La douloureuse marche vers l’indemnisation des victimes
En soutien aux victimes d’Hissène Habré, des organisations pour la défense des droits de l’homme ont tenu des discussions, hier, sur la question de leur indemnisation. Cette rencontre fait suite à l’accession de Macky Sall à la tête de l’Union Africaine (UA). Ainsi, le nouveau président de l’UA serait le saint à qui se vouer, pour rendre opérationnel le Fonds d’indemnisation des victimes. Qui peine à être effectif, depuis bientôt une décennie
Un regroupement de défenseurs des droits de l’homme a organisé, hier, une conférence de presse en faveur des victimes du régime de feu Hissène Habré, l’ancien président du Tchad. Il s’agissait, entre autres, d’Afrika Jom Center, d’Amnesty International, de la Ligue Sénégalaise des droits humains, de la Rencontre Africaine de Défense des Droits Humains (RADDHO), de l’Union des Forces Citoyennes (UFC).
Au menu des discussions, la question de l’indemnisation des victimes ou des membres de leurs familles. Elles sont au nombre de sept mille trois cent quatre-vingt-seize (7396). Toutefois, depuis 2016, elles attendent, mais rien n’est encore fait, selon les différentes explications. C’est la raison pour laquelle Me Assane Dioma Ndiaye, président de la Ligue Sénégalaise des droits humains (LSDH), laisse entendre que cette rencontre est juste un appel pressant adressé au président Macky Sall.
Mais, cette fois-ci, M. Sall est interpellé en tant que nouveau président de l’Union Africaine (UA). Pour les organisateurs, il est temps que l’UA réagisse, afin d’aider des familles qui souffrent, depuis si longtemps. À ce propos, Alla Dieng, président de l’Association des victimes de Hissène Habré, déclare : ‘’Nous sommes là pour discuter d’une problématique à caractère purement humanitaire. En effet, depuis dimanche, son Excellence Macky Sall est le président en exercice de l’Union Africaine, même si ça doit être formalisé en février 2022. Certainement, il aura à s’occuper des questions telles que la COVID-19, des vaccins, de la gestion des ressources naturelles du continent, de la démocratie, de la liberté, de la sécurité, des infrastructures… Cependant, les questions relatives à la justice, au respect des droits de l’homme et des peuples doivent figurer en bonne place dans son mandat’’.
Ainsi, il précise que depuis la fin du procès, le 30 mai 2016, jour de la condamnation à perpétuité d’Hissène Habré, ses milliers de victimes sont toujours dans l’attente. Des lenteurs ‘’inexplicables’’ sont notées quant au démarrage effectif du processus d’indemnisation. Les intervenants ont ainsi, fait savoir que des familles se sont disloquées, depuis lors à cause de ces dégâts. Qu’ils ont trop patienté, après avoir enduré et vécu des calvaires ‘’insoutenables’’, pour ceux qui sont encore vivants.
D’après lui, l’UA ne tient toujours pas ses promesses qui, aujourd’hui, sont vieilles de sept ans. ‘’L’Union Africaine avait décidé de la mise en place d’un fonds fiduciaire pour les victimes. Cela, depuis juin 2016 à Kigali (Rwanda). C’est ce qui a poussé les organisations citoyennes de défense et des droits humains, présentes aujourd’hui à notre rencontre, à rappeler au nouveau président de l’UA de prendre les choses en main, dès maintenant’’, explique M. Dieng
La question de l’indemnisation du Fonds fiduciaire
Maitre Assane Dioma Ndiaye de renchérir : ‘’Lors des campagnes électorales pour l’élection présidentielle de 2012, nous avions demandé au candidat Macky Sall s’il pouvait nous promettre que le procès serait organisé par le Sénégal. Sans hésiter, il nous a garanti de l’organisation une fois au pouvoir. Promesse qu’il a tenue, quand il est devenu chef de l’État. Le procès est tenu sous son magistère. Ça, c’était un premier rendez-vous avec l’histoire, qu’il a bien honoré. Maintenant, un deuxième rendez-vous pour lui, en tant que président de l’UA, c’est l’indemnisation des victimes ’’.
Cela veut dire que l’arrivée du président Macky Sall, à la tête de l’Union Africaine, doit permettre l’opérationnalisation du Fonds fiduciaire, adopté par l’UA en 2017. Elle lui a alloué 5 millions de dollars. Ainsi, c’est le Tchad qui abrite ce fonds. ‘’Récemment, une délégation d’experts de l’UA s’est rendue dans ce pays. On commence à mettre en place le Conseil d’administration du fonds. Au-delà des 5 millions de dollars mobilisés par l’UA pour l’alimenter, le reliquat du budget des Chambres Africaines lui a été reversé. Mais, malgré tout, les victimes attendent toujours l'opérationnalité de ce fonds. Et si le président Macky Sall prend fonction à ce moment précis où il est question de poser des actes concrets pour que ce fonds soit opérationnel, en ne dépendant bien sûr que de la volonté de l’Union Africaine, il est évident que c’est un second rendez-vous de M. Sall avec l’histoire’’, pense M. Ndiaye.
À son avis, l’opérationnalisation du Fonds fiduciaire serait une victoire pour le président Macky Sall, mais, surtout pour le Sénégal.
Amnesty International, par l’intermédiaire de son secrétaire exécutif est allé jusqu’à fixer un délai pour l’indemnisation des victimes. Seydi Gassama soutient que son organisation lance un appel solennel à M. Macky Sall, président de l’Union Africaine. Il souhaite ainsi, voir les victimes indemnisées avant décembre prochain, soit avant la fin de son mandat. ‘’Nous voulons que cette question de l’indemnisation ne soit plus à l’ordre du jour, d’ici le mois de décembre’’, avance-t-il.
EL HADJI FODÉ SARR (STAGIAIRE)