Lundi timide en attendant le ‘’mercredi noir’’
Le mot d’ordre des journées sans légumes au marché central, à compter de ce lundi, décrété par les commerçants de Thiès, en soutien au délégué général dudit marché placé sous mandat de dépôt ce week-end pour s’être opposé à des travaux de construction, a pris effet timidement. Si les souteneurs du délégué général veulent instaurer cette loi, les vendeuses de légumes, par contre, la rejettent et appellent à une autre forme de combat.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, une colère peut bien en cacher une autre : les journées sans légumes décrétées par les commerçants du marché central de Thiès, qui ont débuté hier et qui s’achèvent sur une journée morte dans tous les marchés du département après-demain, mercredi, jour du jugement de Thierno Ciss. Le délégué général du marché de Thiès, par ailleurs président départemental de l’Unacois Jappo, est poursuivi pour s’être opposé à des travaux de construction sur la troisième bande du canal du marché central de Thiès, à l’initiative des autorités municipales de la commune de Thiès-Nord.
Le maire Lamine Diallo et son équipe veulent y effectuer des travaux d’aménagement (ériger des cantines) pour libérer les espaces et réduire les bouchons constatés çà et là le long du marché central. En voulant leur opposer son niet catégorique, Thierno Ciss a été arrêté et placé sous mandat de dépôt. Il sera jugé ce mercredi. Avant le face-à-face entre le patron de l’’Unacois Jappo et le juge, les commerçants crient ‘’injustice’’ et disculpent leur délégué général. ‘’Les travaux sont autorisés sur le canal. Mais je me demande comment un maire peut autoriser ça.
Le maire (Lamine Diallo) devait nous adresser une sommation nous notifiant qu’il avait besoin de cette place. C’est à lui de prendre ses responsabilités. Pourquoi il ne le fait pas ? Avant de prendre une telle initiative, il fallait organiser des concertations avec les responsables des commerçants. En revanche, il ne l’a pas fait. C’est ça le problème. C’est pour cette raison que nous avons décidé d’initier des journées sans légumes en guise de soutien à notre délégué général’’, fustige Saliou Sall. Ainsi, le porte-parole des vendeurs de légumes du marché central de Thiès précise que l’arrestation de leur délégué général est une ‘’grande injustice’’.
Noir de colère lui aussi, Abba Mbaye indique que ce projet ne doit en aucune manière être soutenu. ‘’Il y a un danger permanent sur ce canal. Je ne vois pas pourquoi les gens s’entêtent à vouloir construire vaille que vaille des cantines. Notre délégué a été arrêté injustement. Nous allons le soutenir jusqu’au bout. Maintenant, il appartient aux forces de l’ordre, si elles veulent, de venir arrêter tous les commerçants du marché central. En attendant son jugement (mercredi), des journées sans légumes ont été décrétées en soutien au délégué Thierno Ciss’’, s’indigne le responsable du marché de Moussanté.
Refus catégorique des vendeuses
Dans les moments de mouvements d’humeur, il y a toujours un groupe qui rejette la décision de la base. Surtout en de pareilles circonstances où chacun travaille pour son propre compte. Le mot d’ordre décrété par les commerçants du marché central de Thiès décidant de mettre l’activité de la vente de légumes en veilleuse pendant trois jours n’a pas été suivi à la lettre par les femmes qui s’y activent. Un tour au marché central de la capitale du Rail nous a permis de constater que les vendeuses de légumes n’ont pas obtempéré. Sur place, plus précisément au rond-point Diakhao, l’activité se déroule convenablement sous le regard vigilant d’une dizaine d’éléments du Groupement mobile d’intervention (Gmi). A l’intérieur du marché, les étals d’oignons, de pommes de terre, de carottes, de choux-raves etc., sont installés à perte de vue au grand bonheur de la clientèle. Pour les vendeuses de légumes, il n’est point question d’observer un seul jour d’arrêt de travail au risque de faire des méventes. ‘’Nous ne refusons pas de soutenir le délégué général Thierno Ciss.
Mais nous ne pouvons pas aussi observer un arrêt de travail parce que nous n’avons que la vente de légumes comme principale activité. Le fait de décréter des journées sans légumes n’est pas une décision pertinente. En ce qui me concerne, j’ai décidé de venir au marché pour écouler tout mon stock. Et si vous entrez à l’intérieur du marché, vous verrez que l’activité se déroule à merveille’’, soutient Seynabou Ndiaye. La quarantaine révolue, Mme Ndiaye souligne que l’arrestation de leur délégué général ne les laisse pas indifférentes. Cependant, elle indique que celle-ci peut être combattue ‘’autrement, mais pas de cette manière’’.
‘’J’ai des enfants à nourrir. En plus, nous avons uniquement la vente de légumes comme activité journalière. Donc, je ne vois pas la pertinence d’un tel mouvement de grève’’, se lamente Seynabou Ndiaye. Pour sa part, Adja Maїmouna Samb estime que c’est avec la vente de légumes qu’elle parvient à payer la scolarité de ses quatre enfants. C’est pourquoi elle propose qu’un autre moyen de protestation soit trouvé pour affirmer leur soutien au patron de l’Unacois Jappo. ‘’Nous sommes profondément touchées par son arrestation. Mais, il faut déclencher une autre forme de lutte permettant à tous d’y trouver son compte’’, confie Adja Maїmouna Samb. En attendant le jugement de Thierno Ciss ce mercredi, devant le Tribunal des flagrants délits de Thiès, ses souteneurs s’organisent davantage pour le ‘’mercredi noir’’, et pendant ce temps, la vente de légumes continue de plus belle, au bonheur d’une clientèle pas encore affectée.
LAMINE DIALLO (MAIRE DE THIES-NORD) ‘’J’avais pris à la légère cette plainte de l’entrepreneur’’ ‘’Ce n’est pas le maire qui a demandé à Thierno Ciss de quitter. J’ai parlé avec l’entrepreneur pour lui faire comprendre qu’il y a un retard dans les travaux et qu’il y a beaucoup de manquements par rapport aux termes de la convention. Aujourd’hui, un accord devrait être trouvé à l’amiable et qu’il me laisse la troisième bande du canal que la mairie va prendre en charge. Les travaux de la troisième bande doivent être pris totalement en charge par la municipalité. A terme, les espaces vont être cédés aux vendeurs. Il y a un réel problème d’espace au marché central de Thiès. Il est pratiquement débordé. Sa capacité d’accueil a depuis très longtemps été dépassée. Voilà le problème que nous rencontrons au niveau de ce marché. Il y a eu un manquement sérieux dans la cessation des étals. La mairie de Thiès-Nord n’a pas porté plainte. J’avais pris à la légère cette plainte de l’entrepreneur. Quand il y a eu cette plainte, j’ai résonné l’entrepreneur pour lui dire qu’il est allé trop loin. On pouvait régler ça. Mais avec cette plainte, la Justice a détérioré des antécédents du délégué pour le peindre comme quelqu’un de violent, quelqu’un qui s’oppose aux décisions de la Justice et aux actes qui sont pris par le maire. Cette tension sociale-là au niveau du marché central, on n’en a pas besoin.’’ |
GAUSTIN DIATTA (THIÈS)