Les germes de la transformation
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Dans une ambiance carnavalesque, le président de la République, Macky Sall, a lancé, hier, le Promoged, dont la finalité est de transformer la décharge de Mbeubeuss en une décharge moderne.
D’un coût de 206 milliards F CFA, le Projet de promotion de la gestion intégrée et de l’économie des déchets (Promoged) a été lancé, hier, à Mbeubeuss (commune de Malika, département de Keur Massar) par le président de la République Macky Sall. Il s’agit, selon le chef de l’Etat, d’un outil stratégique d’exécution du Programme Sénégal zéro déchet, dont la finalité est de favoriser la création de meilleures conditions de vie pour les populations, dans un environnement assaini et accueillant.
D’après le président Sall, ce projet a pour ambition de créer de meilleures conditions d’hygiène et de salubrité publique, partout au Sénégal, à travers la mise en œuvre d’une stratégie nationale intégrée de gestion et de valorisation des déchets. ‘’Il s’agit là de lutter contre l’insalubrité, mais aussi de créer des activités génératrices de revenus. Ainsi, le Promoged innove, dans l’approche du traitement des déchets, avec un système performant et pérenne de gestion. Lequel système est fondé sur la mise en place d’infrastructures, d’équipements et de matériel adaptés, mais également sur le développement d’une économie circulaire basée sur la revalorisation et l’élimination des déchets, l’éducation, la formation et la sensibilisation des populations’’.
Au total, informe Macky Sall, ce sont 150 infrastructures de traitement de déchets qui seront installés dans 138 communes, pour améliorer le cadre de vie de 6 millions de personnes et générer 3 000 emplois en particulier pour les jeunes et les femmes. Rassurant les récupérateurs qui s’activent sur le site, le chef de l’Etat a assuré que leurs intérêts seront bien pris en compte, à travers notamment leur reconversion dans la filière, dans le respect des normes d’hygiène, de santé, de sécurité et de sureté.
Par ailleurs, soutient-il en écho au coordonnateur national de l’UCG : ‘’Il faut une redéfinition du cadre institutionnel, organisationnel et financier du secteur. Le Promoged devra ainsi contribuer à l’éradication des décharges sauvages néfastes pour l’environnement, la santé des populations, les activités économiques et l’attractivité de nos cités. La situation de la décharge de Mbeubeuss, vieille de 53 ans, en est une parfaite illustration. C’est pourquoi le Promoged procédera à l’assainissement complet du site de Mbeubeuss, avec l’installation d’une unité de tri et de compostage des déchets.’’
Au-delà du nouveau département de Keur Massar et de la région de Dakar, le nouveau projet compte s’étendre aux autres régions, notamment Thiès, Saint-Louis, Matam, Ziguinchor, Sédhiou, Kolda, ainsi que la région centre et centre-est du Sénégal.
Le diagnostic sans complaisance de l’UCG
Au Sénégal, selon le coordonnateur national de l’UCG, Mass Thiam, plus de la moitié des ordures produites par les ménages est jetée dans la nature. Seul 47 % des déchets sont effectivement collectés, dont 30 % par les charrettes. Sur ces masses de déchets, 5 % seulement font l’objet d’un traitement industriel. Dans la même veine, le coordonnateur national de l’UCG a indiqué que 25 % des Sénégalais n’ont accès à aucun service de gestion des déchets, alors que 53 % des déchets collectés c’est du sable. Aussi, a déclaré Mass Thiam, au Sénégal, aucune des décharges ne respecte les normes internationales en matière de gestion des ordures.
Outre ces statistiques peu reluisantes, le coordonnateur de l’UCG est revenu sur les nombreuses difficultés qui assaillent le secteur de la gestion des ordures ménagères. Parmi ces difficultés, il y a le manque de moyens, notamment humains et financiers.
Ainsi plaide-t-il pour un doublement du budget de l’institution. A ce propos, signale-t-il, l’UCG ‘’est à environ 100 F par habitant par mois. Nous aurions souhaité que cela soit porté à 200 F par habitant par mois’’. Pour ce qui est du personnel, il souhaite que les effectifs soient renforcés. Le personnel, explique M. Thiam, est actuellement à un ratio de 1 agent pour 3 555, alors que le ratio normal est de 1 agent pour 500 habitants.
Par ailleurs, le coordonnateur national de l’UCG a rendu compte des difficultés d’ordre juridique et institutionnel qu’il faut résoudre pour une prise en charge correcte de la problématique. ‘’La gestion des déchets, constate-t-il, est partagée entre plusieurs départements ministériels : Assainissement pour les déchets liquides, Urbanisme pour les ordures ménagères et assimilés, Santé pour les déchets biomédicaux et Environnement pour les déchets industriels. Aussi, depuis plus de 50 ans, il n’y a pas de stabilité sur le plan institutionnel et juridique’’.
C’est donc dans ce cadre que le Promoged intervient pour une amélioration de la gestion des ordures ménagères. ‘’Sur une durée de 5 ans, le projet va toucher 7 millions de Sénégalais, 700 000 ménages, 3 000 emplois directs et 138 communes du Sénégal pour 155 infrastructures de traitement de déchets. C’est un projet à fort impact social, économique et environnemental’’, renseigne-t-il avant de plaider pour la mise en place d’une Société nationale de gestion des déchets (Sonaged).
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PROMOGED
Les engagements des partenaires
Pour la réalisation du Promoged, l’Etat du Sénégal peut compter sur ses partenaires que sont l’Agence française de développement, de l’Agence espagnole de coopération internationale pour le développement, la Banque européenne d’investissement et la Banque mondiale.
Selon le représentant de cette dernière qui s’est prononcé au nom des partenaires, ce projet est en droite ligne avec les conclusions du Conseil présidentiel sur le financement de l’emploi des jeunes.
‘’En effet, souligne-t-il, l’un des objectifs les plus ambitieux du Promoged, c’est de créer un cadre favorable pour plus de 1 800 personnes qui vivent et travaillent sur la décharge, en vue de les mettre dans des conditions plus décentes et plus dignes’’.
A en croire le directeur des Opérations de l’institution de Bretton Woods, l’objectif du projet du gouvernement est de renforcer la gouvernance du secteur des déchets solides et améliorer la gestion dans les régions bénéficiaires que sont Dakar, Thiès, Saint-Louis, Matam et les trois régions de la Casamance. Il ajoute : ‘’Pour atteindre cet objectif, vos partenaires vont assurer le financement du Promoged à hauteur de 280 millions de dollars. Il faut ajouter à ce financement une importante contribution du budget national du Sénégal. Ainsi, en six ans, c’est au total près de 350 millions de dollars, soit 190 milliards de francs CFA, qui seront investis pour donner accès à des services améliorés de gestion des déchets solides à environ 6 millions de Sénégalais et Sénégalaises, et renforcer les capacités d’au moins 90 municipalités’’.
Ainsi, soutient-il, le Promoged permettra d’augmenter notablement le volume des déchets solides recyclés, à travers des infrastructures répondant aux normes internationales et de réduire, de façon significative, le volume important de déchets jetés dans les rues ou déversés dans la mer.
Un clin d’œil électoral
Parce qu’il sait l’importance de Keur Massar dans la reconquête de la grande banlieue de Dakar, le président de la République multiplie ainsi les actes pour conserver son avance dans cette partie de la capitale sénégalaise, particulièrement dans le nouveau département qui, à lui seul, compte plus de 600 000 habitants.
Hier, à l’occasion du lancement du Projet de promotion de la gestion intégrée et de l’économie des déchets (Promoged), il est encore revenu sur l’attachement qu’il porte à Keur Massar. Il déclare : ‘’Après la création du département, j’ai procédé, hier (avant-hier), à la nomination du préfet et des sous-préfets des trois arrondissements qui composent le département, à savoir Jaxay, Malika et Yeumbeul. Aujourd’hui, j’ai tenu à être parmi vous pour marquer l’importance que j’attache à votre département, dont la création illustre mon attachement à une administration de proximité, encore plus au service des populations. C’est dans le même esprit que je suis venu présider, personnellement, la cérémonie de lancement du Promoged.’’
Macky Sall ne s’en limite pas. Pour lui, le fait d’avoir consacré sa première visite officielle dans le nouveau département de Keur Massar à l’hygiène publique et à l’assainissement, illustre combien il a envie de relever, dans la localité, les défis de la salubrité et de l’assainissement.
‘’J’ai à l’esprit, souligne-t-il, le défi majeur de salubrité et d’inondation auxquelles Keur Massar est souvent confronté. Je veux par-là vous assurer que ces défis ne sont pas une fatalité. Nous avons commencé à les relever, grâce aux travaux de la phase II du Progep (Projet de gestion des eaux pluviales et d’adaptation aux changements climatiques), avec la création d’ouvrages hydrauliques, de voirie et divers aménagements paysagers qui seront finalisés à la fin de ce mois de juin’’.
Selon le président, l’Etat compte aller encore plus loin dans la modernisation du cadre de vie de Keur Massar, avec les plans directeurs et d’urbanisme qui devront être établis pour le nouveau département, mais aussi la nomination des services, à la suite de la nomination des autorités administratives.
MOR AMAR