Comment l'Etat et les huiliers ont réussi à sauver les meubles
L'affaire commençait à prendre des proportions assez dangereuses, avec des centaines de milliers de tonnes d'arachides dans les campagnes. Mais depuis la dernière réunion du Conseil des ministres, la machine est passée à la vitesse supérieure. Un accord a en effet a été signé entre l'Etat, les huiliers et autres acteurs impliqués dans le processus. Ce, au terme d'âpres discussions dans les locaux du Ministère de l'Economie et des Finances, durant la journée du 10 janvier 2014.
Les instructions du chef de l'Etat au gouvernement pour une solution rapide à la question de la commercialisation de l'arachide n'ont pas tardé à avoir un début d'exécution. Les dysfonctionnements notés dans la collecte de la graine cette année avaient amené Macky Sall à demander la mise en place d'une commission de réflexion et d'action, supervisée par le Premier ministre.
C'était au conseil des ministres de jeudi dernier. Cette commission a donc été érigée et a même donné naissance à un comité technique chargé de négocier avec les huiliers, jusque-là réticents à participer à la campagne. Qu'est ce qui a bien pu se passer pour que les Huiliers acceptent subitement de signer le protocole d'accord (voir fac similé) ?
Le prix du kilo arrêté à 200 francs
La question est d'autant plus pressante que les termes de l'accord ne prévoient pourtant pas de baisse du prix au producteur. ''Les huiliers se sont mis d'accord avec le gouvernement, pour d'une part acheter à 200 F Cfa au niveau de tous les points de collecte du Sénégal qui sont au nombre de 2 500. Deuxièmement, le gouvernement s'est engagé à soutenir les huiliers, sur la base d'un bilan de campagne qui va reposer sur un certain nombre de paramètres.
Ces paramètres sont le taux de change du dollar, puisque les prix des huiles brutes sont cotés en dollars, mais aussi la cotation des huiles brutes et des tourteaux sur les marchés internationaux, puis les frais de collecte primaire et les frais de trituration, enfin et surtout le taux de trituration de l'arachide'', a expliqué le conseiller technique au ministre de l'Agriculture et de l'Équipement rural, Youssou Diallo.
Le gouvernemnt n'a pas voulu donner tout de suite une subvention qui serait le différentiel entre le prix supposé être le prix réel par les huiliers et le prix de 200 F au niveau des points de collecte, mais a préféré mettre en place un système qui va agir ex-post, c'est-à-dire après la réalisation de la campagne, après un bilan de campagne.
50 milliards Cfa attendus dans les campagnes
Les huiliers que sont la SUNEOR, le Complexe agro industriel de Touba (CAIT) et COOPEOR vont désormais acheter au niveau des 2500 points de collecte du pays au prix de 200 francs. Concrètement, explique-t-on au niveau du ministère de l'Economie et des Finances, ce sont 50 milliards de francs Cfa qui vont être injectés au niveau du monde rural.
Ce qui va permettre aux paysans qui avaient commencé à brader leurs récoltes dans les ''loumas'' et autres circuits de souffler. ''Nous demandons à l'ensemble des paysans de ne pas brader leurs graines au niveau des loumas, à des prix inférieurs à 200 F et d'aller au niveau des points de collecte. Nous demandons surtout à certains opérateurs privés stockeurs (OPS) qui ont fait de la spéculation au niveau de certains loumas de cesser ces pratiques'', a averti M. Diallo.
Quid des garanties ? ''Dès lors que l'accord est signé avec les huiliers, cela ne pose plus de problème. Parce que les banques financent essentiellement les huiliers et ces derniers, pour être financés, doivent avoir la garantie de l'Etat''. C'est dire que la garantie de l'Etat a été décisive. Et les services du Ministère de l'Economie et des Finances ont dû monter au créneau pour que la crise soit dépassée.
Il faudra désormais suivre comment ces solutions vont être déclinées sur le terrain. En tout cas, le fait que le Président Sall ait insisté pour qu'une solution soit rapidement trouvée, a beaucoup mis la pression sur les acteurs. Ce dernier a en effet déclaré qu'il ne peut pas comprendre que malgré une hausse substantielle du budget de l'Agriculture, qui a atteint en 2013 le seuil de 67 milliards de francs Cfa, que de tels problèmes puissent se signaler.