C’est comme une bête blessée qui cherche difficilement à se remettre. Au-delà des appels à l’apaisement et des clins d’œil à la jeunesse, le parti présidentiel, l’Alliance pour la République (APR) se démène comme un beau diable pour démontrer une puissance fortement remise en cause, depuis l’affaire Sweet Beauté. Contraints à se terrer pendant un bon moment, les ‘’Apéristes’’ et leurs alliés essaient, bon an, mal an, à reprendre du poil de la bête. Et c’est la Conférence des leaders de Benno Bokk Yaakaar qui a donné le ton, le vendredi 19 mars dernier. L’instance supérieure de la majorité, sous la présidence de son président Macky Sall, prenait les résolutions suivantes : ‘’… Devant un tel projet antirépublicain, antidémocratique, antinational et antipopulaire, notre coalition BBY, à travers ses différents démembrements, doit se dresser comme un seul homme pour défendre la République, défendre la démocratie, défendre la nation et les populations.’’

 

 Dans cette perspective, soulignait BBY, la coalition ‘’lance un appel aux forces vives de la nation éprises de paix et de justice, à se mobiliser sur l’ensemble du territoire national et dans la diaspora, pour dire Non à la terreur, Non à la violence, Non au projet antirépublicain’’.

 

Dans la foulée, une série de manifestations ont été tenues dans certains bastions du régime, notamment à Pikine, où trône l’oncle du président de la République, et au Fouta, que le président Macky Sall considère comme son titre foncier. Quid des autres localités du pays ? C’est à croire que le pouvoir s’est retrouvé un peu trop seul dans ce contexte un peu bouillant de l’actualité. A Pikine, en tout cas, le maire Abdoulaye Thimbo appelle à la mobilisation des militants et des élus, pour ‘’lutter contre ce qu’il considère comme ‘’les forces du mal’’, pour la stabilité sociale et économique du Sénégal, ‘’gage de progrès et de performances’’.

 

 

A Matam, le discours est presque identique. Peindre le leader du Pastef/Les patriotes en diable personnifié, rappeler les réalisations du président Sall. Mais l’Alliance pour la République semble bien trop esseulée dans sa croisade contre une opposition ragaillardie par les dernières manifestations populaires. Et comme pour ne rien arranger, la guerre de leadership qui a émaillé le meeting de Pikine montre combien la majorité se trouve dans le pétrin.

 

Aussi, faut-il le signaler, le président Sall va devoir faire face sans l’apport de certains ténors, qui étaient jusque-là en première ligne dans sa défense contre le péril opposant et citoyen. Des ténors qui non seulement sont crédités d’une grande puissance financière, mais qui jouissent également d’un certain ancrage social. Parmi ces derniers, il y a la bête des plateaux Aminata Touré, la puissance financière Amadou Ba, l’homme fort du Djolof Aly Ngouille Ndiaye, son collègue de Dagana Mouhamadou Mahtar Cissé, mais aussi certains responsables considérés comme des ‘’fous du Roi’’ dont Moustapha Cissé Lo. Pendant ce temps, ses nouveaux alliés dont Idrissa Seck, Oumar Sarr et leurs bandes respectives, ne semblent pas prêts à se brûler les doigts pour sauver la peau du président.

 

 

 

Pendant ce temps, l’opposition, dopée par les derniers évènements, essaie de maintenir la pression, de capitaliser les gains politiques de l’affaire Adji Sarr. Pour son nouveau général, la star du moment, Ousmane Sonko, la stratégie consiste surtout en la multiplication des visites auprès des soutiens, dans l’espoir de fédérer toutes les forces contestataires autour de sa personne. Dans ce cadre, le leader du Pastef/Les patriotes compte plus que tout sur une alliance avec l’ancien homme fort de la capitale, Khalifa Ababacar Sall. En visite chez le leader de Manko Taxawu Senegaal, il disait : ‘’Nous réitérons notre ouverture, notre main tendue à notre ami de Taxawu Senegaal, à une collaboration la plus large possible, à tout point de vue, pour ensemble partager une vision et aller ensemble vers ce qui devra changer ce pays.’’

 

Pour lui, il faudrait plus qu’un seul homme pour faire le Sénégal et servir un peuple en avance sur sa classe politique. A Khalifa et ses compagnons de lutte, il dit : ‘’Nous devons rattraper ce peuple aujourd’hui pour montrer que nous sommes à la hauteur. Parce que ce pays ne sera pas changé par un homme. Il faut que toutes les forces saines se retrouvent au sein de l’essentiel, pour qu’ensemble nous puissions changer ce pays. Et je pense que nous pouvons valablement penser que Taxawu Senegaal en fait partie.’’

 

Outre Khalifa Sall, Sonko aura également été chez bien des leaders de l’opposition pour prêcher l’union. Ainsi, il a été chez Thierno Bocoum, Dr Babacar Diop ainsi qu’au siège du mouvement Y en a marre. A maintes reprises, il a émis le souhait de réunir partis de l’opposition, société civile, mouvements citoyens autour d’un large front commun pour défendre la démocratie et l’état de droit. Déjà, plusieurs opposants semblent adhérer à cette cause. Du moins, ils sont nombreux à lui dérouler le tapis rouge, depuis sa libération de prison. Dès lors, il peut compter sur le M2D (Mouvement pour la défense de la démocratie) et ses différentes composantes.

 

D’ailleurs, ledit mouvement, constitué dans le cadre de la lutte pour la libération de Sonko et des autres détenus, a entamé une tournée nationale qui l’a déjà mené dans la cité religieuse de Ndiassane. Etaient de la délégation, selon ‘’L’AS’’, Dr Cheikh Tidiane Dièye, Moustapha Sarré, Ndèye Fatou Diop Blondin, Fatima Mbengue, Kilifeu et Mourtala Seck. La délégation a été reçue par Serigne Mame Bouh Ballé Kounta, frère du Khalife de Ndiassane, en présence du porte-parole du khalife, Bouh Abdourahmane Kounta, et plusieurs membres de la famille. Cette composition montre d’ailleurs l’ancrage patriote de cette entité.

 

 

A côté du M2D qui semble avoir le vent en poupe, il y a le Front de résistance nationale qui a bien envie de montrer qu’il existe toujours. D’ailleurs, tient à préciser ce responsable, le M2D est l’un des sous-ensembles du FRN, comme le Congrès de la renaissance démocratique (CRD), la coalition Jotna, entre autres. Un monde très cosmopolite où il est très difficile de distinguer qui est qui. Qui fait quoi. C’est sans doute une des raisons pour lesquelles des tractations sont en cours pour remettre un peu de l’ordre. Dans leur dernier communiqué, les camarades de Moctar Sourang ont déclaré : ‘’Le FRN a initié une rencontre, le samedi 20 mars, avec les partis politiques, le M2D, la coalition Jotna, le CRD, les mouvements et associations de la société civile, les syndicats de travailleurs, les activistes et lanceurs d’alerte de tous bords.’’ L’objectif de cette rencontre, selon l’organisation, est la mise en place d’un grand cadre d’unité d’action. D’ailleurs, renseigne le document, un comité ad hoc a été mis en place à cet effet. 

 

Selon nos informations, ledit comité est composé de 12 membres et doit réfléchir sur les modalités de mise en œuvre de ce cadre. A en croire nos sources, il serait erroné de lier cette initiative au contexte actuel. Cela daterait du mois de décembre et sur proposition de Khalifa Ababacar Sall et de l’ancien Premier ministre Abdoul Mbaye.

 

Ainsi, on se profile vers un grand cadre qui va réunir au-delà des partis politiques des associations, syndicats, mouvements d’activistes, société civile, entre autres.

 

Karim envoie 16 véhicules 8x8 au PDS pour leur tournée

 

Au Parti démocratique sénégalais (PDS) la priorité semble ailleurs. Elle tourne surtout autour de la mobilisation de la base, à travers les opérations de placement des cartes de membre qui se fait un peu partout sur le territoire national. Avant-hier à Dagana, la délégation du parti était le samedi à Podor et le vendredi à Matam. Et selon certaines confidences, des moyens énormes ont été dégagés par le leader Karim Wade pour replacer le parti sur l’échiquier politique national. Rien que sur le plan logistique, pas moins de 16 véhicules de type 8x8 auraient été affrétés par Wade fils, selon des sources proches du PDS.

 

Joint par téléphone, le président de la Fédération nationale des cadres, Lamine Ba, refuse de se prononcer sur cette question de moyens. Mais confie : ‘’Cette opération s’inscrit dans la dynamique d’aller à la rencontre des militants, de structurer et donner un nouveau souffle à nos structures de base. Depuis deux mois, malgré les restrictions, nous nous déployons sur une bonne partie du territoire, pour rencontrer les militants, faire l’état des lieux des structures, mais également les informer par rapport au processus de vente des cartes de membre et d’installation des structures de base.’’

 

Hier, la délégation était dans la région de Saint-Louis, où tous les militants, sympathisants, responsables départementaux et communaux étaient convoqués en assemblée générale. Avant le Nord, la formation libérale a fait les zones Sud et Centre. Lamine Ba se félicite d’ailleurs du retour de certains de leurs frères qui avaient quitté la barque et qui sont en train de rentrer au bercail.

 

Aujourd’hui, la délégation libérale sera à Kébémer, avant de faire cap sur Touba et Mbacké les 26 et 27 mars. ‘’Il ne nous reste plus que les régions de Thiès et de Diourbel. Nous avons mené toutes ces opérations en douce, parce que comme on est en période de pandémie, on ne voulait pas que les activités soient interdites’’.