Publié le 15 Aug 2012 - 10:20
SPOLIATION DES TERRES D’ALLOU KAGNE

Les villages attaquent Wade, les marabouts et Dangote

 

10 000 ha de terres de Allou Kagne avaient été affectés par le président Abdoulaye Wade à des chefs religieux, des politiques et au géant nigérian Aliko Dangote. Les populations de 8 villages de la communauté rurale de Keur Mousseu les réclament. Elles se sont regroupées en un comité inter-villageois et réclament justice.

 

''Nous sommes toujours à l’époque de la colonisation''. C'est le cri de cœur des populations de la zone nord de la communauté rurale de Keur Mousseu. Elles se considèrent comme ''vendues'' par l'ancien régime libéral qui a pris 10 000 ha de leurs terres pour les attribuer à des marabouts, des politiciens et privés. ''Wade a donné ces terres de Aloume Kagne à des marabouts des deux plus puissantes familles religieuses du Sénégal, au détriment des populations qui utilisaient cette forêt comme zone de pâturage. Parce que 90% des villageois sont des éleveurs et des agricultures. C’est injuste'', dénonce Cheikh Guèye, un habitant du village de Dehee touché par le problème.

 

En effet, les villageois sont très amers envers l'ancien président qu'ils clouent au pilori. ''Nous savons comment fonctionnait Wade. C'était pour attirer une clientèle politique qu’il a affecté nos terres à des marabouts'', dénonce le coordonnateur du comité Assane Kounta qui s'en prend également aux marabouts coupables de convoiter les terres de pauvres hères. ''Maintenant, tout le monde connaît le rôle d’un marabout, dit-il. C’est de prêcher au nom de Dieu, pour conduire les fidèles vers le droit chemin. Donc, ces marabouts ne doivent pas se battre avec les pauvres citoyens pour des biens matériels''.

 

Il rappelle l’exemple de Serigne Abdou Aziz Dabakh qui ne s'occupait que de choses spirituelles. ‘’Mame Abdou, poursuit-il, était un modèle. Depuis sa disparition, les marabouts sont devenus de plus en plus matériels. À chaque fois qu’ils interviennent dans les radios et télévisions, c’est pour réclamer des terres et non pour des prêches’’, déplore M. Kounta. ''Laissez-nous ces terres'', s'écrie donc Assane Kounta. ''Cette zone ne vous appartient pas. Nous en avons besoin, parce que nous sommes des éleveurs et agriculteurs, nous avons besoin de cela.'' Les populations attendent du président Macky Sall qu'il revienne sur le décret signé par l'ex-président Abdoulaye Wade ayant mis une partie des terres de Alloum Kagne à la disposition des marabouts et de Dangote.

 

Récriminations contre Dangote

 

Après Wade et les marabouts, les habitants des 8 villages qui entourent le site de la cimenterie de Dangote implantée à Pout, se sont attaqués au géant nigérian. ‘’Aujourd’hui nous vivons avec l’un des plus grands chantiers du pays, à savoir Dangote industrie Sénégal. Il se trouve que depuis le début des travaux, la population vit avec une certaine injustice, surtout au niveau de la sous-traitance’’, déclare Assane Kounta, jugeant ‘’inacceptables’’ les conditions imposées par ces derniers. ‘’Non seulement, révèle-t-il, ils ont réduit les émoluments des employés de l'usine en construction (6000 F Cfa par jour à moins de 3 000 F Cfa), mais ils favorisent d’autres travailleurs venus d’ailleurs, au détriment des habitants des environs''. Alors qu'ils ''avaient promis de prendre 45% de leurs ouvriers dans la communauté rurale''.

 

Le constat est amer. ''Il n'y a pas 5% des villageois dans l’usine. Ils ont licencié tous ceux qui dérangeaient’’. En effet, à de nombreuses reprises, les travailleurs s'étaient fait entendre en manifestant contre la détérioration de leurs conditions de travail et les salaires ''de misères'' qui leur sont alloués. A cela s’ajoute la rumeur de la délocalisation du village de Galane contigu à l’usine. ‘’Nous savons que le village va être délocalisé et on nous a appelés autour de la table, à plusieurs reprises. Ils nous ont toujours promis de trouver des terres pour le village, mais ce qui nous inquiète, c’est qu’on arrive à trouver des milliers d’hectares pour des marabouts et qu’on n’arrive toujours pas à trouver 100 ha pour délocaliser le village de Galane. Nous ne bougerons pas d’ici tant que les conditions ne seront pas respectées.''

 

La population demande donc au Directeur général de la nouvelle usine de cimenterie et aux autorités étatiques de prendre les dispositions nécessaires, afin que justice leur soit rendue. Autrement, les villageois promettent de se soulever pour réclamer leurs droits. ‘’C’est un appel que nous lançons, pour que les autorités compétentes trouvent une solution à ce problème. Mais si rien n’est fait, nous n’exclurons rien pour entrer dans nos droits.’’

 

 

NDEYE FATOU NIANG

 

 

 

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