Ils ont dansé, chanté et rigolé avec les rappeurs venus leur rendre visite hier en prison. Les détenus ont eu leurs heures de détente.

15h 26 minutes. Un garde pénitentiaire en tenue de service verte stationne, une feuille à la main, devant l’entrée de la Maison d’arrêt et de correction (MAC) de Rebeuss. Il filtre les entrées dans la prison. Pas de la même manière que les autres jours. Aujourd’hui, les pensionnaires de Rebeuss accueillent des hôtes de marque. Le rappeur Malal Talla alias Fou Malade y tient un concert avec sa clique dans le cadre de la ''prison tour'' (ndlr : tournée dans les prisons). Les ''privilégiés'' du jour ont leurs noms sur la liste tenue par le gardien. Ils peuvent, après avoir décliné leur identité, avoir accès à l’intérieur.

Une fouille sérieuse s’impose aux visiteurs

Chose facile peut-on tenter de se dire. Car dehors, le garde ne fouille pas le visiteur. L’élégance et le respect le lui interdit. A 5O m se trouve une autre grande porte en grille. Ici, se passent les choses sérieuses. On décline une fois encore son identité. Après vérification, on nous laisse franchir la porte. Une femme, garde pénitentiaire, se charge de nous fouiller. Ce n’est pas les fouilles faciles auxquelles on est habitué lors des grands rassemblements. Ici, on ne blague pas. La fouille est sérieuse. On regarde même dans les soutiens-gorge. De manière discrète quand même sans offenser la personne. Après la poitrine, la ''fouilleuse'' descend et touche à tout. Absolument tout. Pour voir si rien n’est caché quelque part. Après, les sacs, portables et porte-monnaie sont confisqués, le temps du concert. La fouille terminée, on est escorté par un garde pénitentiaire qui nous amène au lieu du concert.

C’est la grande cour de la prison qui accueille le concert de Malal Talla. Les prisonniers sont sortis en grand nombre malgré la chaleur qu’il faisait. La joie se lisait sur leurs visages. Il ne sentait pas le soleil qui tapait pourtant très fort à cette heure. ''A travers ce concert, vous nous offrez une bouffée d’air'', a même certifié le porte-parole des prisonniers qui a tenu à remercier vivement l’initiateur de cette manifestation. C’est ainsi que pendant 2 heures, les détenus de Rebeuss ont pu communier entre eux, mais aussi avec des amis qu’ils n’ont pas vus depuis de longue date.

C’est Karim Wade, Ousmane Ngom et Abdoulaye Wade qui doivent être en prison

''Il n’est pas normal qu’on vous garde ici pendant des années sans que vous ne soyez jugé'', a dit Fou Malade à l’endroit des prisonniers. ''Il est temps que l’État se penche sérieusement sur le cas des longues détentions. Les prisonniers sont nombreux. S’ils étaient jugés selon les normes établies par la loi concernant la durée de la détention, on aurait pu désengorger ces lieux'', a-t-il ajouté.

Cependant, il a tenu aussi à sermonner les détenus : ''Vendre de la cola, c’est bien. Il n’y a pas de mal à vendre des cure-dents. Ce qui est mal, c’est d’agresser, de voler ou de tuer. Si vous arrivez à sortir, cherchez-vous un travail''. Discours accueilli avec beaucoup d’enthousiasme par les détenus qui ont ovationné le patron de Youkoungkoung studio.

Encore que des innocents pullulent dans les prisons. Au moment où des criminels se la coulent douce dehors. ''C’est Ousmane Ngom, Karim Wade, Abdoulaye Wade et tous les voleurs de la République qui doivent croupir en prison. On doit libérer ceux qu’on a arrêtés le 23 juin'', a lancé Thiat de Y’en a marre.

''Na daal'', ''Guiss Guiss'', Bionix, coalition Niamu mbaam, 5kiem underground, Keur Gui crew et Bat Blindé ont animé le concert. Les détenus ont dansé et chanté. Le camp pénal sera la prochaine étape prévue le 28. Fort B reçoit les rappeurs depuis hier, ce, jusqu’au 28 juin pour des ateliers hip-hop.

BIGUÉ BOB