“Macky Sall a aggravé les problèmes fonciers dans notre pays’’
Le régime de Macky Sall est incapable de résoudre les conflits fonciers. C’est l’avis de L’inspecteur des Impôts et Domaines à la retraite, Alla Kane. Selon lui, pour trouver une solution face à cet épineux problème, il faut un décret pour délimiter les zones territoriales des zones pionnières.
‘’Je pense vous dire, en tant que président de la République, que les plus gros risques de conflit dans ce pays restent la question foncière. Au quotidien, je ne reste pas sans recevoir plus de 20 ou 50 dossiers brûlant à travers le territoire national'', alertait Macky Sall, devant les maires et présidents de conseils départementaux. C’était en 2020, lors de la première édition de la Journée nationale de la décentralisation tenue. Mais qu’est-ce qu’il faut pour résoudre ce problème ?
L’inspecteur des Impôts et domaine à la retraite, Alla Kane, tient le Président pour responsable de cette situation, même si les problèmes ont débuté avant son accession au pouvoir. ‘’On lui a confié la mission de régler le problème dans ce pays. Il doit trouver des solutions à cette situation. Ce n’est pas suffisant de rappeler seulement. Il ne s’emploie pas à régler les problèmes mais dans sa pratique quotidienne, lui-même a aggravé les problèmes fonciers dans notre pays’’, a-t-il fulminé, en marge du ‘’Samedi de l’économie’’. Il urge pour l’Etat et les politiques de chercher des solutions qui préservent à la fois les droits de l’Etat et de ses démembrements à utiliser les droits inaliénables de populations à leurs terres.
Alla Kane dénonce une spoliation qu’a constituée la loi sur le domaine national. En effet, à travers l’ensemble du territoire national, des centaines d’hectares sont attribués à des étrangers. Des conventions foncières sont signées sur 20 à 22% des terres cultivables. A Mbane 4 mille ha sont attribués à une privée nigériane pour la culture de cannes à sucre. A Bokhone et Fass Ngom, respectivement 5 mille ha et 10 mille ha sont donnés à une société étrangère. A koussanar, trois mille ha sont attribués à un Libano-syrien pour une ferme. A Sandiara, 105 ha sont données au groupe Marocain Zarah. A pointe Sarene, ce sont 23 ha, pour une station balnéaire. À Thiès, plus de 300 terrains sont attribués à des responsables politiques. La liste est loin d’être exhaustive. Et des privés sénégalais ont eu leur lot. Sur la période 2000-2011, une attribution de 657 mille 775 ha, soit 16, 45% des terres cultivables a été effectuée. En 2016, l’on fait état de 19 transactions foncières pour une superficie totale de 270 900 ha, soit 3% des terres arables. Douze proviennent des pays étrangers notamment la Roumanie, l’Italie, la France, les Pays-Bas, les pays asiatiques comme l’inde, des pays régionaux comme le Nigéria et le Cameroun. En outre, selon Alla Kane, ‘’aucun investisseur français n’a noué un partenariat avec des investisseurs nationaux’’. Tout ceci fait qu’aujourd’hui, partout au Sénégal, il y a des collectifs de défense des intérêts des populations contre l’accaparement de leurs terres.
Il faut dire que l’Etat seul peut immatriculer les terrains, mais il y a une condition. L'Etat ne peut requérir l’immatriculation des terres du domaine nationale constituant des terroirs ou affectées par décret que pour la réalisation d'opérations déclarées d’utilité publique. Hors, ça n’a jamais été respecté, selon Alla Kane. A l’en croire, tous ces problèmes liés au foncier résultent de l’absence d’un décret répartissant zones territoires et zones pionnières. En effet, lorsque l’on enlève les terres urbaines et les zones classées, ce qui reste se trouve dans la campagne. Mais toutes les terres de la campagne ne sont pas des terres du territoire ; toutes les terres du terroir ne sont pas des zones pionnières. La zone des territoires correspond, en principe, aux terres qui sont régulièrement exploitées pour l’habitat rural, la culture, ou l’élevage. Elle est affectée aux membres des communautés qui assurent leur mise en valeur. ‘’J’entends souvent des gens dire que quand on est sénégalais on peut s’installer où on veut. Mais non! Les zones des terroirs, c’est pour les paysans. Et quand on attribue des dizaines, des centaines d’ha sur ces zones-là, on agresse les paysans. Les problèmes seraient réglés si on délimitait les zones pionnières’’, a soutenu Alla Kane. ‘’Le foncier au Sénégal : d’hier à aujourd’hui et les enjeux pour demain’’. C’est le thème qu’il abordait.
BABACAR SY SEYE