Etudiant à l’Université virtuelle du Sénégal (UVS), El Hadj Mamadou Ba dit Mama Ba s’apprêtait à aller faire le djihad en Libye. Hier, à la barre de la Chambre criminelle spéciale, il a allégué qu’il n’avait jamais eu cette intention même s’il était en contact avec des combattants sénégalais.

Après l’élève Pape Kibili Coulibaly, l’étudiant El Hadj Mamadou Ba dit Mama Ba a comparu hier, à la barre de la Chambre criminelle spéciale du Tribunal de grande instance de Dakar. Inscrit en Sciences économiques et gestion à l’Université virtuelle du Sénégal (UVS), l’étudiant est attrait pour actes de terrorisme par association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, actes de terrorisme par menace ou complot, financement du terrorisme, blanchiment de capitaux et apologie du terrorisme. Il résulte de l’accusation qu’il voulait se rendre en Libye avec ses amis Abdou Lahad Diop et Pape Kibili Coulibaly pour rejoindre le groupe terroriste ‘’les Moudjahidines’’. D’après le substitut Aly Ciré Ndiaye, l’itinéraire avait été trouvé par Moustapha Faye et Pape Moussa Sow.

Lors d’un rendez-vous à la Brioche dorée de Diamalaye, ces derniers leur avaient demandé de patienter, le temps qu’ils reviennent au Sénégal, car ils devaient retourner à l’étranger. Mama Ba l’a nié catégoriquement. Toutefois, il a avoué qu’il était en contact, via l’application ‘’Telegramm’’, avec les nommés Abou Hatim et Ibrahima Bâ, présentés comme des combattants djihadistes. D’ailleurs, le dernier lui a installé l’application pour lui permettre de joindre Moustapha Faye. Car, en partant en Libye avec Pape Moussa Sow, le sieur Faye lui avait demandé de s’adresser à Ibrahima Bâ, s’il voulait avoir de ses nouvelles. Avant son départ, il avait aussi manipulé sa page Facebook, en changeant le pseudo ‘’Zeum Capiso Seck’’ et en remplaçant certaines de ses amies filles qui portaient des habits indécents par des djihadistes. C’était dans le but de lui permettre de recevoir des informations, mais Faye lui avait interdit de commenter ou d’aimer les publications. A l’enquête, il aurait soutenu que le même Moustapha Faye ainsi que Pape Moussa Sow avaient réussi à le convaincre de faire le djihad.

‘’Après une prière à la mosquée de notre quartier, j’ai vu Moustapha Faye visionner avec Lahad Diop une vidéo où des gens étaient persécutés. J’avais même cru que c’était un film et j’ai demandé à Moustapha qui c’étaient ? Il m’a répondu que ce sont des musulmans birmans et il m’a reproché de négliger ma religion’’, a raconté l’accusé. Puis, devant le juge d’instruction, il aurait ajouté que le susnommé lui avait tenu un discours contre les occidentaux et contre la laïcité, au point qu’il avait décidé d’aller en Libye, non pas pour combattre avec les armes, mais pour aider les populations. Il aurait précisé que Moustapha Faye lui avait tenu le discours pendant une semaine, mais ne lui avait pas donné les moyens, car il n’était pas convaincu de son adhésion à ses idéaux.

Mama Bâ a contesté avoir tenu de tels propos, arguant encore qu’il n’a jamais eu l’intention d’aller faire le djihad. ‘’Mais qu’est-ce que vous avez répondu au juge, lorsqu’il vous a demandé pourquoi vous étiez encore au Sénégal, alors que Moustapha Faye et Pape Moussa Sow avaient réussi à vous convaincre ?’’ Face à cette interpellation du président Samba Kane, l’accusé a avancé avoir répondu que la connexion lui prenait trop de temps, au point qu’il n’arrivait plus à aider ses parents, surtout ma mère. ‘’Vous aviez répondu : « La rivalité entre le groupe de la Libye et celui du Nigeria avait fini par m’agacer et je ne m’y retrouvais plus. En sus, l’imam de notre mosquée ne cessait de s’attaquer à Pape Moussa Sow et Moustapha Faye. Il pensait que ces deux personnes se sont servies de la religion pour détourner les jeunes de Yoff’’, a rectifié le président. ‘’Je ne l’ai pas dit ainsi. L’imam nous demandait de faire attention à l’islam et au terrorisme’’, a répliqué l’accusé.

A la suite du juge, le représentant du parquet lui a rappelé le témoignage de son petit frère Seydou Nourou Ba. Lors de leur confrontation à la DIC, ce dernier avait déclaré que son grand frère assistait aux prêches de Moustapha Faye, Zaid Ba, Cheikh Ibrahima Dieng et Pape Moussa Sow, mais il s’est totalement démarqué lorsque leur mère l’en a dissuadé et il a tourné le dos à tout ce qui est radicalisme. ‘’Je ne crois pas qu’il ait tenu ces propos, car mon frère ne connaît ni Ibrahima Ba ni Cheikh I. Dieng, car il ne durait même pas à la mosquée’’, a réagi l’accusé. Le maître des poursuites lui a rappelé les propos tenus devant le Doyen des juges, à cet effet.

‘’Vous disiez que vous aviez l’intention d’aller au Nigeria et, qu’au début, vous étiez emballé par le projet, mais par la suite, Pape Kibili et vous, vous êtes retirés, surtout à cause de l’opposition farouche de vos parents, surtout de votre mère malade’’, a renseigné le parquetier. Et de poursuivre qu’Abou Hatim les incitait à venir en Libye, car la Charia y était appliquée. ‘’Vous affirmiez qu’il vous demandait de quitter cette terre d’injustice souillée par les mécréants. Vous aviez adhéré, mais Pape Kibili avait fait défection, compte tenu de la dégradation de l’état de santé de sa mère’’, a relevé le substitut. L’accusé de répondre : ‘’Je n’avais pas l’intention de partir.’’

Il a ajouté qu’Abou Hatim leur avait plutôt suggéré (Lahad Diop et lui) de se réfugier en Gambie, lorsqu’ils lui avaient fait savoir qu’ils se sentaient surveillés, a rectifié l’accusé. Sur sa lancée, il a allégué que Lahad est parti en Gambie et lui avait demandé de ne rien dire à ses parents, car il allait les appeler à son arrivée. Mais, d’après le parquetier, le nommé Lahad est plutôt parti en Libye. Il s’est fondé sur les déclarations de Pape Kibili qui aurait dit au magistrat instructeur que Lahad avait reçu le financement de 150 000 F CFA. Il a précisé que, dans un premier temps, Mama Ba avait appelé Lamine Coulibaly pour l’informer de la disponibilité de la somme de 150 000 pour une seule personne. Mais lui, a décliné, parce qu’il devait partir avec Lahad.

Par ailleurs, le parquetier a demandé à Mama Ba de revenir sur les réponses qu’il avait fournies, lorsqu’il a été interrogé sur le djihad. ‘’J’avais répondu que mon djihad, c’est d’aider mes parents et cela fait partie de la religion’’, a-t-il avancé. Mais, d’après le président, il avait donné comme réponse : ‘’Je pensais que c’était indispensable pour tout musulman. J’ai toujours cru que les musulmans doivent inciter les autres à embrasser l’islam et ne pas hésiter à prendre les armes. Maintenant, je ne crois plus à leur théorie, d’après ce que je vois à la télévision’’. Sur la pratique de l’islam au Sénégal, l’accusé aurait déclaré qu’elle n’est pas conforme, car il y a beaucoup d’innovations apportées par les soufis telles que la formulation de prières après les cinq prières, ainsi que le ‘’wazifa’’. Dans sa lancée, il aurait fustigé les confréries, les jugeant non indispensables. Hier, il a réfuté la paternité de ces déclarations.

FATOU SY