrahim Khalil Bourgi, Pape Mamadou Pouye, Pierre Agboba, Mbaye Ndiaye et Alioune Samba Diassé ont en commun d'être considérés comme des prête-noms de l'ex-ministre d'État. EnQuête propose leurs profils.

 

Ibrahim Khalil Bourgi, une réputation de fortuné

Franco-sénégalais d’origine libanaise, Ibrahima Abdou Khalil Bourgi à l’état civil, est plus connu sous l’appellation de Bibo. On dit que c’est le nom de sa mère. Soupçonné d’être un prête-nom de Karim Wade, on l'accuse d'avoir participé au montage de nombreuses sociétés parmi lesquelles Aviation Handling Service (AHS).

Bibo Bourgi, mis en prison le 17 avril 2013, a bénéficié d'une liberté provisoire pour raison de santé. Appartenant à une famille réputée riche, l’homme d’affaires aurait été pauvre, vers les années 2000.

L'homme âgé de 47 ans aujourd’hui avait été condamné, en même temps que  Samir Bourgi (son parent), pour escroquerie et banqueroute frauduleuse, par le tribunal régional hors classe de Dakar, à la suite de la faillite de la Société sénégalaise de plastiques et dérivés (Soplad), dont il était le directeur.

L’ancien étudiant à l’université Georgetown, à Washington, devenu homme d’affaires dans le transit portuaire et l’immobilier, détient officiellement des sociétés représentant 38% de la fortune attribuée à Karim Wade. Avec une santé considérée fragile, il est désormais libre, en attendant que la justice décide de son sort.

Pape Mamadou Pouye, un homme de l’ombre

Après la convocation de Karim Wade à la section Recherches de la gendarmerie de Colobane, les Sénégalais ont fait la découverte de Pape Mamadou Pouye, un nom sur lequel ils ont mal à mettre un visage.

Ami de l’ancien ministre d’État depuis le collège, selon l’hebdomadaire le Témoin, il est également accusé d’être un prête-nom du fils de Abdoulaye Wade, surtout pour la société Daport. Il est présenté comme un homme timide, effacé et vivant presque dans l’ombre. Sorti de l’École de Management de Strasbourg, il est présenté par le journal comme un ''des meilleurs auditeurs de sa génération'', accumulant plein d’expérience dans le domaine.

Né en 1970, il est rentré à Dakar à l’arrivée des Wade au pouvoir. Une famille dont il est resté proche. A-t-il investi avec ses propres moyens sans l’aide de personne ? A-t-il bénéficié d’un coup de main de la part de son ami Karim ? Ou alors, est-il le bouclier chargé de cacher les agissements de son ami, comme le veut la justice ? Difficile de répondre à ces questions, surtout pour un homme presque inconnu, jusqu’au déclenchement de la procédure contre l'ex-ministre d'État.

Dans tous les cas, la presse a révélé qu’une dame du nom de Coumba Diagne a déclaré avoir prêté son nom, en contrepartie du poste d’administrateur promis par Pouye. Il appartient donc à la justice, après le travail du procureur spécial Alioune Ndao, d’apporter la bonne réponse à toutes ces interrogations. 

Pierre Agboba, l’illustre inconnu

Président du Conseil d’administration d’Aviation Handling Services (AHS), une société considérée comme une propriété non déclarée de Karim, Pierre Agboba a fait la Une des journaux, alors qu’il était hors du pays. 

De retour à Dakar, il a été entendu et placé en garde à vue, le 16 avril 2013, en même temps que son ‘’ami’’ Karim. Soupçonné, comme les autres, de servir d’écran à Karim, il avait soutenu n’avoir vu l’homme qu’une seule fois, niant au passage toute relation avec l'ex-ministre des Infrastructures.

Pourtant, lors de son passage à la Section de recherches, il aurait reconnu avoir bien connu Karim dont il avait dit qu’il est derrière AHS. Mais le monsieur s’est rétracté, affirmant avoir tout accepté, après qu’il a été privé d’eau et d’alimentation durant 9 heures. ''Écrivez ce que vous voulez !'', aurait-il dit aux gendarmes de Colobane, d’après le quotidien l’As.

Comme presque tous les membres de la supposée bande de copains devenus riches de façon illicite, il a fini au pavillon spécial, après un passage à l’infirmerie de Rebeuss. Il a recouvré la liberté, le jeudi 17 octobre 2013, en même temps que Cheikh Diallo et Boubacar Konaté. Mais, contrairement à ces deux ex-co-prévenus qui viennent de bénéficier de non lieu en début de semaine, lui il reste sous contrôle judiciaire.

Mbaye Ndiaye, une richesse suspecte

Arrêté le 16 avril 2013, l’ancien directeur des Aéroports du Sénégal (ADS) fait partie des sept présumés complices de Karim Wade. Mbaye Ndiaye a été Délégué à l’Asecna. C’était à une époque où le ministère des Transports aériens avait à sa tête un certain Madieyna Diouf, responsable à l’AFP. D’ailleurs, Mbaye Ndiaye est présenté comme un ancien proche de Moustapha Niasse qu'il a abandonné au profit du président Wade.

Ce qui fait dire à certains que c’est grâce à ce revirement qu’il a pu conserver le poste. La fortune qui lui est attribuée (terrains et villas, sur l’axe Almadies-Yoff) fait de lui un suspect pour enrichissement illicite.

Car, dit-on, la seule activité qui lui est connue est la gestion de l’aéroport Léopold Sédar Senghor qui ne peut justifier de tels avoirs. En outre, il est accusé de marchés fictifs, de marchés payés et dont l’exécution n’a jamais eu lieu. Est-ce là la raison du milliard qui a disparu dans la société qu’il dirigeait ?

En liberté provisoire depuis le 20 juin, il était malade à tel point, dit-on, qu’il ne pouvait plus se tenir debout, pour répondre aux magistrats instructeurs. Il souffre d'une  maladie  résultant d’une attaque cardiaque qui nécessitait des traitements réguliers, en France, avant même son arrestation. Malgré sa libération, il est lui est interdit, comme tant d’autres d’ailleurs, de sortir du territoire national.

Alioune Samba Diassé, l’employé de Bourgi

Lui aussi était de la liste des sept. Mais, il a été le premier, avec Bibo Bourgi, à bénéficier d’une liberté provisoire, le 18 juin 2013. Alioune Samba Diassé est un ancien employé à la retraite de Bibo Bourgi. Entendu sur le dossier, ce vieux avait nié être un complice de Karim Wade. Il faut dire que si complicité il y en a, il doit être plus complice de Bourgi que de Karim.

Avec Véronique Lély Manga, la domestique de la mère de Pape Mamadou Pouye, il est copropriétaire, sur les papiers, de la société Aérobus Services, les bus chargés du transport des passagers de l’aéroport de Dakar. Il soutient simplement avoir signé des documents à la demande de Bibo Bourgi.

Malade lui aussi, après quelques semaines de rigueur carcérale, son état de santé a amené ses avocats à déposer une demande de liberté provisoire. Le journal L’As avait même écrit que lors de son audition ''Alioune Samba Diassé était tombé en syncope''. Ce qui a fait dire à ses avocats qu’il risquait de mourir en prison. 

BABACAR WILLANE

 

 

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