Publié le 4 Nov 2023 - 19:34
Les Comptes de Almamy Bocar LA CHRONIQUE DU VETERAN

Le retour de l’horreur

 

Vindicte de fanatiques

La profanation d’une sépulture avec crémation du défunt s’étant déroulé à Kaolack, en plus d’être une abomination, est le révélateur d’une société en perte de repères et de valeurs. Il faut dénoncer avec la dernière énergie cette horreur relevant plus d’un ensauvagement qui a depuis longtemps enraciné ses racines sous nos cieux du fait d’un obscurantisme religieux. Sous prétexte d’un ordre moral relevant d’une religion ou d’une secte, certains se croient devenus les justiciers de Dieu et proposent une nouvelle table des lois comme unique code de valeurs devant régir notre commun vouloir de vie en commun.

L’intolérance commence toujours par le refus d’entendre ou d’accepter une vision, une perception ou une lecture différente de la sienne. Cela est souvent le fruit de l’ignorance et conduit toujours à des excès comme le terrorisme et tout ce qui s’y attache.

Le débat ne devrait pas être que le cadavre profané à Kaolack ait été ou non un déviant sexuel, mais l’acte commis comme punition à son encontre ne peut relever d’aucun ordre religieux laïc ou même animiste. Toutes les croyances religieuses, laïques ou animistes, depuis la nuit des temps, ont ceci en commun : elles prohibent toutes la profanation de sépulture et le saccage de cimetière. Les endroits où l’homme enterre ses morts ont tous un caractère sacré et souvent l’on y effectue des processions ou des cérémonies de vœux et de prières afin de bénéficier de la protection des dieux ou des mannes des ancêtres.

La condamnation de cette horreur commise par des fanatiques sous le fallacieux prétexte d’opérer la justice contre quelqu’un qui aurait été moralement défaillant à leurs yeux, est une illustration de leur crasse ignorance sur le message de Dieu que véhiculent les livres des religions révélées comme le Coran, la Bible, la Thora. Toutes les trois religions révélées enseignent à la fois la tolérance, le pardon et la solidarité entre semblables et non des expéditions punitives ou des exécutions post-mortelles. Car l’exercice de la justice et l’application de la sanction ne relevant que de Dieu. Pas de l’homme.

La plus belle des illustrations étant l’intervention de Jésus Christ face à la furie de ceux qui voulaient châtier une dame pécheresse avec sa célèbre sentence : ‘’Que celui qui n’a jamais péché soit le premier à lui jeter la pierre.’’ Le Sénégal d’aujourd’hui n’a que des jeteurs de cailloux. Et à ce jeu, tout le monde est perdant. Car, comme le rappelait le Christ Sauveur à juste titre, nous sommes tous des pécheurs.

Et nous serons toujours des pécheurs jusqu’à la fin de notre passage sur terre, cela que nos semblables soient au courant de nos péchés ou non. Et là encore, s’imprégner de l’aphorisme disant qu’il faut laisser à César ce qui appartient à César (dans le cas qui nous concerne c’est-à-dire l’homme, le pécheur impénitent) et donc à Dieu ce qui lui appartient. Le seul ayant le pouvoir de rendre la justice morale et de décider du choix de la sanction.

Les petits mystères de la Présidentielle (1)

Le Premier ministre est en campagne, le candidat officiel de la majorité est en tournée. L’un et l’autre occupent le terrain et chacun des deux fait le travail relevant de son astreinte, même s’ils sont la même personne avec deux habits différents. En bon chef de gouvernement, Amadou Ba va à la rencontre de ses administrés, mouille le maillot sur le terrain, recueille les doléances des populations et peut, ainsi, avant l’ouverture de la campagne électorale officielle, effectuer un test de popularité. Le candidat officiel de la majorité présidentielle Benno Bokk Yaakaar ne pouvait  perdre cette opportunité de la tournée économique du Premier ministre pour faire la revue de ses troupes politiques sur le terrain, étudier leurs forces et faiblesses, et celles de l’adversaire, c’est-à-dire l’opposition. Si l’un et l’autre s’arrêtent tous les deux à faire le travail qui relève de ses attributions, indiscutablement, cela vient au bon moment pour l’un des deux. Je vous laisse deviner lequel. Et je trouve que cette politique d’occupation du terrain par le Premier ministre, à la limite de la tricherie démocratique, est plus utile pour un candidat à la Présidentielle que de s’enfermer ou de rester cloîtré dans la capitale à la conquête des médias ou d’effectuer des tournées à l’étranger auprès d’une diaspora sénégalaise qui ne représente pas plus de 5 % des électeurs.

Avec le style Abdou Diouf et la méthode de Macky Sall, le candidat de Benno Book Yaakaar, qui est ni un tribun ni un bretteur galvaniseur de foules, peaufine, ainsi, une image qui pourrait lui valoir de bons points auprès de l’opinion, alors que certains de ses adversaires déclarés soutiennent tous que leur notoriété est plus grande que la sienne et leur ‘’agilité’’ de politiciens professionnels leur donne plus d’atouts que lui pour février 2024. La stratégie d’Amadou Ba rappelle la Fable du Lièvre et de la Tortue de la Fontaine : ‘’Rien ne sert de courir, il faut partir à point.’’

J’ose croire que seule l’entrée en scène de Karim Wade, candidat du PDS, pourrait bouleverser cet agenda bien planifié du Premier ministre. Car le candidat du PDS et Khalifa Sall avec Amadou Ba sont les seules grandes nouveautés de la prochaine campagne. Tous les autres candidats, presque, ont, déjà, tenté une participation à la Présidentielle avec des fortunes diverses.

Les petits mystères de la Présidentielle (2)

Ousmane Sonko est devenu tel le personnage d’une série comme celle qu’on retrouve sur les plateformes de diffusion à l’image de Netflix et Disney Channel qui ont détrôné les chaînes de télévision classiques. Avec cette histoire de radiation et de réinscription sur le fichier électoral, semble s’ouvrir une nouvelle saison des tribulations de cet acteur politique aimant associer les mœurs, l’activisme politique et la communication, une recette qui lui a permis de se faire une notoriété rapide au détriment de ses ‘’souteneurs’’ de l’opposition, bien que plus anciens que lui sur la scène.

Il faut dire qu’Ousmane Sonko agit à la fois comme un prestidigitateur ou un marchand de camelots. Ainsi, comme Abdoulaye Wade à une certaine époque, il est capable  de dire une chose maintenant et de dire son contraire plus tard tout comme défendre une position ici et maintenant et faire tout le contraire quelque temps après. Et ceci sans dommage pour sa crédibilité ou son image aux yeux de ses fans.

De mon point de vue, on ne peut qu’appeler cela une maestria politique.

Après avoir été condamné par le tribunal de Dakar qui a décidé de sa radiation, il a été repêché par le tribunal de Ziguinchor qui a décidé de sa réinscription sur le fichier électoral et cela lui donne le droit à nouveau d’être candidat à la candidature présidentielle. Jusque-là, il n’y a rien d’anormal, sauf que l’Administration chargée de l’organisation des élections s’oppose à la délivrance des fiches de parrainage à son profit. Alors qui a tort entre Sonko et ses partisans et la Direction générale des Élections (DGE) avec son patron Thiendella Fall ?

De mon point de vue, tous les deux ont raison de camper sur leur position. De bon droit, Sonko réclame l’application d’une décision de justice qui lui est favorable. La DGE s’arc-boute sur le fait que jusqu’à présent, Ousmane Sonko n’a pas été réinscrit sur les listes officielles sur lesquelles elle doit étalonner son travail d’organisation du processus électoral. Alors où se trouve l’abcès de fixation qui fait encore d’Ousmane Sonko la vedette de l’actualité politique ?

La posture de l’Administration territoriale, autrement dit dans ledit dossier la préfecture de Ziguinchor est certainement le maillon de l’affaire et le nœud gordien que l’on n’a pas visés dans le traitement de ce dossier avec comme conséquence ce début d’augmentation de la température politique. Il me semble qu’il revenait au juge ayant pris la décision de réintégration de signifier la réinscription à nouveau d’Ousmane Sonko sur les listes électorales du département de Ziguinchor au préfet, patron à la fois de l’Administration centrale et celle décentralisée de ce territoire administratif. Nonobstant la possibilité d’appel contre cette décision prise par le tribunal de la ville.

Aller faire le pied de grue à la Cena pour obtenir des fiches de parrainage ou interpeller la Commission électorale nationale (Cena) sur son interprétation de cette décision de justice ne sert à rien. Et d’ailleurs ladite Cena a dit le droit. Respecter la dernière décision de justice en vigueur, c’est-à-dire la réinscription et attendre la décision finale de la Cour suprême qui pourrait décider, au final, d’une radiation ou d’un maintien de Sonko sur les listes.

Maintenant, je pense que ce qu’Ousmane Sonko va bel et bien perdre dans ce nouvel épisode de ses déboires, est la perte d’un sondage de popularité qu’il aurait pu s’offrir avec la possibilité d’un parrainage citoyen. Dans le contexte actuel, le cas de figure de Sonko devant opter pour un parrainage d’élus, du fait du temps qui va lui manquer fait l’affaire de tous les autres candidats  en quête de parrainage citoyen.

Abdoulaye Bamba DIALLO

 

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