Un TAS de questionnements et d'inquiétudes

Thierno Alassane Sall s'inquiète de l'augmentation rapide de la dette du pays, de savoir où va cet argent et du manque de clarté autour de ces opérations. Des chiffres officiels montrent que le Sénégal emprunte de plus en plus sur les marchés financiers de la région, ce qui pourrait rendre les finances du pays plus fragiles, selon le président de la République des valeurs.
Selon les données officielles avancées par Thierno Alassane Sall, le gouvernement a réalisé 70 émissions de titres de créance sur le marché obligataire de l'UEMOA, entre mai 2024 et mai 2025. Cela a permis de récolter une somme énorme : 1 694 milliards de francs CFA. Selon le député, cet argent a été obtenu grâce à deux types d'emprunts : des bons assimilables du Trésor (BAT), qui sont des emprunts à court terme, et des obligations assimilables du Trésor (OAT), qui sont des emprunts à moyen et long terme. Monsieur Sall conclut que le fait que les OAT aient été utilisées 39 fois contre 31 pour les BAT laisse penser que le gouvernement s'endette surtout pour payer ses dépenses quotidiennes, plutôt que pour financer de grands projets importants pour l'avenir du pays.
Le parlementaire, pour étayer sa thèse, souligne que l'année 2025 montre une accélération de l'endettement. “En seulement cinq mois (de janvier à mai), le gouvernement a déjà effectué 35 emprunts, autant que pendant les huit mois précédents de 2024. Les montants récoltés sur cette courte période de 2025 atteignent déjà 960 milliards de francs CFA, dépassant les 734 milliards de francs CFA de toute l'année 2024”. Il fait savoir que rien qu'en mai 2025, un montant record de 499,9 milliards de francs CFA a été levé.
Le député a mis en avant un manque de transparence flagrant sur l'utilisation de ces fonds. Malgré les sommes colossales empruntées, ni les citoyens ni les représentants du peuple ne savent exactement à quoi cet argent a servi. Pour preuve, “le fait que les rapports sur l'exécution du budget des derniers mois de 2024 et des premiers mois de 2025 n'aient pas été publiés crée un climat d'opacité, ce qui va à l'encontre des règles de bonne gestion”. De plus, assure-t-il, ces emprunts se font souvent avec des taux d'intérêt élevés et des durées de remboursement courtes.
Cette situation, à ses yeux, augmente le risque pour le Sénégal de devoir contracter des prêts rapidement et rend le budget du pays plus fragile à moyen terme, d'autant plus que l'endettement public est déjà très inquiétant.
Cheikh Diba interpellé
Face à ces observations, le député interpelle directement le ministre des Finances et du Budget. Il demande des réponses claires aux questions relatives, tout d'abord, à la nature de la dette. "Quel est le montant actuel de la dette publique du Sénégal, pour les dettes à l'intérieur du pays comme celles envers l'étranger, depuis le 1er janvier 2024 ? Comment cette dette est-elle répartie par type d'emprunt et par créancier ? Combien d'emprunts ont été réalisés sur les marchés financiers pendant cette période ? Quelles sont leurs caractéristiques (montants, taux d'intérêt, durées de remboursement et qui sont les principaux prêteurs) ?".
Monsieur Sall voudrait aussi savoir “pourquoi le gouvernement a-t-il choisi d'emprunter de manière répétée avec des taux d'intérêt élevés et des durées courtes, alors que des financements avec de meilleures conditions semblent exister ? À quoi ont servi concrètement les sommes empruntées ? Ont-elles financé des projets qui rapportent ou ont-elles servi à couvrir des dépenses courantes du budget ou à rembourser d'anciennes dettes ?”.
Le député invite le gouvernement à mettre en place des mesures susceptibles de “freiner l'augmentation de la dette et s'assurer qu'elle soit supportable sur le long terme.” En outre, il souhaite que “les documents budgétaires, comme les rapports trimestriels, soient publiés régulièrement, complètement et à temps”.
MAMADOU DIOP