Le Sénégal et la Gambie mutualisent leurs forces
Des frontières poreuses, des pays devenus des lieux de transit, voire des plaques tournantes du trafic international de drogue et du crime organisé, le Sénégal et la Gambie en sont conscients. Les deux Etats ont décidé d’y apporter une réponse concertée et globalisée, en partenariat avec des structures spécialisées.
Le Sénégal et la Gambie subissent, de plein fouet, deux fléaux : le trafic de drogue et le crime organisé transfrontalier. Les pays ont décidé d’y faire face ensemble. Hier, la Direction de l'Office central de répression du trafic illicite des stupéfiants (Docrtis) et la Drug Law Enforcement Agency of Gambia (Dleag) (l'Agence de lutte contre la drogue) ont signé un protocole dont l’unique objectif est de mettre hors d’état de nuire les trafiquants de drogue et les auteurs de ce crime organisé au niveau des frontières. Il va s’articuler autour de trois axes prioritaires que sont les opérations et enquêtes conjointes, le partage d’informations et de renseignements et l’assistance judiciaire mutuelle et l’extradition.
Au cours de la cérémonie, le directeur de la Dleag, El Hadj Bacary Gassama, a fait quelques révélations sur le circuit de la drogue dans son pays. L'analyse des itinéraires effectuée par l'agence, au fil des ans, dit-il, a toujours donné les mêmes résultats. Que la Gambie continue d'être utilisée comme lieu de transit pour la cocaïne, l'héroïne et le cannabis provenant respectivement d'Amérique du Sud, d'Asie et de la région de la Casamance, au sud du Sénégal. La méthamphétamine, ajoute-t-il, vient du Nigeria. Ces substances entrent dans le pays par les frontières maritimes et aériennes.
La Casamance est le principal fournisseur de Cannabis à la Gambie
‘’Cependant, le plus inquiétant, c'est la culture à grande échelle du cannabis dans la région méridionale sénégalaise de la Casamance. Il est prouvé que le marché, en Gambie, est fourni, en majorité, par ce cannabis. La contrebande clandestine de cocaïne en provenance de la Guinée-Bissau et passant par le territoire sénégalais pour atteindre la Gambie par les nombreuses frontières terrestres officielles ou non, est une autre source de préoccupation’’, s’alarme M. Gassama. Selon qui il ne fait absolument aucun doute que cette situation occupe une bonne place dans les politiques intérieures et extérieures du Sénégal et de la Gambie. ‘’Notre stratégie de collaboration avec des partenaires internationaux dans la lutte contre le trafic et l'abus de drogues illicites, le blanchiment d'argent et autres formes de criminalité organisée a fait du Sénégal un partenaire stratégique clé. Cela s'explique principalement par la géographie particulière liant les deux pays’’, explique-t-il.
Dans ce contexte, à ses yeux, la convention signée est une nécessité urgente d'une coopération bilatérale pour la répression du trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes à travers les frontières poreuses entre les deux pays. El Hadj Bacary Gassama précise que cette collaboration s'inscrit dans le prolongement de la Convention unique sur les stupéfiants de 1961 et de son Protocole de 1972, ainsi que de la Convention de 1971 sur les substances psychotropes et autres protocoles et conventions internationaux. Que l'équipe de la mission d'évaluation a identifié les principaux domaines d'intervention. Ils tournent autour du soutien aux réseaux ou instances visant à favoriser l'échange d'informations au niveau régional et international, de l'accompagnement et le soutien pour promouvoir, planifier, organiser et conduire des opérations transnationales conjointes.
‘’Il faut que les narcotrafiquants de nos deux pays sachent…’’
A la suite de son homologue gambien, le directeur de la Docrtis, le commissaire de police divisionnaire Idrissa Cissé, a soutenu que les actions multiformes et multidimensionnelles ont principalement pour objet de renforcer la capacité des deux Etats à faire face aux défis sécuritaires de l’heure, pour ne pas dire aux fléaux sécuritaires des temps modernes. Ils ont pour noms : terrorisme, trafics de toutes sortes, criminalité organisée. Selon lui, partant du constat qu’il existe un trafic illicite de stupéfiants entre le Sénégal et la Gambie, ils ont adhéré à l’option d’une réponse concertée et globalisée, en partenariat avec des structures spécialisées. ‘’Nous voulons endiguer toutes formes de trafics illicites de drogue de nature à porter atteinte à la stabilité de nos deux Etats ou à porter atteinte à la quiétude des populations. Il faut que les narcotrafiquants de nos deux pays sachent, désormais, que nous sommes bien outillés pour leur barrer la route définitivement et efficacement’’, avertit le commissaire Cissé.
‘’C’est l’occasion de demander à nos partenaires de nous accompagner dans les équipements, la formation et la conduite des opérations que nous allons planifier le long de nos frontières respectives. Nos unités opérationnelles vont se connaitre davantage, échanger, se rendre visite le long des frontières pour ainsi asseoir des stratégies qui vont décourager, et sensiblement, les narcotrafiquants entre les deux pays. Nous allons nous réunir pour discuter des choses pratiques et opérationnelles’’, annonce le directeur de l’Ocrtis.
CHEIKH THIAM