Publié le 25 Oct 2018 - 15:52
TDK TV - TOUBA

Le Cnra ne peut sévir pour le moment

 

Depuis hier, l’on ne parle que des propos discourtois tenus par des gens dans une vidéo diffusée sur Tdk Tv, une chaine en ligne. Très remontée contre la presse, Touba a saisi le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra) dont le président a fait face à la presse, hier. Il juge grave ce qui s’est passé, mais n’annonce aucune sanction pour le moment.

 

Suite à une plainte du président de la Commission culture et communication du Grand Magal de Touba, Serigne Abdou Lahat Mbacké Gaïndé Fatma, le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra) a fait face à la presse. Touba est très remontée contre une télévision en ligne, notamment Tdk Tv, qui a diffusé une vidéo dans laquelle des gens attaquent des figures du mouridisme. En cette veille de Magal, cela n’est pas passé inaperçu et a irrité au plus haut point les guides mourides. Dans leur plainte, Serigne Abdou Lahat parle de ‘’propos impardonnables’’.  ‘’Ce qui s’est passé est très grave et ça l’est à chaque fois qu’on s’attaque à des croyances’’, a renchéri le tout nouveau président de l’autorité de régulation, Babacar Diagne.

Cela pouvait engendrer des violences. Hier, dans la soirée, les responsables du site incriminé ont fait une vidéo pour demander pardon et présenter leurs excuses. ‘’Hier, la situation était très sérieuse avant que des excuses soient présentées. Seulement, ce n’est pas à nous qu’ils doivent demander pardon, mais à la communauté mouride’’, a prévenu M. Diagne. Lui et ses collègues attendent la réaction de ceux qui avaient porté plainte avant de décider de la suite à donner à cette affaire. ‘’Nous savons qui ils sont et où se trouvent leurs locaux. Mais il est prématuré de dire ce qui sera fait. Ils se sont amendés ; on attend de voir comment Touba réagira. Après cela, s’il faut agir, on le fera, en collaboration avec les services de l’Etat et décider de la sanction’’, a indiqué M. Diagne.

C’est dire donc que le Cnra n’a pas les moyens de sévir. ‘’Le débat n’est pas là. Même s’il n’y avait pas le Cnra, on ne peut pas s’attaquer comme ça à une communauté’’, a expliqué Babacar Diagne. Encore que, a-t-il ajouté, des dispositions de la loi 2017-27 du Code de la presse donne une certaine ouverture sur ce plan.

En outre, le président du Cnra, journaliste de formation, appelle à un retour aux fondamentaux de ce métier. Il est d’avis que les médias ne doivent pas être les relais de personnes malintentionnées. ‘’Aujourd’hui, avec Internet, on se dit : on fait une vidéo et on la balance. On est obnubilé par le nombre de clics et le profit qu’on peut en tirer. C’est très grave’’, a-t-il dénoncé. La responsabilité doit être de mise. ‘’Il y a des gens qui en veulent à l’islam. Ce sont des gens très riches, extrêmement puissants. On a vu ce qui s’est passé au Mali, à Tombouctou. Ces gens-là rôdent autour du Sénégal. Aujourd’hui, on a une vidéo qui tourne en dérision un guide religieux, parce que ces gens sont contre l’islam confrérique. Demain, ils seront des bailleurs et feront des choses plus graves’’, a prévenu l’ancien présentateur de ‘’Tgp’’ que diffusait la Rts.

Pour éviter cela, il faut que les médias soient plus vigilants, à son avis, et qu’ils n’oublient pas qu’ils sont des moyens de socialisation extrêmement importants. ‘’Il ne faut pas laisser nos moyens de vivre compromettre nos raisons de vivre’’, disait le fondateur du journal ‘’Le Monde’’ Hubert Beuve-Méry. Babacar Diagne souhaite que les journalistes sénégalais gardent cette assertion en tête dans leur travail de tous les jours.

Par ailleurs, le président du Cnra a profité de son premier face-à-face avec la presse pour partager les grandes lignes de sa politique. Cette dernière va reposer essentiellement sur le dialogue. Le Cnra veut établir un rapport de confiance entre lui et les médias. C’est pourquoi est entamée une série de visites auprès des patrons de presse afin qu’eux-mêmes soient les premiers éléments de veille. Dans ce sens, Babacar Diagne a rendu visite au directeur général de la 2Stv, El Hadj Ndiaye, et au président-directeur général de la Télévision futurs médias, Youssou Ndour. Les deux ont été assez réceptifs à la demande du Cnra. Fort de ces accueils chaleureux, M. Diagne veut poursuivre sa tournée et aller voir les équipes de la Sen Tv, 7 Tv, Dtv, etc.

L’un des moments au cours desquels on sent le plus souvent le Cnra est celui des élections. En cette veille de présidentielle, l’autorité veille au grain. La Sen Tv  fait déjà les frais de cette veille rigoureuse qui va se poursuivre, selon Babacar Diagne. Seulement, pour éviter d’en arriver à des cas extrêmes comme celui de la Sen Tv qui a reçu dernièrement un avertissement après une mise en demeure, le dialogue sera de mise. D’ailleurs, a informé M. Diagne, ‘’les sondages se feront sous l’égide du Cnra’’.  

… Et l’Appel se désolidarise de Tdk Tv

L’Association des éditeurs et professionnels de la presse en ligne (Appel)  condamne la diffusion de la vidéo jugée provocatrice et diffusée par la chaine de télévision en ligne Tdk Tv. Dans un communiqué reçu à ‘’EnQuête’’, l’Appel ‘’s’indigne’’ et condamne la diffusion ‘’des vidéos et images qui circulent sur Internet et qui présentent les guides et foyers religieux en des termes inadéquats. De telles pratiques mettent en péril la stabilité de notre chère nation et sont à condamner de manière catégorique’’. De plus, elle ‘’ne cautionnera jamais des actes irresponsables et anti-professionnels sur le net’’, prévient-elle. Elle se désole aujourd’hui que le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra) ne dispose pas des moyens juridiques pour sévir, alors que la mise en œuvre de certaines dispositions du Code de la presse permettrait de résorber cet écueil. ‘’Le Code de la presse a consacré un nouvel organe de régulation avec plus de pouvoir : Haute autorité de la régulation des communications audiovisuelles (Harca) qui va pouvoir valablement prendre en charge la presse en ligne.

Toutefois, le Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra), dans son état actuel, est dépourvu d’arguments et d’instruments juridiques pour la régulation de la presse en ligne’’, se chagrine l’Appel.

B. BOB BIGUE BOB

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