Publié le 28 Feb 2017 - 19:29
SERIGNE SOUHAIBOU BADIANE (IEF DE KANEL)

‘’Chaque année une centaine d’enseignants demandent à partir’’

 

Lors de la tournée, la semaine dernière, du ministre de l’Éducation nationale Serigne Mbaye Thiam dans le Fouta, EnQuête a accroché  l’Inspecteur de l’éducation et de la formation (IEF) de Kanel, Souhaibou Badiane. Selon ce dernier, les enseignants qui sont dans les zones les plus reculées demandent souvent à quitter pour rejoindre la capitale. Face à cette situation, une initiative locale est mise en place. Entretien.

 

Beaucoup d’enseignants ne veulent plus rester longtemps dans la région de Matam. Comment faire, selon-vous, pour les retenir ?

Nous faisons face à un départ massif des enseignants. Souvent, nous essayons de prendre des initiatives au niveau local pour les encourager à rester le plus longtemps possible. Mais il faut noter qu’ils ont le droit, à un certain moment, de demander à partir. Et s’ils le font, ils peuvent avoir satisfaction. Donc on ne peut pas les retenir légalement.  Maintenant, il faudrait que l’on trouve des moyens au niveau local pour les motiver à rester pour nous permettre au moins d’assurer la continuité afin de bénéficier d’enseignants expérimentés. Souvent au niveau de l’école élémentaire, les enseignants partent pour leurs examens pratiques.

Quelles sont ces initiatives pour les retenir?

Parmi les initiatives, nous avons, en premier, l’assistance aux enseignants qui sont dans les zones les plus enclavées. Il y a certains qui sont dans le Ferlo qui ressemble à un désert. Tous ces enseignants ont un problème de santé parce qu’ils sont dans des zones reculées. Ils ne bénéficient pas de services médicaux. Ils ont des problèmes d’eau parce que ce sont des zones où il n’y a pas d’eau potable mais plutôt des mares. Ils sont confrontés à des problèmes d’encadrement car ils sont excentrés et qu’il est difficile d’aller les encadrer ou les réunir en Cellules d’animation pédagogique, tellement ils sont dispersés. Ils ont aussi des problèmes de mobilité pour quitter leur village et venir dans les grandes agglomérations prendre leur salaire et faire des envois à leur famille. Ça leur prend une semaine au moins. Leur santé, souvent, se dégrade à cause de ces conditions de vie. À Kanel, nous avons pris l’initiative de mettre en place un plan que l’on appelle le Plan d’amélioration des conditions de travail et d’existence des enseignants (Pacte Ferlo).

En quoi consiste ce Plan ?

 Chaque fin du mois, on met en place des véhicules qui vont, apporter de l’eau potable à ces enseignants. Pour ensuite les récupérer et les amener en ville. Dès qu’ils arrivent, le vendredi, ils vont aller récupérer leur salaire, le samedi on les réunit en formation pédagogique pour les encadrer, le dimanche, ils font une visite médicale gratuite. Après, le lundi, les véhicules les ramènent à leur poste de travail. Ils sont accompagnés d’inspecteurs qui en profitent pour faire de la mobilisation sociale.

Depuis que l’on a commencé ce procédé, on a vu que nos enseignants sont beaucoup plus motivés parce qu’ils n’ont plus de problème de mobilité.  Même le problème de nourriture est réglé. On leur apporte des provisions. La santé est réglée parce qu’ils sont suivis médicalement. L’estime de soi aussi a augmenté car ils se sentent mieux respectés par les villageois eux-mêmes. Ils sont très contents parce qu’ils disent qu’ils ne voyaient pas les autorités. Maintenant, ils les voient au moins une fois par mois. Donc les enseignants se disent qu’ils n’ont plus besoin de bouger. Ils disent : ‘’Nous profitons de notre enclavement, de notre poste pour économiser et que d’ici 7 ans, lorsque nous allons rentrer chez nous, nous allons repartir avec un pactole qui va nous permettre de réaliser une maison.’’

Ils sont combien par an à demander à être mutés ?

Sur les demandes enregistrées, on peut avoir pratiquement le 1/3 des enseignants qui demandent à partir. À l’issue des différentes commissions de mutations, on a souvent une centaine qui part. À chaque fois qu’ils partent, on les remplace. Mais exceptionnellement cette année, avec le recrutement qui n’était pas massif, nous n’avons pas eu assez d’enseignants. Nous avons eu 23 pour remplacer la centaine qui est partie.

Que comptez-vous faire pour pallier ce  manquement ?

 Oui, il y a un manquement. Mais, avec  les résultats de l’examen du recrutement des élèves maîtres (CREM) qui sont sortis, nous espérons que l’année prochaine, nous aurons suffisamment d’enseignants. D’après les autorités, deux mille (2000) maîtres vont être recrutés. Je crois que ça va suffire largement pour combler le vide.

Mais toujours est-il que les problèmes sont toujours là…

Depuis que nous sommes là, nous avons eu beaucoup d’acquis sur le plan de la motivation des enseignants, des résultats scolaires et du dispositif de pilotage. Nous avons mis en place un Dispositif d’appui pour le maintien et la généralisation des acquis (DAMNGA) et le (Pacte Ferlo) fait partie de ce dispositif. Il y a un volet encadrement aussi bien pour les enseignants que pour les élèves. Nous avons un comité pour l’élémentaire et le moyen pour nous permettre de voir les voies et moyens qu’il faut développer pour booster les résultats. L’an passé, nous avons eu, au BFEM, un taux de réussite de 86,37%.  À l’entrée en sixième, nous avons eu un bond de 23 points. Le dispositif va nous permettre de résoudre le problème et nous avons une fête appelée ‘’Sargal’’ pour les enseignants en avril (2017). Les enseignants les plus engagés seront récompensés et nous avons suggéré aux maires des communes de donner au moins un terrain à usage d’habitation. 

AIDA DIENE

 

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