Publié le 1 Jun 2018 - 21:11
LEVEE DU MOT D’ORDRE DE GREVE

Ucad, une reprise au rythme de sénateur

 

La reprise des cours prévue le mercredi 30 mai à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar a été timide.  La division et la déception chez les  étudiants en sont les principales raisons.

 

Assise sur un banc public, dans la cour de la faculté de Droit de l’Université Cheikh Anta Diop, Aïssatou Ba est plongée dans son fascicule. L’étudiante veut profiter de ses heures libres pour réviser ses leçons, car les examens sont prévus au mois de juillet. ‘’Nous avions trois cours aujourd’hui, mais nous n’en avons fait qu’un seul. Les professeurs ne sont pas venus’’, affirme-t-elle. Par petits groupes, les étudiants discutent tranquillement. Pour l’heure, nombre parmi eux sont toujours absents. Selon Fadé Bocar, étudiant en première année, ces étudiants sont tout bonnement rentrés chez eux, à l’intérieur du pays, suite à l’annonce de la grève illimitée. Il estime aussi que les ‘’divergences’’ notées entre dirigeants du mouvement étudiant ont fait beaucoup ‘’de déçus et d’insatisfaits’’. Ce qui a impacté négativement sur la reprise des cours. Les futurs juristes s’accordent sur un point : la reprise est timide, malgré la levée du mot d’ordre de grève.

Sur un ton taquin, Bocar ironise : ‘’Je pense aussi que le ramadan y est pour quelque chose, car depuis le début du jeûne, nous n’avons pas fait cours. Certains se sont sûrement habitués à cette oisiveté facilitant le jeûne.’’

Du côté des enseignants, l’on affirme être prêt à reprendre les cours, même si, pour l’instant, les amphis ne font pas encore le plein. ‘’Les cours magistraux et les travaux dirigés se déroulent normalement. Cette grève n’a pas un grand impact sur les cours, parce qu’elle a été courte. Aussi, nous sommes en avance par rapport aux autres facultés. Même si on doit prolonger l’année, cela ne serait que pour une semaine, pas plus’’, confie un enseignant.

A la faculté des Sciences et techniques, le calme règne en maître. Habituellement bondée de monde avec un hall assez bruyant, aujourd’hui, c’est tout le contraire. L’activité principale consiste à profiter de la connexion disponible à partir du wifi de l’Ucad. Si certains attendent les cours de l’après-midi, d’autres affirment n’avoir fait aucune des classes prévues dans leur emploi du temps. ‘’Je pense que c’est mieux pour nous de bosser et de ne pas perdre de temps’’, déclare Abdoulaye Bocoum en Licence 1 physique-chimie. Son camarade Mody Ndiaye, en Licence 3, dénonce la division entre les étudiants au sein du campus qui a abouti, aujourd’hui, à une reprise bancale. Seul un petit groupe d’étudiants en blouse blanche, en attente devant une salle de travaux pratiques, illustre un tant soit peu la reprise des cours. En clair, dans cette partie de l’Ucad, les représentants reçus au palais récemment ont déçu la majeure partie des étudiants.

‘’Nous ne croyons pas que les engagements pris par le chef de l’Etat soient respectés’’

A la faculté des Lettres et sciences humaines, plusieurs salles sont fermées. La cour et le hall de la faculté sont presque vides. Les étudiants ont, en fait, du mal à s’accorder sur une version. Pour certains, le mot d’ordre de grève n’a pas été officiellement suspendu par les chefs de liste, donc pas de reprise. Pour d’autres, la fin de la grève a bel et bien été annoncée et les cours ont repris, même s’il y a très peu d’étudiants. Assane Top est en Master 1. Il évoque le mélange de la politique et des études dans l’espace universitaire pour expliquer la cacophonie.

‘’Les étudiants n’ont plus confiance en ce régime en place. Ils préfèrent donc rester chez eux et observer ce qui va réellement se passer. Les représentants ont eu quelques satisfactions d’un point de vue financier. Mais, au fond, nous ne croyons pas que les engagements pris par le chef de l’Etat soient respectés à l’avenir. Il faut aussi rappeler que l’affaire Fallou Sène a été rangée aux oubliettes. Qu’est-ce qu’ils ont fait après l’enquête ? Voici des interrogations qui empêchent une reprise effective des cours’’, indique-t-il.

Connus pour sa particularité, la faculté de Médecine a vu ses étudiants reprendre le chemin des amphis après deux semaines d’interruption. Cependant, le nombre de présents est en dessous de la normale. ‘’C’est notre avenir qui est en jeu. Il faut que toute l’université reprenne les cours, puisque nous n’avons pas su nous unir pour défendre la même cause’’, regrette  une étudiante qui a préféré taire son nom.

Le campus reprend peu à peu son souffle. Mais, en même temps, les amphis peinent, pour l’heure, à faire le plein.

Emmanuella Marame FAYE (stagiaire)

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