Publié le 6 Jun 2018 - 21:11
TENSION ENTRE LE SENEGAL ET LA GAMBIE A LA FRONTIERE

L’Armée, la Gendarmerie et les Eaux et Forêts en mission de paix

 

La forte tension entre Sénégalais et Gambiens a poussé la Gendarmerie, l’Armée et les Eaux et Forêts à organiser, du vendredi 1er au samedi 02 juin, le long de la frontière entre les deux pays, une opération mixte de nomadisation dont l’objectif était d’apaiser les populations des deux pays et pacifier la zone frontalière.

 

Depuis le décès de Moustapha Guèye, fervent défenseur de la forêt, tué par les trafiquants de bois, le 06 avril dernier dans la commune de Niaming, département de Médina Yéro Foula, région de Kolda, la tension est palpable entre les populations sénégalaises et gambiennes vivant le long de la frontière. C’est ce qui ressort des propos des habitants de Sam Yoro Guèye, village d’origine du défunt sis dans la commune de Niaming, lors de l’opération de nomadisation organisée par les forces de défense et de sécurité. « Nous ne pouvons pas accepter ce mutisme des autorités sénégalaises, suite à l’assassinat de notre compatriote Moustapha Guèye. Un fervent défenseur de la forêt dont le corps sans vie a été retrouvé en pleine forêt par des enfants partis à la recherche de bois mort », soulignent les habitants qui demandent justice.

« 24 heures après la mort de celui-ci, trois personnes suspectes ont été arrêtées par la police gambienne. Il s’agit d’un Sénégalais et de deux Gambiens. Depuis lors, les trois présumés meurtriers sont entre les mains de la police gambienne qui refuse de les remettre aux autorités sénégalaises. Vraiment, nous exigeons leur transfert sur le territoire sénégalais, afin qu’ils puissent être condamnés à la hauteur de leurs actes », dit-on.  

Foncier

Ce n’est pas tout. Le litige foncier entre les villages sénégalais et gambiens est aussi une véritable bombe à retardement. L’obtention des terres de culture ou de pâturage est une préoccupation majeure des populations rurales vivant le long de la frontière, entre les habitants du département de Médina Yoro Foula et certains villages gambiens. « Chaque année, les compatriotes du Président Adama Barrow viennent au Sénégal pour chercher des terres. Même si ce sont les mêmes peuples vivant de part et d’autre de la frontière, des litiges fonciers les divisent souvent », renseignent les villageois.

Ils préviennent : « Ces litiges fonciers ne sont pas encore à l’origine de conflits ou de batailles rangées, mais tout peut dégénérer un jour, si les mesures idoines ne sont pas prises par les autorités des deux pays. C’est pourquoi nous exigeons immédiatement la délimitation de la frontière, d’ici le démarrage de l’hivernage. Sinon, pendant l’hivernage, le pire risque d’arriver. Et nous ne voulons pas que ce qui s’est passé entre le Sénégal et la Mauritanie en 1989 puisse se passer entre le Sénégal et la Gambie. Les autorités étatiques de deux pays doivent savoir que la balle est dans leurs camps, si vraiment elles se soucient des problèmes des populations. »

Sachant qu’elles sont liées par l’histoire et la culture, les populations vivant le long de la frontière au nord de la région de Kolda et les populations gambiennes partagent les mêmes us et coutumes. Elles vivent en parfaite harmonie, depuis la nuit des temps. Mais cette entente fraternelle pourrait être mise à rude épreuve à cause des terres de cultures et de pâturage. ‘’Car, avec l’accroissement des populations et des troupeaux, nous ne pouvons plus respecter ces traditions. Nos champs sont détruits par les troupeaux gambiens et pire, nos vaches sont contaminées », fulmine un villageois de Touba Mboyène.

Pour éviter tout conflit entre les populations sénégalaises et gambiennes situées le long de la frontière, l’Armée, la Gendarmerie et le service des Eaux et Forêts ont jugé nécessaire d’organiser une opération mixte de nomadisation.

Raffermir les relations entre les deux peuples

« Cette opération mixte de nomadisation entre dans le cadre d’apaiser les tensions, de pacifier la zone, mais aussi et surtout, de raffermir les relations entre les deux peuples, afin d’éviter le pire. C’est dans cette optique que nous avons jugé nécessaire d’aller le vendredi 1er juin rencontrer les populations des villages de Sam Yéro Guèye, de Touba Mboyène, de Missira Mboyène, de Macka Abdou Sall et de Niaming. Tous ces villages sont des contrées situées dans le territoire sénégalais », a expliqué un élément des forces de défense et de sécurité qui a préféré garder l’anonymat.

Cette même source renseigne que le samedi, la délégation s’est rendue en Gambie, plus précisément dans le village de Thialène Diahanka, où deux autorités des forces de défense et de sécurité ont été rencontrées. ‘’Il s’agit du commissaire de police de Bansang, Amadou Sabaly, et du capitaine Ba, commandant du camp militaire Dounkang. Avec ces autorités, nous avons eu à parler avec les populations des questions de paix et de sécurité entre les deux pays. Car aujourd’hui, le Sénégal et la Gambie, deux pays frères, n’ont pas intérêt à créer un conflit. Car les Sénégalais et les Gambiens sont des parents. Donc il ne sert à rien d’allumer le feu dans la maison d’un frère de sang.’’

A l’en croire, à l’issue de ces pourparlers avec les populations, ces dernières ont accepté d’enterrer la hache de guerre et de cultiver la paix le long de la frontière. A signaler que cette opération mixte de nomadisation a été dirigée par le capitaine Diémé de la zone militaire N°6 de Kolda.

EMMANUEL BOUBA YANGA

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