Arrestations, boycott et paralysie du système scolaire

Un climat de vive tension secoue le lycée Jules Sagna de Thiès depuis ce jeudi matin, après l’arrestation d’une quinzaine d’élèves soupçonnés d’être impliqués dans une fuite de l’épreuve d’histoire-géographie. En guise de protestation, leurs camarades ont massivement boycotté les compositions en cours, entraînant une paralysie quasi totale des enseignements, non seulement dans leur établissement, mais également dans plusieurs autres lycées de la ville.
Tout est parti de la découverte présumée de fuites concernant l’épreuve d’histoire-géographie, prévue en début de semaine. Des soupçons jugés sérieux ont conduit à l’interpellation de 15 élèves du lycée Jules Sagna, suspectés d’avoir eu accès à l’épreuve avant sa tenue officielle. Une enquête a été immédiatement ouverte et les élèves ont été placés en garde à vue au commissariat du 1er arrondissement de Thiès.
Cette série d’arrestations a déclenché une vague de colère dans l’établissement. Principalement issus des classes de seconde, les élèves ont refusé de poursuivre les compositions, dénonçant une "stigmatisation collective" et une "injustice". Drapeaux rouges à la main et sifflets à la bouche, ils ont investi les cours de récréation et bloqué l’accès aux salles d’examen.
La protestation s’est rapidement étendue à d’autres établissements de la ville. Des groupes d’élèves en colère se sont rendus dans différents lycées pour y interrompre les cours et appeler à la solidarité. Plusieurs établissements ont vu leurs activités pédagogiques suspendues, parfois de manière brutale.
Face à l’ampleur de la mobilisation, les forces de l’ordre ont été déployées pour contenir la situation. Si des attroupements ont été dispersés aux abords de certains lycées, aucune violence majeure n’a été signalée jusqu’à présent.
Face à une crise qui suscite à la fois indignation et inquiétude dans la ville, l’inspecteur d’académie de Thiès, Gana Sène, a rompu le silence hier. En marge d’un point de situation, il a exprimé son inquiétude, tout en appelant à l’apaisement. ‘’Je l’ai dit : la place de l’enfant n’est pas la prison’’, a-t-il dit. Tout en reconnaissant la gravité des faits, il a tenu à rappeler la nécessité de traiter ces jeunes avec discernement : ‘’Si, pour des raisons de comportement, des enfants sont arrêtés, cela nous fait tous mal.’’
Monsieur Sène a également rassuré l’opinion sur les efforts entrepris par l’inspection académique : ‘’Nous avons tout fait hier, jusqu’à 23 h, pour voir la meilleure issue pour ces enfants, a-t-il confié.’’
Toutefois, il a rappelé les limites de son champ d’intervention : ‘’Je ne suis pas procureur de la République, encore moins commandant de brigade. Laissons les autorités compétentes faire leur travail.’’
Des mesures d’accompagnement ont cependant été activées, notamment avec l’AEMO (Action éducative en milieu ouvert), pour assurer un suivi psychologique et juridique des élèves en garde à vue.
L’inspecteur d’académie a lancé un appel à la retenue à l’endroit des élèves, alors que la mobilisation ne faiblit pas. Plusieurs d’entre eux annoncent déjà une grève générale si leurs camarades ne sont pas libérés dans les plus brefs délais. Cette crise met en lumière la fragilité du système éducatif face aux questions de fraude, mais aussi la nécessité d’un accompagnement humain et pédagogique dans le traitement de telles situations.
Le lycée Jules Sagna, épicentre de la tempête, attend désormais les conclusions de l’enquête qui détermineront la suite des événements.
Par Ndeye Diallo (Thiès)