Le sport ballotté entre réformes et carences financières

Pour sa première année à la tête de l’État, le nouveau régime s’est consacré à la mise en place de réformes dans le sport sénégalais. La prise en charge de ce secteur a souffert toutefois d’un réel manque de moyens financiers.
Ce 24 mars 2025 marque l’an 1 de l’élection de Bassirou Diomaye Diakhar Faye à la présidence de la République du Sénégal. Le nouveau régime a affiché son ambition de placer sa gouvernance sur la voie de la rupture. C’est dans ce sens que s’est inscrite la Vision Sénégal 2050. Ce changement de paradigme est symbolisé, au département des Sports, par la nomination à la tête du ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Culture d’une femme. Le 6 avril 2024, Khady Diène Gaye devient la première dame à occuper la tête du ministère des Sports.
Dès sa prise de fonction, la nouvelle ministre a enclenché le processus de mise en œuvre des réformes pour un sport ‘’compétitif’’. Elle a redynamisé le projet de mise en place du Code du sport. Entamé depuis 2013 par le précédent régime, ce chantier, auquel elle a participé en tant qu’agente de l’État, a connu un coup de frein, entretemps. ‘’J’ai tenu, dès ma prise de fonction, à relancer ce processus et de façon inclusive, à travers le partage avec les cadres du département, ceux des fédérations et groupements sportifs ainsi que les personnes-ressources qui nous accompagnent’’, a indiqué la ministre des Sports, le 20 juin 2024, lors d’un atelier de partage de l’avant-projet de la loi relative aux activités physiques et sportives. Les travaux sont en cours.
Engagée à rebooster l’éducation physique populaire à l’école, l’inspectrice de l’éducation populaire, des sports et de la jeunesse a donné le premier coup de fouet pour ‘’renforcer la pratique du sport dans toutes les écoles et universités du Sénégal, et à relancer les compétitions sportives, scolaires et universitaires sur l’ensemble du territoire national’’, comme exigé par le nouveau président élu. Au mois de juin 2024, Khady Diène Gaye a procédé à l’installation du bureau de la Fédération du sport scolaire créée par le décret n°2021-1594 du 2 décembre 2021, qui a institué également la Fédération du sport universitaire.
JOJ Dakar-2026
Les nouvelles autorités ont affiché leur engagement à accompagner le Comité d’organisation des Jeux olympiques de la jeunesse Dakar-2026. Au mois d’octobre dernier, le Premier ministre Ousmane Sonko a présidé un Conseil des ministres sur l’organisation de ce premier événement olympique en Afrique. À la suite de l’état des lieux sur l’avancement des préparatifs par le COJOJ, il a été retenu de renforcer le dispositif de coordination entre le Comité d’organisation des Jeux olympiques de la jeunesse et les structures gouvernementales. Le PM avait enjoint la ministre des Sports de faire chaque mois une communication en Conseil des ministres sur l’état d’avancement de l’organisation et de la préparation des athlètes sénégalais.
À propos de la préparation des athlètes d’ailleurs, Mme Gaye avait annoncé, lors de la rencontre avec les directeurs techniques nationaux des fédérations sportives devant prendre part aux JOJ, qu’une enveloppe d’un milliard de francs CFA est prévue dans le budget 2025. Durant cette audience, la ministre a discuté avec ses hôtes de la planification stratégique de la mise en œuvre du plan de préparation des athlètes.
Les finances, le goulot d’étranglement
La vacuité des caisses de l’État tant criée par le nouveau régime n’a pas épargné le secteur du sport. Les acteurs en ont fait les frais. Plusieurs disciplines sportives ont manqué des compétitions internationales à cause d’un défaut de soutien des autorités publiques ou sont obligées de supporter elles-mêmes les frais de participation. Pour corriger cette carence, le ministère des Sports a décidé de couper les vivres à certaines entités. Dans ce souci d’‘’équité’’, c’est le football local, le basket, le volley-ball et le handball qui ont payé les pots cassés. Le 22 février 2025, dans un communiqué, la Fédération sénégalaise de football informait de la décision de l’État de ne plus supporter les charges des clubs sénégalais relatives aux compétitions africaines interclubs. ‘’Compte tenu de la nouvelle orientation de la politique de développement du sport, l’État, en sus des investissements lourds consentis notamment dans la construction et l’entretien des infrastructures sportives, a décidé de se concentrer exclusivement sur la prise en charge des différentes équipes nationales engagées dans les compétitions internationales’’, a indiqué la FSF.
Aliou Cissé, le coup de balai
L’an 1 des patriotes a été marqué dans le sport par le départ d’Aliou Cissé du banc des Lions. L’entraineur, qui a donné au Sénégal son premier titre de champion d’Afrique, a été confronté au refus de prolongation de son contrat par la ministre des Sports en octobre 2024. Dans une lettre ‘’confidentielle’’, Khady Diène Gaye avait notifié à la FSF sa décision de ne pas renouveler le bail de Cissé, à quelques jours du match aller contre le Malawi, comptant pour la 4e journée des éliminatoires de la Can-2025. Aliou avait déjà confectionné et s’apprêtait à publier sa liste.
Après près de dix ans de compagnonnage ponctué d’un titre continental, de deux participations à la phase finale du Mondial, l’ancien capitaine des Lions part de la sélection nationale sans honneur.
Infrastructures
Concernant les infrastructures, le gouvernement a misé sur les infrastructures de proximité pour réaliser la massification de la pratique sportive. C’est dans ce cadre que, le 8 juillet dernier, le ministère de la Jeunesse, des Sports et de la Culture et l’Agence nationale chargée de la promotion de l’investissement et des grands travaux de l’État (Apix) ont signé une convention pour la construction d’infrastructures sportives de proximité, ‘’durant les cinq prochaines années’’. Cet accord comprend la construction de plateaux multifonctionnels, de salles fermées pour la pratique des arts martiaux, de parcours sportifs, de piscines, entre autres, au niveau des ‘’557 communes’’ du Sénégal. Cette signature fait suite à l’instruction, lors du Conseil des ministres du 5 juin 2024, du président de la République à la ministre chargée des Sports ‘’de proposer, avant fin juillet 2024, sous la supervision du Premier ministre, une nouvelle politique efficace et efficiente de construction, de réhabilitation, d’entretien et de gestion de toutes les infrastructures sportives du Sénégal’’. En décembre 2024, Khady Diène Gaye a déclaré vouloir doter 100 communes du pays de plateaux multifonctionnels en 2025, dans le cadre d’un partenariat avec le secteur parapublic et le patronat.
LOUIS GEORGES DIATTA