Le nouveau mensonge d'Armstrong
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Patrick Chêne combat l'idée lancée par Lance Armstrong dans Le Monde qu'il est impossible de gagner le Tour de France sans se doper.
Tandis que le Tour de France emprunte –enfin- les belles routes corses, Lance Armstrong n’a donc pas pu résister à la tentation. Il a voulu attirer l’attention sur lui en accordant une interview au journal « Le Monde ». Armstrong, on aime ou on n’aime pas mais il nous avait habitués à des déclarations certes cyniques ou mensongères mais toujours marquées du sceau de l’intelligence. Voyou sans doute mais pas idiot, l’Américain…
Là, il touche le fond. Le roi de la triche a avancé un argument d’habitude réservé à Coluche ou au café du Commerce. « On ne peut pas gagner le Tour sans se doper ! ».
Coluche avait mis sa dose de génie et d’humour en ajoutant que si les coureurs ne se dopaient pas ils arriveraient à Paris à Noël. Au café du commerce, on est plus prosaïques. On dit généralement que c’est tellement dur d’enchaîner des étapes, des cols, des milliers de kilomètres que les coureurs sont condamnés à se doper.
Armstrong y ajoute même une dose technique pour faire plus vrai. Il parle d’une course d’endurance où l’oxygène est déterminant…Foutaise !
Si les coureurs ne peuvent pas gagner le Tour sans se doper, l’endurance, l’oxygène, la longueur des étapes ou le nombre de cols n’y sont pour rien. Si on doit se doper pour gagner le Tour c’est pour battre les tricheurs. Les Armstrong, Ullrich ou Contador (je pourrai user quelques lignes supplémentaires pour faire la liste…).
Vous me pardonnerez de rappeler une vérité trop évidente mais sans tricheurs, le Tour aurait été plus passionnant dans les années Armstrong. Débarrassé de ces mobylettes qui imposaient des moyennes de « dingues » dans la plaine sans même ouvrir la bouche pour respirer…
Non, je combats cette idée fausse : le Tour n’est pas si dur qu’il impose aux coureurs de se doper. Je me souviens du témoignage de coureurs « moyens » me confiant qu’une étape de cinq cols ne leur faisait pas peur. Je les cite : « nous sommes des pros. Nous nous entraînons plus de cinq heures par jour. Alors aucune distance ne nous fait peur. C’est la vitesse imposée par certains qui fausse tout ! »
Ceux qui à partir des années 90 ont pris des produits qui transforment un âne en cheval de course (hello Bjarne Riis !) tandis que leurs aînés prenaient (j’ai failli écrire « se contentaient de prendre ») des amphétamines ou des corticoïdes qui ne changeaient pas vraiment la véritable hiérarchie…
Si j’osais je vous dirais que c’était « le bon temps des amphets » et je terminerais par cet échange entre Laurent Fignon et deux cancérologues lorsque son cancer des voies digestives s’est déclaré.
Laurent Fignon : « j’aimerais être sûr que le dopage n’est pour rien dans mon cancer. Voici ce que j’ai pris au cours de ma carrière… »
Les cancérologues (Fignon m’a raconté qu’ils riaient) : « C’est donc ça. Seulement ça. Mais vous le pissiez en vingt kilomètres d’effort. On imaginait bien d’autres choses… »
Ces autres choses qui allaient apparaître quelques années plus tard et dont on rêve qu’elles disparaissent un jour du peloton…
PATRICK CHÊNE