L'Amnesty liste les crimes et exige des châtiments
Au moment où Me Ousmane Ngom était cueilli par la Brigade d'intervention polyvalente (BIP), Amnesty Sénégal égrenait la liste des citoyens fauchés par l'appareil répressif d'Abdoulaye Wade. Aujourd'hui comme hier, l'organisation de protection des droits de l'Homme juge incontournables les poursuites judiciaires contre les donneurs d'ordres et les exécutants. Mamadou Diop, Abdoulaye Wade Yinghou, Mamadou Sy, Mara Diagne, Mamadou Ndiaye, El Hadji Thiam, Bana Ndiaye et Fodé Ndiaye. Autant de noms de victimes des bavures policières qui meublent le règne macabre du régime d'Abdoulaye Wade pendant douze ans. Des atrocités qui, jusqu'ici, sont restées impunies malgré les exigences de justice réclamées par les familles. C'est en substance ce qui ressort du rapport d'Amnesty international sur les violations des droits humains durant le règne libéral et rendu public hier à Dakar, en présence des parents des victimes regroupés dans un collectif. Présentant le rapport, le directeur d'Amnesty International pour le Sénégal explique dans le détail que la répression policière contre les manifestations préélectorales a causé 7 morts dus à l'usage excessif de la violence par les forces de l'ordre. À en croire Seydi Gassama, de nombreux jeunes, arrêtés durant ces manifestations, ont été torturés par les policiers. Surtout les jeunes de Colobane qui ont été raflés après la mort du jeune policier Fodé Ndiaye. Sur ce dossier, note Gassama, «la police était dans une logique de vengeance en torturant ces jeunes».
Amnesty enfonce Ousmane Ngom
Le rapport d'Amnesty dénonce également les atteintes à la liberté d'expression et de manifestation lors de la précédente élection présidentielle. L'ex-ministre de l'Intérieur Ousmane Ngom, qui est depuis hier aux mains de la justice, avait sorti un arrêté pour interdire toute manifestation aux candidats et aux citoyens sénégalais alors engagés contre la candidature d'Abdoulaye Wade pour un troisième mandat. La répression qui s'en est suivie a fait beaucoup de victimes, rappelle Seydi Gassama. Sur ce dossier aussi, l'impunité perdure, s'est-il désolé. Le document d'une trentaine de page relève par ailleurs les cas de personnes décédées dans les commissariats de police au Sénégal à cause de mauvais traitements, mais également le conflit casamançais, sans oublier l'affaire Habré.
Au chapitre des recommandations formulées pour mettre un frein à l'impunité, Amnesty Sénégal préconise en lieu et place des audits que les vingt plaintes déposées par les parents des victimes soient activées. Certes, reconnaît Seydi Gassama, des ordres de poursuite ont été délivrés pour certains cas, mais pour beaucoup d'autres, tout reste à faire. C'est pourquoi Amnesty International appelle ainsi les ministres de l'Intérieur et des Forces armées à délivrer ces ordres de poursuite «très rapidement». Ces initiatives doivent expressément concerner les «politiques» et autres personnes ayant été impliqués dans la commission de ces violences contre des citoyens. En l'occurrence, Amnesty soutient que Me Ousmane Ngom et le commissaire Harona Sy doivent faire l'objet d’enquête et, au besoin, de poursuites judiciaires.
ASSANE MBAYE