SOUDAN
De violents combats se poursuivent malgré une prolongation de la trêve
Dans la nuit de jeudi à vendredi, l’armée du général Abdel Fattah Al-Bourhane et les Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohammed Hamdan Daglo, dit « Hemetti », ont accepté de prolonger de 72 heures la trêve qui n’a quasiment jamais été respectée.
De violents combats se poursuivaient, vendredi 28 avril, à Khartoum et au Darfour, malgré une prolongation de la trêve au Soudan entre l’armée et les paramilitaires. Les deux camps sont engagés dans une guerre pour le pouvoir qui a fait plus de cinq cents morts en deux semaines.
A El-Geneina, chef-lieu de l’ouest du Darfour, soixante-quatorze personnes ont été tuées lundi et mardi, a rapporté le syndicat des médecins. Les morts des trois derniers jours n’ont pas pu être comptabilisés dans la mesure où les hôpitaux du pays sont « hors service ». « Le système de santé est au bord de l’effondrement total » et « 12 000 patients souffrant d’insuffisance rénale pourraient mourir faute de dialyse », alerte le syndicat.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, l’armée du général Abdel Fattah Al-Bourhane et les Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohammed Hamdan Daglo, dit « Hemetti », ont accepté de prolonger de soixante-douze heures la trêve qui n’a quasiment jamais été respectée.
A Khartoum, bombardements aériens et tirs antiaériens ont retenti près du quartier général de l’armée, rapportent des témoins à l’Agence France-Presse (AFP). Au Darfour, « la situation est toujours très tendue », raconte à l’AFP un habitant d’El-Geneina : « Les marchés ont été pillés et il n’y a plus de nourriture. » Selon lui, plusieurs immeubles et des camps de déplacés ont été « gravement endommagés », et l’électricité est « coupée depuis lundi ».
Avocats et médecins alertent à propos de cette région frontalière du Tchad. A El-Geneina, des combattants ont sorti « mitraillettes, mitrailleuses lourdes et machines de tirs antiaériens » et « tirent des roquettes sur des maisons », rapporte l’ordre des avocats du Darfour. « Bourhane et Hemetti doivent immédiatement arrêter cette guerre stupide qui se fait sur le dos des civils », a-t-il également exhorté.
L’Organisation des Nations unies (ONU) affirme que « des armes sont distribuées » aux civils. Son haut-commissaire aux droits de l’homme a prévenu que le conflit ravivait des affrontements ethniques au Darfour occidental et s’est dit « préoccupé » par le « climat d’impunité généralisée ». Quelque 50 000 enfants « souffrant de malnutrition aiguë » y sont privés d’aide alimentaire, avertit l’ONU qui a suspendu ses activités après la mort de cinq humanitaires.
Quelque 270 000 personnes pourraient fuir le Soudan
Peu d’informations filtrent de cette région où une guerre déclenchée en 2003 entre le régime d’Omar Al-Bachir, renversé par l’armée en 2019, et des insurgés issus de minorités ethniques a fait environ 300 000 morts et près de 2,5 millions de déplacés, selon l’ONU.
Les belligérants continuent de s’accuser mutuellement de violer la trêve. L’armée a même dénoncé des tirs des FSR sur un avion militaire turc venu évacuer ses ressortissants. Ankara a confirmé, précisant qu’il n’y avait aucun blessé, selon l’agence de presse étatique Anatolie.
Par ailleurs, le général Bourhane a dénoncé à la télévision la participation dans les combats de « mercenaires du Tchad, de Centrafrique et du Niger ».
Sur le front diplomatique, les deux généraux ont déclaré avoir eu des échanges avec les Etats-Unis, l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis, l’Ethiopie et le Soudan du Sud, qui s’inquiète des « débordements déjà visibles » du conflit, en particulier avec l’afflux de « réfugiés » dans les pays voisins. Plusieurs dizaines de milliers de personnes ont déjà traversé les frontières, notamment celles du Tchad à l’ouest et de l’Egypte au nord. Au total, 270 000 personnes pourraient fuir au Tchad et au Soudan du Sud, selon l’ONU.
Un représentant du général Bourhane est attendu samedi au Caire pour rencontrer le chef de la diplomatie égyptienne, Sameh Choukri.
Les deux généraux avaient évincé ensemble les civils au pouvoir lors d’un putsch en 2021. Depuis, ils ne sont pas parvenus à s’accorder sur l’intégration des paramilitaires dans l’armée avant de finalement en venir aux armes le 15 avril.
Plusieurs pays occidentaux, dont les Etats-Unis, la France, le Canada et le Royaume-Uni, continuent d’évacuer des centaines de personnes. A Paris, les ministères des affaires étrangères et des armées ont annoncé dans la soirée que la France avait évacué plus de mille personnes dont 216 ressortissants français et ayants droit depuis le week-end dernier. Un avion des forces françaises, parti d’El-Fasher et arrivé vendredi matin à N’Djamena (Tchad), a permis d’évacuer des membres du personnel des Nations unies et d’ONG humanitaires, ont-ils précisé dans un communiqué.
La Chine a annoncé avoir fait sortir du pays la plupart de ses ressortissants. Un nouveau navire saoudien est arrivé vendredi à Djedda (Ouest), portant à 2 991 le nombre de personnes secourues par Riyad, qui a accueilli l’essentiel des étrangers ayant quitté le Soudan par la mer.
Le Monde avec AFP
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