Publié le 25 Jun 2018 - 23:26
MEDECINE TRADITIONNELLE

Les guérisseurs de Fatick veulent une reconnaissance

 

L’Afrique peut ‘’effectivement’’ guérir ses malades, sans faire recours à la médecine occidentale. C’est la conviction du médecin traditionnel du centre Malango de Fatick. Dr Eric Gbodossou plaide pour une législation et un encadrement de la profession. Il a pris part ce week-end à Fatick à une conférence en prélude au xoy, une cérémonie traditionnelle des Sérères.

 

‘’L’Afrique peut absolument soigner les Africains’’. Cette affirmation est du Dr Eric Gbodossou, médecin chef au centre de médecine traditionnelle Malango de Fatick. Selon ce dernier, le système cartésien est ‘’limité’’, ‘’étroit’’ et ‘’désert’’, ‘’il ne connaît pas la vie, il n’a rien pour mesurer l’énergie, l’émotion, ni l’intuition’’. Or, Dr Gbodossou estime que quand on enlève ces valeurs de l’homme, ‘’il ne reste qu’une coque vide’’. ‘’65% des maladies sont psychosomatiques, domaine dans lequel nous médecins, nous sommes limités. En plus de ces 65% pour lesquels nous sommes limités, il y a toute cette flopée de maladies incurables. Toutes les maladies virales sont incurables. En définitif, nous médecins, nous ne sommes pas capables de grand-chose’’, a-t-il dit. Le médecin chef du centre Malango présidait ce week-end un panel sur le sujet, en prélude à la cérémonie annuelle de xoy  (science de prédictions annuelles des Sérères).

Dr. Gbodossou reste persuadé que le continent ‘’a tout ce qu’il lui faut’’, pour la santé et le bien-être des populations africaines. ‘’Nous avons mis en place un centre expérimental de médecine traditionnelle à Fatick qui existe depuis 3 décennies. Les évaluations  du travail qui se fait dans ce centre ont montré que toutes maladies confondues, il y a 65% de taux de guérison totale et 25% d’amélioration quantifiable. Aucune clinique au niveau mondial n’a ce taux de guérison. Cela veut dire qu’en matière de santé traditionnelle, nous avons plus à donner au nord qu’à recevoir’’, a-t-il soutenu.

Toutefois, le patron du centre Malango regrette le fait qu’au Sénégal, la médecine traditionnelle soit encore ‘’illégale’’. ‘’Même si elle est tolérée, il n’y a pas un cadre législatif, légal, administratif qui permet un libre exercice de ce métier. C’est dommage. Or, ce qui est bon doit être connu et répandu pour mieux servir. Nous ne demandons que ça’’, a-t-il plaidé. Il faut noter sur ce point que le ministère de la Santé a introduit à l’Assemblée nationale, en juin 2017, un projet de loi sur la médecine traditionnelle. Mais le texte avait créé la polémique du côté de l’Inter-ordre des professionnels de la santé (Iops) qui avait demandé son retrait. Cependant, selon le Dr Gbodossou, de la même manière qu’on accepte au Sénégal la médecine traditionnelle chinoise ou tibétaine, celle africaine ne doit gêner personne. ‘’Si elle gêne, c’est parce que nous sommes stupides. L’intelligence africaine est paresseuse. On ne travaille pas’’, a-t-il soutenu.

‘’Les Occidentaux ne maîtrisent pas le côté spirituel’’

Pour sa part, le responsable du centre Malango, Emile Niang, a relevé que la médecine traditionnelle, ce n’est pas seulement la phytothérapie. ‘’Il ne faut surtout pas se cantonner sur cette technique. Cela dépasse ce volet. Cette médecine est globale. Je pense, quelle que soit la méthode utilisée, que l’importance, c’est le résultat final. Ce que les Occidentaux ne maîtrisent pas, c’est le côté spirituel. C’est pourquoi ils la rejettent. Or, c’est quelque chose qui est propre à l’Afrique, ils ne peuvent pas le comprendre’’, a-t-il dit.

D’ailleurs, le président de l’Ong Prometra (Promotion des médecines traditionnelles) a indiqué que ‘’seule’’ la spiritualité peut ‘’sauver’’ le monde qui est en déperdition. Pour lui, il faut donc réhabiliter la spiritualité universelle, sinon ‘’il n’y aura pas d’avenir’’ sur cette planète. ‘’Nous avons cette possibilité de changer le monde. C’est pourquoi je fais une requête auprès de nos partenaires : arrêtez de persécuter les sorciers africains ! Préserver la sorcellerie africaine, c’est un savoir qui va sauver le monde. C’est l’avenir de l’humanité’’, a-t-il insisté.

Ainsi, le président des guérisseurs traditionnels de Malango, Amath Diop, a-t-il prôné une collaboration entre les deux pratiques. ‘’Les occidentaux nous font croire qu’il y a des maladies incurables. Or, tel n’est pas le cas. Qu’on nous laisse soigner nos malades avec nos racines. On parle souvent de problème de dosage. Mais sachez que même avec les médicaments modernes, si on prend beaucoup de comprimés à la fois, ça peut nous tuer. Comme le médecin moderne, chaque guérisseur prescrit une dose bien spécifique aux patients’’, a-t-il précisé. Toutefois, il admet qu’il y a des brebis galeuses parmi eux. De ce fait, il préconise une sanction pénale pour toute personne qui se déclare guérisseur et qui n’est pas capable de soigner un malade. Pour lui, un bon guérisseur n’a pas besoin de faire le tour des médias pour faire sa publicité.

Des malades de sida ‘’guéris’’ à Malango

On peut guérir du sida, contrairement à ce qu’affirme la médecine occidentale. Du moins, si l’on se fit à la révélation du Dr Gbodossou, ce week-end à Fatick, lors d’une rencontre sur les ‘’Xoy’’ à Fatick. Selon lui, une des plus grandes universités noires américaines sur la santé, notamment la Morehouse School of Medecine d’Atlanta, en Georgie,  a envoyé des équipes à Malango pour faire des prises de sang sur des malades de sida pour des fins d’analyses approfondies.

‘’Ils ont accepté de faire l’étude in vitro de nos produits sur des cellules vaginales infectées de sida. Ils sont venus, il y a quatre semaines, prendre le sang de nos patients qui ne prennent plus rien du tout, depuis plus d’une décennie. Ils ont envoyé ces résultats, il y a seulement cinq jours. J’ai été heureux de savoir que ce que nous savons depuis plus d’une décennie a été confirmé par les Américains. Le résultat est clair : aucun de nos malades suivis, traités par les médecins de Malango, n’a pas un seul virus dans le sang’’, a-t-il rapporté avec enthousiaste.

S’appuyant sur ces résultats, Dr Gbodossou a soutenu que cela doit permettre d’arrêter de suivre ce qui se passe en matière de la trithérapie. Car, estime-t-il, c’est une façon de préparer l’Afrique à ‘’un suicide collectif’’. ‘’Nous soumettons nos malades à une trithérapie antirétrovirale. Et c’est le Nord qui donne l’argent pour l’acheter. Demain, s’ils refusent de nous en donner, on fait quoi ? Tous nos malades vont mourir, alors que des solutions africaines existent. C’est le moment, pour chacun, de prendre conscience de sa responsabilité à tous les niveaux. Qu’on fasse un effort pour donner reconsidération à la médecine traditionnelle africaine afin qu’on trouve des solutions africaines pour nos malades’’, a-t-il conclu.

MARIAMA DIEME

 

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