L’infirmier chef condamné à deux ans de prison ferme
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L’audience de la chambre criminelle s’est penchée sur un cas de viol commis par un fonctionnaire. Les faits ont été requalifiés en attentat à la pudeur. L’accusé Mamadou Ba a été reconnu coupable, avant d’être condamné à une peine de deux ans d’emprisonnement ferme.
‘’A travers ce certificat médical, on ne peut pas dire qu’il y a viol. C’est ma conviction. Le ministère public estime qu’il n’y a pas viol, mais des attouchements qui n’étaient pas nécessaires. Il n’y a pas non plus de pénétration sexuelle. Par conséquent, il faut requalifier les faits en attentat à la pudeur sans violence. C’est vrai, il y a eu surprise, mais pas violence. L’accusé doit apprendre à se ressaisir. Je vous demande de le déclarer coupable du délit d’attentat à la pudeur et de le condamner à une peine de deux ans d’emprisonnement ferme’’, a déclaré Aly Ciré Ndiaye, Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Diourbel, au moment de requérir contre l’accusé Mamadou Ba, infirmier-chef du poste de santé de Tripano, sis à Grand-Diourbel, vendredi dernier.
Le procureur a dit toute sa peine, ‘’au regard du déficit de personnel de santé que traverse le pays, de poursuivre un membre de cette catégorie sociale d’hommes et de femmes pour qui (il a) beaucoup de respect’’.
Un réquisitoire contesté par les avocats de l’accusé. Pour Me Ousseynou Ngom, ‘’l’accusé n’a jamais varié dans ses déclarations. Rien ne justifie les faits pour lesquels le procureur demande qu’il soit condamné à une peine de deux ans d’emprisonnement ferme. On parle de viol, il n’y a pas d’attentat à la pudeur. Pas d’éléments de preuve que le tribunal des céans peut retenir et qui peut vous permettre d’entrer en voie de condamnation. Il faut l’acquitter des faits de viol et d’attentat à la pudeur pour lesquels il a été attrait devant la barre de votre tribunal’’.
Son confrère, Me Serigne Diongue, de renchérir : « Le premier acte impudique a été posé par la victime qui est partie se soigner, en se vêtant d’un simple châle. S’il y a attentat à la pudeur, c’est la partie civile qui l’a commise. On veut briser la carrière d’un honnête citoyen. Il n’y a ni viol, encore moins attentat à la pudeur. Le rétablir dans son honneur, en l’acquittant du délit de viol.’’
Mais cette plaidoirie de Me Serigne Diongue n’a pas été du goût du représentant du ministère public. Il lui a rétorqué qu’il n’avait pas le droit de manquer de respect à la partie civile. Il s’en est suivi une passe d’armes qui a été calmée par le président.
L’infirmier conteste les faits
Mamadou Ba, infirmier-chef du poste de santé de Tripano, a été inculpé pour viol commis par un fonctionnaire. Le 4 juin 2020, Sokhna Sène saisissait le commissariat central de Diourbel d’une plainte dirigée contre cet infirmier-chef. Dans sa déposition, elle expliquait que, s’étant présentée, le 4 juin 2020, au poste de santé pour des soins, suite à des blessures qu’elle avait sur la tête, le mis en cause l’avait reçue dans son bureau, avant de l’inviter à s’allonger sur le lit de consultation pour nettoyer la plaie, du fait que celle-ci était infectée. Poursuivant, elle laissait entendre que l’infirmier avait commencé à lui caresser les deux seins, puis trainant ses mains sur tout son corps, il avait brusquement introduit son doigt dans son vagin par surprise, ce qui l’avait conduite à sursauter et à pousser un cri. Elle lui a demandé d’arrêter. En retour, elle a été sommée de quitter les lieux.
Les conclusions du docteur Malick Guèye, gynécologue-accoucheur à l’hôpital régional de Diourbel, en date du 5 juin 2020, parlent d’‘’une égratignure au niveau postérieur de l’orifice vaginal’’.
A la barre, comme lors de l’enquête préliminaire, Mamadou Ba a réfuté les déclarations de la plaignante, expliquant que celle-ci lui avait demandé d’examiner sa blessure et qu’il l’avait invitée à monter sur le lit pour faire la consultation. Mais, à sa grande surprise, sa patiente est revenue, quelque temps après, avec son frère qui l’a accusé d’avoir violé sa sœur.
Finalement, il a été reconnu coupable du délit d’attentat à la pudeur et condamné à une peine de deux ans d’emprisonnement ferme.
FIN DE L’AUDIENCE DE LA CHAMBRE CRIMINELLE Papa Mouhamed Diop, Président du tribunal de grande instance de Diourbel, tire le bilan Cette année, il a été constaté que seules deux audiences ont été organisées, en lieu et place de quatre audiences organisées habituellement. Qu’est-ce qui l’explique ? On avait l’habitude de tenir trois à quatre audiences, mais avec le contexte, on a tenu que deux audiences, avec la distanciation sociale et le respect de toutes les mesures barrières. Pour cette présente audience, on avait onze affaires inscrites au rôle. Seule une a été renvoyée pour un motif de transfèrement de détenu qui était par ailleurs retenu pour d’autres motifs. C’est un satisfecit. Sur les onze affaires, dix ont été retenues, jugées et vidées. Seule une affaire demeure au stock, dans les affaires criminelles, au-delà de celles qui sont en instruction dans les cabinets. Vous avez été félicité par le représentant du bâtonnier, du fait que la plus vieille affaire date de 2017. Quel est votre secret ? Il y a eu des réformes entreprises par la chancellerie. Pour les délits, il y a un délai qui est donné aux juges d’instruction pour enquêter. Il y a des chambres permanentes au niveau de chaque juridiction de grande instance et elles peuvent être délocalisées au niveau des tribunaux d’instance. Ce qui allège tout ce formalisme. Et parlant des avocats, ils ont leur partition à jouer. Les affaires criminelles impliquent la constitution obligatoire d’un conseil et à chaque fois que de besoin, quand nous les sollicitons, que ce soit devant le juge d’instruction ou à l’audience, ils n’hésitent pas rapidement à désigner quelqu’un pour être sélectionné pour une affaire déterminée. Au-delà de ces réformes qui concernent les textes et qui allègent grandement la procédure, il y a le fait que nous avons la chance d’avoir des collègues consciencieux du rôle qu’ils doivent jouer dans les affaires pour lesquelles ils sont saisis. Ce sont des affaires d’accusation assez graves et ils font preuve de célérité, mais dans un professionnalisme avoué. Le secret, c’est l’abnégation. |
Boucar Aliou Diallo