Deux experts soldent leurs comptes à la barre
Samba Mbaye, directeur du Centre de recherche pour le développement économique et social, Sarl (CRDES), a traîné en justice Mor Diokhané, directeur du cabinet AIDF. Le partage du gain reçu après l’exécution d’un marché de l’Organisation pour la mise en valeur du Fleuve Sénégal (OMVS) est à l’origine du litige opposant les deux experts associés.
‘’Les bons comptes font les bons amis’’. Samba Mbaye, patron du Centre de recherche pour le développement économique et social, Sarl (CRDES), reproche à Mor Diokhané, directeur du cabinet AIDF, de n’avoir pas fait sien cet adage. Ainsi, les deux hommes sont obligés de solder leurs comptes à la barre à cause d’une divergence sur la clé de répartition de l’argent gagné, à la suite d’un marché de l’Organisation pour la mise en valeur du Fleuve Sénégal (OMVS). L’organisation sous-régionale avait, le 3 juin 2016, lancé un appel d’offres dans le cadre de la collecte des données de l’évaluation d’impact du Programme de gestion intégrée des ressources en eau et de développement des usages multiples dans le bassin du fleuve Sénégal (Pgire1). A cet effet, le cabinet AIDF s’était associé avec les entreprises CSE et CRDES pour former un groupement solidaire. Celui-ci a gagné le marché estimé à 150 millions F CFA.
Etant donné que les contractants n’avaient pas encore reçu l’argent, le CRDES avait préfinancé toutes les dépenses effectuées pendant la mission de collecte des données estimées à 9 712 529 F CFA. M. Mbaye avait aussi versé la somme de 550 000 F CFA destinée aux avenants des superviseurs, soit un total de 10 262 529 F. Quant à Diokhané, il a préfinancé à hauteur de 6 millions. Ainsi tout allait bien jusqu’au moment où il fallait faire une clé de répartition du gain obtenu, mais également rembourser à M. Mbaye son argent. D’après lui, son co-associé reste lui devoir le reliquat de 1 million 232 mille 218 F CFA, car Diokhané ne lui a pas payé l’intégralité des impenses. Le plaignant lui reproche son refus de fournir à chaque membre du consortium un lot de 20 tablettes. ‘’En décembre, il n'avait pas le montant nécessaire pour démarrer les enquêtes. Donc, je lui ai proposé le préfinancement. Il devait me rembourser, mais Diokhane m'a fait courir. Un mois après, il m'a dit que si je rendais les tablettes, il me paierait, mais il m’a donné une partie, sous le prétexte que les justificatifs concernant les superviseurs étaient faux’’, a soutenu la partie civile hier, à la barre du tribunal correctionnel de Dakar.
Mais, la véritable cause de ce différend, c’est la manière dont le prévenu a partagé les 44 millions 969 mille 875 F CFA reçus dans le cadre de l’exécution du marché. La partie civile accuse le prévenu de n’avoir pas utilisé l’argent à bon escient, en faisant en quelque sorte le partage de ‘Bouki’ l’hyène (faire la part belle à soi-même). Car M. Diokhané déclare avoir retenu les 15 millions au titre de chef de file, 6 millions pour les frais de mise en place de caution d’avance de démarrage, 5 millions pour les frais de mainlevée, 12 millions d’honoraires et 6 millions en guise de solde. Le prévenu s’en est expliqué. ‘’J'ai appelé M. Mbaye et CSE pour les inviter à la sauce. Nous avons tous les deux préfinancé l'enquête. Pour la répartition, depuis le début, nous sommes dans un vide juridique, car la mission a démarré sans que le protocole d'exécution ne soit signé. Comme je suis le chef de file, j'ai proposé un taux de 10%, ils ont refusé, alors j'ai évalué mon effort réel à 20 millions’’, s’est défendu le prévenu tout en soutenant que les 44 millions représente le budget pour les enquêtes.
Ce que Samba Mbaye a réfuté. Il a été appuyé par son avocat Me Bocar Arfang Ndao qui souligne que le prévenu a reçu l’argent au titre de mandant et non pour son propre compte.
La défense parle d’affaire civile
Me Sy, un des conseils de Omar Diokhané, estime que la partie adverse ‘’s’est trompée de salle’’, puisqu’il s’agit d’une affaire purement civile, mais elle cherche à maquiller les faits en contrat de mandat. Pour lui, les contractants ont omis d'établir une clé de répartition. Il a demandé l’irrecevabilité de la constitution de partie civile de Samba Mbaye, vu qu’il ne peut rien réclamer pour CSE, car l’entreprise n’a aucun problème avec leur client. Quant à Me Abdou Dialy Kane, il est persuadé que si le parquet s’en est rapporté, c’est parce qu’il n'y a rien de pénal dans cette affaire, mais juste des parties qui ne sont pas tombées d'accord. Ce qui le conforte davantage, c’est le reliquat de 1,2 million réclamé. Or, il s’agit d’un prêt. ‘’C’est une procédure qui n’a ni tête ni queue, car le projet appartient à Diokhané qui a invité les autres’’, martèle-t-il, en indiquant que leur client garde encore les 44 millions en attendant qu’une entente soit trouvée. Abondant dans le même sens que ses confrères, Me Daniel Diagne a plaidé la relaxe. Délibéré le 13 mars prochain.
FATOU SY