Les socialistes listent les maux de l’acte 3 et proposent une thérapie

Le Parti socialiste (Ps) a tenu hier la 4ème session thématique de son bureau politique. A cette occasion, Ousmane Tanor Dieng, secrétaire général dudit parti, et ses camarades ont procédé à une évaluation de la réforme de l’acte 3 de la décentralisation avant de formuler des recommandations qu’ils comptent déposer sur la table des autorités compétentes.
La 4ème session thématique du bureau politique du Parti socialiste (Ps) tenue hier à Dakar s’est intéressée à la réforme de l’acte 3 de la décentralisation. Selon Ousmane Tanor Dieng, secrétaire général du Ps, ‘’comme toute réforme, l’acte 3 doit faire l’objet d’une évaluation, exercice d’autant plus nécessaire qu’il permettra d’en identifier les insuffisances mais aussi d’en capitaliser les acquis’’. ‘’Même si le Code général des Collectivités locales n’est entré en vigueur que depuis une année, il est de bonne méthode d’évaluer son impact sur la vie de nos collectivités locales pour non seulement en corriger les faiblesses identifiées, mais pour envisager de nouvelles avancées dans l’approfondissement de notre système de décentralisation’’, a déclaré le maire de Nguéniène devant un parterre de responsables socialistes membres du Bp et des invités dont le Pr Ismaël Madior Fall.
Se gardant ainsi de ‘’rouvrir de vieilles polémiques’’ encore moins de verser dans des ‘’querelles byzantines’’, les socialistes se sont plutôt évertués à construire une réflexion collective pour, disent-ils, ‘’aboutir à des propositions utiles qui pourraient, le cas échéant, inspirer le gouvernement dans la préparation de la deuxième phase de l’Acte 3 de la décentralisation’’. Mais ils ne sont pas gênés, à travers leurs expériences personnelles, pour déterminer les failles de cette réforme qui empêchent sa bonne mise en œuvre. Selon Abdoulaye Wilane, porte-parole du Ps, ‘’une réforme de cette ampleur occasionne des désagréments et révèle des insuffisances à différents niveaux dont le cadre humain, institutionnel et réglementaire, le cadre technique et organisationnel et le cadre financier et comptable’’.
A l’en croire, ‘’le Code général des Collectivités locales n’a pas encore réglé les questions majeures du comment mettre en œuvre cette réforme‘’. En plus de cela, poursuit-il, ‘’les ressources humaines sont insuffisantes et ne disposent pas d’une qualification requise, encore moins de profil approprié pour la prise en charge des compétences transférées’’. Au même moment, ‘’la prise en charge du personnel technique pose problème du fait de l’inexistence d’un organigramme type validé et partagé par tous’’, estime Abdoulaye Wilane selon qui, ‘’il n’existe pas une fonction publique locale bien articulée avec des aires de mobilité et une prise en charge complète de toute la dimension sociale des travailleurs des collectivités locales’’. Pis encore, souligne-t-il, ‘’la répartition des rôles entre autorités déconcentrées et autorités administratives dans la gestion de la ville pose des problèmes de compréhension du fait de l’inexistence d’une Charte de la déconcentration’’.
Au niveau financier et comptable, le maire de Kaffrine note une nomenclature budgétisée dépassée par les pratiques du développement local, un cadre financier qui ne facilite guère la prise en charge de toutes les activités portées par les collectivités locales, une fiscalité et un transfert de plusieurs taxes encore détenus par l’Etat, et des comités régionaux des finances locales qui ne sont jamais opérationnels jusqu’ici. Pour toutes ces raisons, le maire socialiste pense qu’‘’il nous faut être imaginatif et aller vers des propositions audacieuses qui associent des dynamiques nouvelles et la consolidation des acquis’’. C’est pourquoi, dit-il, ‘’pour réussir l’acte 3 de la décentralisation, il faut passer inéluctablement par une réactualisation du cadre réglementaire, législatif de la décentralisation par une adaptation de notre politique de décentralisation avec les nouvelles pratiques du développement local, une adoption rapide du nouveau Code général des Collectivités dans sa partie réglementaire’’.
En même temps, poursuit le porte-parole du Ps, ‘’l’Etat doit mettre en place un organigramme type des Collectivités locales pour nous permettre de nous inscrire dans une approche de gestion prévisionnelle de nos effectifs et de leurs compétences’’. Dans l’immédiat, Abdoulaye Wilane pense que ‘’l’Etat doit se prononcer sur les incohérences territoriales avec la promotion des grands ensembles que sont les pôles territoires avec un statut juridique qui ne souffre d’aucune ambiguïté’’. ‘’Toute la quintessence de la réforme se trouve dans l’avènement des pôles de développement. Il nous faut reconstruire l’histoire sur la base d’une vision moderne qui transcende les clivages sectaires, élimine les barrières sociologiques et amorce le véritable développement’’, a-t-il soutenu.
Sur sa lancée, le maire de Kaffrine estime que ‘’pour assurer un équilibre entre les deux mamelles du développement local, l’Etat doit finaliser la Charte de la déconcentration avec une orientation très claire de l’utilisation des conventions types avec les services extérieurs de l’Etat, une prise en compte des Chefs de village et une claire définition des relations inter-acteurs du développement territorial qui adresseront les modalités de leur clarification pour une gouvernance rénovée’’.
Allant plus loin dans la réflexion, le Pr Gorgui Ciss pense lui, qu’il ne sert à rien d’avoir des régions en grand nombre mais qui ne peuvent rien apporter aux populations. Pour lui, ‘’il vaut mieux avoir un nombre réduit de régions qui soient en mesure de prendre en charge le développement local’’. A cet effet, dit-il, ‘’il va falloir aller inéluctablement vers la rationalisation des collectivités locales’’.
ASSANE MBAYE