Publié le 13 Oct 2023 - 15:38
Les Comptes de Almamy Bocar LA CHRONIQUE DU VÉTÉRAN

La loi du plus fort

 

Set Settal

Le commandement territorial de la région de Dakar a lancé une opération de désengorgement des artères de la capitale. Le désordre, la cacophonie et tous les dérèglements constatés sur la voie publique de la capitale y sont permanents depuis plusieurs décennies sans que cela n’ait interpellé ni les autorités étatiques, ni les autorités municipales ou l’Administration territoriale.

Cela semble être si bien installé que les mœurs d’aujourd’hui agréent logiquement qu’il n’y a rien d’illégal ou d’interdit dans le non-respect des lois et règlements organisant la vie en commun et que, donc, chacun peut faire ce que bon lui semble en fonction de son interprétation personnelle des règles communes. Le non-respect de la loi et des normes étant devenu depuis belle lurette la seule règle en vigueur. Alors, j’aimerais bien observer jusqu’où va aller cette opération de remise en ordre de la voirie publique et du mobilier urbain. Il ne faudra pas aussi oublier la pollution sonore, les débordements des cérémonies sociales et religieuses, mais aussi la nuisance des charretiers et les congestions des innombrables constructions immobilières déversant en permanence du gravât et des matériaux de construction sur la voie publique.

C’est l’occasion aussi de relever que l’explosion de gaz qui a pratiquement décimé toute une famille au quartier Derklé ne paraît pas avoir ému ou alarmé ni le commandement territorial, ni les ministères de l’Énergie, de l’Industrie, de la Santé et du Commerce. Tous sont interpellés par cette catastrophe du fait de leur implication en amont ou en aval dans ce processus de commercialisation du gaz domestique. Il faut dénoncer cette évanescence et cette démission des autorités, et accepter que seule la posture du maire de Dakar a plus ou moins été responsable.

Faut-il croire que la toute puissante multinationale française Total est totalement énorme que tous préfèrent adopter la politique de l’autruche pour ne point subir ses foudres ? Par exemple, en France, l’invasion récente des punaises de lit (maate en wolof) a conduit à une réunion interministérielle sur le sujet, des interpellations du chef du gouvernement à l’Assemblée par l’opposition sur la mollesse des actions de l’État pour contrecarrer ce fléau social.

Les risques qu’entraîne l’utilisation du gaz domestique dans nos foyers méritent-ils moins d’attention que la lutte contre les punaises de lit en France que l’on a toujours perçu comme une manifestation de l’absence d’hygiène et de la promiscuité dans les pays dits du tiers-monde. À noter qu’avec cette apparition massive des punaises de lit en France, il serait judicieux que nos services de Douanes et d’Hygiène soient plus vigilants sur l’importation et l’introduction de la brocante en provenance des pays européens en introduisant un cordon sanitaire afin de prévenir une invasion des « maate toubab » sous nos cieux.

Le Tigre de Fass

Le candidat officiel de la majorité présidentielle et de son chef Macky Sall est un homme qui devra avoir le cuir épais et la carapace dure. La tâche qui l’attend n’est pas une partie de plaisir ni une sinécure. Il va devoir affronter ses ennemis qui appartiennent au même sérail que lui et qui ont refusé d’adouber son investiture sans compter ceux qui tapis dans l’ombre veulent lui cirer le plancher. Ils seront ses pires ennemis plus féroces que les opposants les plus irréductibles au régime de Macky Sall. Et j’ai l’impression que cette adversité menée par des hommes comme Aly Ngouille Ndiaye, Boun Abdallah Dionne, Mimi Touré paraît plus résolue et déterminée à le faire échouer que les responsables de l’opposition qui ont tout fait pour barrer la route à une nouvelle candidature de Macky Sall en 2024.

Le ton a été donné lors de la cérémonie d’investiture d’Aly Ngouille Ndiaye et promet une campagne fleurie où les flèches iront plus contre Amadou Ba que contre les opposants à Benno Bokk Yaakaar. Le réquisitoire qu’Aly Ngouille Ndiaye a dressé pour justifier sa candidature n’a pas épargné le magistère de Macky Sall, en s’engageant à restaurer une politique de réconciliation et de concorde nationale tout en affirmant sa ferme volonté de restaurer l’honorabilité de la Justice sénégalaise et sa détermination à cesser d’utiliser celle-ci à des fins de règlements politiques. Le Maire de Linguère jette, ainsi, de très grosses pierres dans le jardin de Macky Sall. Et l’ancien ministre de l’Intérieur qu’il a été a prévenu haut et fort qu’une victoire d’un candidat au premier tour n’était pas possible et réalisable.

Cet énoncé est une véritable déclaration de guerre et une menace à peine voilée à la fois contre Macky Sall et son candidat. Ceci indique deux choses tout au moins : tenter d’ouvrir les portes à un second tour, fragilisant, ainsi, le candidat de la majorité qui aura besoin de nouvelles alliances pour échapper à ce traquenard électoral si jamais il avait, déjà, pu sortir du guêpier du premier tour avec cette multiplicité de candidatures dissidentes. Alors qu’il est clair que les possibilités d’alliances que Aly Ngouille Ndiaye et ses alliés de la dissidence laissent entrevoir sont bien celles-ci, pas d’alliances et donc de report de voix au profit de Amadou Ba en cas de second tour. On peut comprendre, ainsi, que les dissidents de la majorité actuelle n’ont qu’un seul objectif : faire mordre la poussière au dauphin tardivement dévoilé et que l’on veut installer comme successeur par défaut. Les champs du possible qu’ouvre cette posture du premier dissident qui a ouvert le bal des prétendants annoncent la couleur. Rien ne sera facile pour Amadou Ba.

Après les alternances de 2000 et 2012, le chemin doit être balisé pour une troisième alternance est donc, la dynamique que l’on veut tenter d’imposer dès le début de l’animation préélectorale. Cela va-t-il se réaliser pour autant ? Cela peut-il se faire ?

Certes, en 2000, Wade opposant principal a terrassé Diouf au second tour avec le Fal, tout comme en 2012, Macky Sall, néo-opposant, a fait mordre la poussière et connaître les quatre appuis à Wade grâce à la stratégie de tous contre le sortant. Cette dynamique de tous contre un met-elle, forcément, Amadou Ba dans la posture de seul contre tous ? Différence notable de la présidentielle de 2024 avec celle de 2000 et 2012 étant que Amadou Ba n’est pas un candidat sortant, mais un néo-prétendant à la présidentielle qui est le seul à bénéficier de l’accompagnement du candidat sortant. Et, donc, pour la première fois nous assistons sous nos cieux à une présidentielle où le Calife veut lui-même introniser un de ses vizirs comme nouveau Calife tandis que tous les autres prétendants, eux, doivent se battre à la fois entre eux, contre l’opposition et contre le candidat du Président.  La différence pour 2024 étant qu’Amadou Ba n’est pas le candidat sortant comme Diouf en 2000 et Wade en 2012.

Il s’y ajoute que, comme le dit l’opposant Boubacar Camara, ‘’Macky Sall est un homme redoutable en politique… Il a atteint tous ses objectifs politiques depuis son entrée dans celle-ci, d’abord en commençant par son adhésion dans les partis de gauche avant de rejoindre le PDS dans l’opposition et de battre à la fois Wade, Niasse, Tanor, Djibo Ka et Idrissa Seck  lors d’une même présidentielle’’. Jugement prémonitoire, appréciation ou sentences d’un homme avisé ayant été un grand commis de l’État dans un passé récent ?

Je peux me tromper, mais Amadou Ba qui porte, aujourd’hui, le flambeau de l’écurie présidentielle devra être un redoutable compétiteur. En a-t-il la carrure ? Je vais m’exercer à une petite comparaison en utilisant l’univers des arènes sénégalaises (Lamb) comme métaphore. Dans cet univers, le porte-drapeau et lutteur vedette de toute écurie est souvent affublé d’un surnom vantant sa bravoure et sa carrure. Voilà pourquoi à une époque l’on a appelé Mame Gorgui Ndiaye, l’Enfant chéri de Dakar, Mbaye Dia Diop, le Lion de Diander, Mouhamed Ndao de Pikine Tyson, Manga II, le Lion de Fadhiout. Pour l’écurie de Fass, Mbaye Gueye a été le premier Tigre, Moustapha Gueye, le second et actuellement Gris Bordeaux est le détenteur de ce titre. Mais force est de reconnaître que si les trois sont Tigre de Fass, ils le sont chacun dans un style et un registre différents. Alors, selon vous, à quel Tigre de Fass Amadou Ba devra-t-il le plus ressembler pour sortir de ce combat de Ndoumbélane que lui promettent ses ex-frères du Macky ? La tâche sera rude, car il va devoir faire face sur plusieurs fronts et soutenir autant de combats.

Terrorisme ou crimes de guerre

L’attaque surprise du Hamas contre Israël a pris totalement de court et de vitesse l’État hébreu. Ni ses renseignements, ni ses infiltrés et encore moins son Dôme de fer (Iron Dome) n’ont pu mettre en déroute cette offensive des Palestiniens.

Fidèle à son style et à sa nature, Israël, depuis lors, déverse une violence inouïe contre les populations civiles de Gaza dans sa traque impitoyable contre les combattants du Hamas. Le Premier ministre, dans sa croisade meurtrière, ne se gêne point pour clamer haut et fort que la vengeance justifie toutes les horreurs et abominations, selon lui, allant jusqu’à traiter d’animaux les Palestiniens. Ainsi, les principes du droit international sont foulés au pied par Israël et tous ses partisans occidentaux qui indexent le Hamas et le Hezbollah comme des terroristes et refusent, ainsi, de leur appliquer les règles du Droit international qui, elles, ne reconnaissent que les crimes de guerre et pas le terrorisme. Cette posture des pays occidentaux rangés en colonnes serrées à côté d’Israël est révélatrice de la volonté de suprématie que ceux-ci veulent continuer à exercer sur les autres civilisations de la planète.

Samuel Huntington parlait, déjà, de « Choc des civilisations » à la fin du siècle dernier, la thèse de Francis Fukuyama, elle, annonçait la fin de l’Histoire, n’est-ce pas ce à quoi nous assistons au Moyen-Orient entre Juifs et Arabes. Je crois qu’il faut comprendre qu’une seule chose aujourd’hui. Celle d’un Occident judéo-chrétien qui vit mal le déclin de son impérium planétaire et pour qui la seule loi qui compte est celle du plus fort. Tournez les yeux vers l’Ukraine ou l’Arménie pour comprendre ce sanglot de l’homme blanc comme l’écrivait le philosophe français Pascal Bruckner et qui semble avoir commencé depuis l’invasion de l’Ukraine par Vladimir Poutine.

Abdoulaye Bamba DIALLO

 

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