Publié le 7 Mar 2024 - 22:45
AMNISTIE

La loi passe sans difficulté

 

Malgré quelques défections, BBY et le PDS ont voté la loi d’amnistie. Taxawu, Pur et Guy Marius ont fait tout leur possible pour que la loi ne passe pas. Pour leur part, les députés de l’ex-Pastef ont voté contre.

 

Cette fois, les gendarmes ne sont pas entrés dans l’hémicycle. Malgré de fortes oppositions, la loi sur l’amnistie des infractions liées aux événements politiques entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024 a été adoptée sans grandes difficultés. Au total, sur les 165 députés que compte l’Assemblée nationale, 94 ont voté pour ; 49 contre et 3 se sont abstenus.  

L’attraction de la journée aura sans doute été la posture de l’ex-Pastef. D’habitude très virulent, le président du groupe parlementaire Yewwi Askan Wi a été très modéré. Après un long exposé sur les clivages qui accompagnent les lois d’amnistie dans tous les pays, il déclare : ‘’Cette loi, c’est l’initiative du président de la République. Je ne lui dirai pas non. C’est son plein droit, à moins que la loi soit revue.’’ Toutefois, a-t-il précisé, son parti a une réserve par rapport à la loi. C’est le sort des crimes de sang. ‘’Est-ce que ceux qui ont tué, ceux qui ont torturé sont concernés ? C’est cela notre problème par rapport à cette loi. Si vous éclairez notre lanterne sur cette question, nous allons la voter’’, a-t-il ajouté.

Aux détracteurs de l’ex-Pastef qui les accusent de ne pas voter pour des agendas électoraux, il rétorque : ‘’Ces victimes que vous prétendez aujourd’hui défendre, ce sont nos victimes. C’est nous qui nous sommes, tout le temps, occupés d’eux et de leurs familles ; c’est nous qui allons dans les prisons et les hôpitaux pour les prendre en charge. Ceux-là qui jouent aux indignés aujourd’hui ne se sont jamais souciés de leur sort.’’

Pour sa part, le président du groupe parlementaire de la majorité présidentielle, Abdou Mbow, a mis l’accent sur la nécessité de pardonner, de faire preuve de dépassement pour les besoins de la réconciliation nationale. ‘’Il faut qu’on se dise la vérité. En vérité, ce que ces gens ne veulent pas, c’est un retour d’Ousmane Sonko et de Karim Wade. S’ils participent, ils ne pourront avoir même pas 2 % de l’électorat. C’est pourquoi ils sont en train de s’agiter’’, a souligné le patron des députés de la majorité, invitant tout le monde à voter la loi.

Embouchant la même trompette, le député Seydou Diouf a estimé que tout le monde a été touché par ce qui s’est passé durant les événements politiques. ‘’Nous avons tous été meurtris lorsqu’il y a eu les événements de Yarakh. Nous avons tous été meurtris chaque fois qu’un jeune Sénégalais a été tué, quel que soit son âge. C’est ça la vérité. Il n’y a pas de ‘nous sommes plus meurtris que d’autres’. Nous l’avons tous été. Mais moi, je souhaite, au moment où le résident Macky Sall termine son mandat, au moment où il nous tend la main pour la réconciliation, seul gage pour aller vers les chemins du développement, nous pensons qu’il faut prendre cette main tendue’’, a souligné le Rufisquois. Il invite les uns et les autres à se départir des ‘’postures conjoncturelles liées à des échéances électorales. Regardons le Sénégal de demain. Nous avons tous été affectés ; nous sommes tous responsables’’.

Pour Guy Marius Sagna, ce dont il s’agit, ce n’est pas une ‘’loi d’amnistie’’, mais une ‘’loi d’amnésie’’. Selon lui, c’est faux de faire croire que ceux qui ne voteront pas sont contre Ousmane Sonko. ‘’Si la préoccupation de Macky Sall était la libération d’Ousmane Sonko et des autres détenus, il aurait suffi de donner des instructions au parquet pour un abandon des charges. Si sa volonté était de réhabiliter Ousmane Sonko, il aurait suffi de modifier l’article 57 du Code électoral. En réalité, cette loi, ce n’est ni pour Pastef, ni pour Sonko, ni pour le peuple, c’est pour le président Macky Sall et ses proches, les gens qu’il utilisait pour perpétrer ces crimes’’, a indiqué le leader de Frapp/France dégage, dont la position tranche d’avec celle nuancée de l’ex-Pastef.

À l’arrivée, malgré une position très passive lors des débats, les députés membres de l’ex-Pastef ont voté contre l’amnistie, à l’instar de leurs autres camarades de Yewwi Askan Wi et ex-camarades de Taxawu Sénégal.

Pour leur part, Benno Bokk Yaakaar a voté pour, malgré quelques abstentions et des absences. Ils ont pu compter sur l’appui des députés du Parti démocratique sénégalais dont certains membres du groupe ont voté contre la loi d’amnistie.

Les éclairages de la ministre de la Justice

Face aux interpellations des députés, la ministre de la Justice a tenté de défendre le projet de loi et de convaincre les uns et les autres à soutenir la volonté de réconciliation initiée par le chef de l’État.

Selon elle, tout le monde a la pleine conscience de ce qui s’est passé dans ce pays durant la période visée par le projet. Il s’agit de faire preuve d’un sens de pardon et de tourner la page. Aux représentants de l’ex-Pastef qui lui demandaient si les crimes de sang sont concernés, Aissata Tall Sall dira, après avoir précisé que le terme ‘’crime de sang’’ ne figure pas dans le Code pénal, que ‘’la loi prévoit que : sont amnistiés de plein droit tous les faits susceptibles de constituer des infractions criminelles ou correctionnelles, commis entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024, se rapportant à des manifestations ou ayant des motivations politiques, que leurs auteurs aient été jugés ou non’’. Pour elle, ‘’c’est clair, c’est net, c’est du français, on peut lire et comprendre. Toutes les infractions commises dans cette séquence temporelle et liées aux manifestations ou ayant des motivations politiques sont concernées’’.

Rappelant les atrocités commises lors de cette période, notamment le bus calciné de Yarakh avec la mort de deux petites filles, la tentative de meurtre sur un policier aux Parcelles-Assainies, la mort de l’étudiant Prosper C. Senghor, elle s’est dite consciente de la gravité du moment et a appelé les uns et les autres à pardonner. Après le constat, elle a invité les parlementaires à faire preuve de dépassement. ‘’Voter une loi d’amnistie n’a rien d’exceptionnel, c’est quelque chose qui fait partie de votre mandat, de votre devoir’’, a-t-elle justifié.

Pour Maitre Aissata Tall Sall, ce ne serait pas la première. De 1960 à nos jours, plusieurs lois d’amnistie ont été votées par l’Assemblée nationale.

 

Ci-après les dates phares des différentes lois d’amnistie adoptées depuis les indépendances

Le 18 octobre 1960. Le président a pris une ordonnance pour prononcer l’amnistie.

Le 24 janvier 1964 : Ce sont des députés qui ont voté une loi d’amnistie.

Il en fut de même : le 24 février 1967 ; le 19 mars 1976 ; le 6 mai 1981 ; le 4 juin 1988 ; le 10 juillet 1991 ; le 21 juillet 2004 et le 17 février 2005.

MOR AMAR

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