Publié le 17 Oct 2020 - 02:40
POLÉMIQUE AUTOUR DU RAPPORT SUR LA PÊCHE ILLÉGALE

Greenpeace charge à nouveau le ministère

 

Le ministère de la Pêche a contesté le dernier rapport de Greenpeace publié le weekend dernier. L’ONG revient à la charge et considère que la tutelle n’apporte aucun élément de réponse à ses révélations.

 

Le dernier rapport de Greenpeace/Afrique intitulé ‘’Mal de mer : pendant que l’Afrique de l’Ouest est confinée par la Covid-19, ses eaux restent ouvertes au pillage’’, fait grand bruit. En réponse à ce document qui met en exergue la pêche illégale exercée par des bateaux étrangers dans nos eaux, le ministère de la Pêche et de l’Economie maritime avait publié un communiqué de presse, le 12 octobre dernier, pour rejeter les principales conclusions du rapport.

 Selon les services de communication du ministre d’Alioune Ndoye, ‘’les allégations totalement infondées contenues dans ledit rapport sont d’autant plus surprenantes qu’à plusieurs reprises, le ministère de la Pêche et de l'Economie maritime a toujours apporté des éclairages, des précisions et des démentis, à chaque fois que cela s’imposait, à l’endroit des acteurs, de l’opinion publique nationale et internationale’’.

Non contente de cette réponse, Greenpeace a tenu à répondre au ministre, hier. Dans un communiqué parvenu à notre rédaction, Dr Ibrahima Cissé, le responsable de la campagne océans de Greenpeace/Afrique, soutient que : ‘’Le ministère en charge de la pêche n’a apporté aucun élément de réponse à la polémique en cours. Greenpeace/Afrique avait déjà officiellement saisi le ministère des Pêches et de l'Economie maritime au sujet de ces navires étrangers à deux reprises, depuis le début de l'année 2020. Mais le ministère n'a pas jugé nécessaire de répondre à nos sollicitations.’’

Selon le document, au lieu de rejeter la faute sur la société civile, les autorités gouvernementales devraient choisir la ‘’transparence’’ et rendre publique la liste des navires autorisés à pêcher dans la Zone économique exclusive (ZEE) sénégalaise, y compris le type et la date d'attribution des licences, pour lever toute équivoque.

Mieux, le ministère devrait éclairer l'opinion publique, en précisant à l’issue de quelles réunions de la Commission consultative d’attribution des licences de pêche industrielle (CCALP) les demandes de ces bateaux, objet de la polémique, ont été examinées et les acteurs présents.

‘’Vérité et transparence’’

En 2012, poursuit le Dr Cissé, Macky Sall, candidat à l’élection Présidentielle, avait soutenu la campagne de Greenpeace/Afrique contre les bateaux de pêche étrangers qui exploitent les stocks marins sénégalais. Une fois élu, il a tenu sa promesse d'arrêter ce bradage ; ce qui lui a même valu le prix Excellence in National Stewardship of the Ocean, lors de la 6e édition des Peter Benchley Ocean Awards, pour sa politique de protection de la pêche sénégalaise. Greenpeace/Afrique avait félicité le président Sall, en l’exhortant à maintenir le gel des licences jusqu'à ce que des études scientifiques prouvent que les stocks de poissons dans les eaux sénégalaises se sont reconstitués.

‘’Selon toujours le communiqué de presse du ministère, Greenpeace collabore avec les organisations de pêche industrielle et artisanale. Sur ce, nous lui disons que nous n’avons jamais cessé de dénoncer la monopolisation des ressources pélagiques et la fraude au tonnage par la pêche industrielle. Mais les autorités n'ont pas encore réagi, à ce jour. En 2017, une expédition organisée par Greenpeace, en collaboration avec les Etats membres de la Commission sous-régionale des pêches (CSRP) avait identifié de nombreux navires pratiquant la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), et des sanctions ont été prises à l'encontre de certains de ces bateaux’’, renseigne le Dr Cissé. Pour lui, contrairement à ce que prétend le ministère, les usines de farine de poisson, en réalité, utilisent le poisson frais qui est sciemment laissé en état de putréfaction, car leur capacité dépasse largement le tonnage des déchets produits.

‘’Trouver des failles dans le système juridique pour accorder des licences aux navires, lorsque les stocks sont surexploités et que les populations sont sous-alimentées, est contraire à l'éthique. Greenpeace reste et demeurera toujours du côté de la vérité et de la transparence, peu importe le statut de son vis-à-vis. Greenpeace/Afrique réitère son engagement à soutenir les femmes transformatrices de poisson, les pêcheurs artisanaux et les communautés affectés par ce pillage des ressources halieutiques et lance un nouvel appel pour : la publication de la liste des navires de pêche industrielle du Sénégal, ainsi que le type et la date de délivrance des licences, l'élimination dans la pratique de toute production de farine de poisson à partir de poisson frais, la réorientation de la capacité de transformation de la farine et de l'huile de poisson vers des produits destinés à la consommation humaine directe et la reconnaissance professionnelle des femmes transformatrices de poisson et leur accompagnement pour qu’elles jouissent de leurs droits’’, conclut le responsable de la campagne océans de Greenpeace/Afrique.

CHEIKH THIAM

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