Les prévenus risquent 2 ans, pour avoir torturé un voleur
Accusés d’avoir lynché à mort un voleur qui s’était introduit nuitamment dans sa chambre, Moussa Bâ et son ami Bakary Diatta risquent une peine de 5 ans dont 2 ans ferme pour coups mortels.
N’eût été une disqualification, Moussa Bâ et son ami Bakary Diatta allaient comparaître devant une chambre criminelle pour meurtre. Ainsi, après information, le juge d’instruction les a renvoyés pour coups mortels. Les deux amis encourent une peine de 5 ans dont 2 ans ferme.
Pourtant, dans cette affaire, Moussa Bâ aurait pu comparaître en tant que partie civile, s’il ne s’était pas fait justice lui-même. La victime est un voleur qui s’est introduit nuitamment dans sa maison, au quartier Sant Yalla de Boun. C’était dans la nuit du 28 au 29 avril 2016. Tandis que la maisonnée était plongée dans les bras de Morphée, Adama Diallo avait escaladé le mur pour s’introduire dans le salon et s’emparer de deux téléphones portables et d’une pochette.
C’est au moment de mettre main basse sur le téléviseur écran plat que la maitresse de maison a été réveillée par le bruit. Informé par son épouse, Moussa Bâ s’est réveillé en sursaut et mis fin à la sale besogne du visiteur nocturne. ‘’J’ai crié au voleur et il a voulu s’échapper, mais je l’ai attrapé. Nous avons eu à échanger des coups, car nous nous sommes battus’’, a narré le prévenu, hier, à la barre du tribunal correctionnel de Dakar. Dans la foulée, il a imputé la mort du voleur à la foule. ‘’Après la bagarre, la foule est venue, car elle avait entendu mes cris. Tout le monde s’est mis à lui donner des coups. J’ai dû intervenir en leur demandant de me laisser le livrer aux forces de sécurité’’, s’est défendu le sieur Bâ.
Sauf que cette version est contredite par les témoignages faits à la gendarmerie par sa sœur et son épouse. Ces dernières ont déclaré à l’enquête que Moussa Bâ, aidé par son co-prévenu, avait ligoté le voleur en le soumettant à un interrogatoire sous la torture. Hier, à la barre, Binta Bâ a confirmé que Bakary détenait un fil électrique, alors que ce dernier a soutenu être venu après la torture. Il s’y ajoute qu’à leur descente sur les lieux, les gendarmes de la brigade de Keur Massar ont découvert des traces de torture sur le corps de la victime, mais également d’autres objets (gourdin, bâton, cravache…) dans la cour.
Malgré ces éléments, les prévenus ont persisté dans leurs dénégations. Convaincu par les éléments du dossier, le maître des poursuites a fustigé l’attitude des prévenus en leur faisant comprendre que la vie d’une personne prime sur des biens matériels. ‘’Un bien matériel n'a pas la même valeur qu’une vie humaine, car elle est sacrée. Même si Adama Diallo était un voleur, vous n'aviez pas le droit de le frapper, ni de regarder les autres le faire, vu qu'il était déjà maitrisé’’, a fait remarquer le substitut Aly Ciré Ndiaye.
Assurant la défense de Bakary Diatta, Me Djiby Diagne a demandé que les témoignages soient écartés, car les deux dames ont été dubitatives. Il a plaidé l’excuse de la provocation, avant de demander la relaxe de son client.
Me Théophile Kayossi a aussi souhaité que Moussa Bâ soit libéré pour qu’il puisse serrer, dans ses bras, son enfant qu’il devait baptiser quelques jours après les faits. Le frère et l’oncle de la victime, qui ont peint la victime sous ses beaux jours, n’ont pas réclamé de dommages et intérêts. Délibéré le 7 décembre prochain.
FATOU SY