Les avocats sont divisés sur le délibéré de l’affaire Khalifa
Le tribunal correctionnel de Dakar doit vider, aujourd’hui, l’affaire de la caisse d’avance. Compte tenu du mouvement de grève de 48 heures décrété par le Syndicat des travailleurs de la justice (Syjust), certains avocats souhaiteraient une prorogation du délibéré. Pour d’autres, il est temps que Khalifa Sall et ses co-prévenus puissent être édifiés sur leur sort, après plus d’un an de détention préventive.
C’est aujourd’hui que le tribunal correctionnel de Dakar rend son délibéré, dans l’affaire Khalifa Sall. A moins qu’un greffier ne soit réquisitionné, l’audience se tiendra avec un greffier ad hoc. Car le Syndicat des travailleurs de la justice (Sytjust) observe, depuis hier, un mouvement de grève de 48 heures.
Face à cette situation, certains avocats plaident pour que le délibéré soit prorogé, même si, par ailleurs, il n’y a rien d’illégal à ce que la décision soit rendue en présence d’un greffier professionnel ou d’un greffier ad hoc.
Même s’il n’est plus constitué dans le dossier, Me Baba Diop préconise un renvoi. Pour lui, il vaut mieux proroger le délibéré à mardi ou en huitaine, pour éviter ultérieurement des problèmes administratifs, étant donné que le greffier ad hoc a juste une mission temporaire. Or, poursuit Me Diop, ‘’le greffier professionnel, c’est lui qui diligente le procès et après, il délivre la décision et, en cas d’appel, il diligente tout. Il peut refuser de le faire, s’il n’a pas assisté au prononcé du délibéré et cela peut créer des dysfonctionnements’’. Toutefois, pour éviter ces difficultés, la robe noire souligne que le tribunal peut réquisitionner un greffier.
Un de ses confrères, qui a préféré garder l’anonymat, souligne que la réquisition doit se faire qu’en cas d’urgence absolue. Or, tel n’est pas le cas en l’espèce, selon Me Baboucar Cissé. Pour lui, il n’y a aucune urgence, dans la mesure où les juridictions ont plusieurs fois prorogé des délibérés. Un argument partagé par Me Mamadou Guèye Mbow qui considère qu’il n’y a pas lieu de se précipiter.
C’est pourquoi, Me Baba Diop estime que l’idéal n’est pas de tenir l’audience, ce matin, pour ne pas violer le droit de grève. Il s’y ajoute qu’il considère qu’au regard des rapports entre magistrats et greffiers, la courtoisie voudrait que les juges soient beaucoup plus coopératifs, en laissant la grève faire son effet. Sans quoi, l’Etat ne résoudra jamais les revendications du Sytjust.
‘’Je ne suis pas partie civile et c’est la liberté qui m’intéresse’’
Contrairement à ses confrères, Me Abdou Dialy Kane reste persuadé que la grève ne peut pas empêcher à la juridiction de rendre son verdict. A son avis, ce serait un déni de justice que des personnes qui attendent leur jugement soient déçues du fait de la grève. Il pense également que la réquisition d’un greffier ad hoc n’aura aucune influence sur la décision qui sera rendue. Parce que, argue-t-il, ‘’généralement, avant de rendre le délibéré, les juges ont déjà rédigé la décision’’. Prenant le contre-pied de ses confrères, Me Kane relève une certaine confusion. ‘’Dans cette affaire, c’est différent d’une audience qui se tient au moment de la grève, car lorsque l’affaire a été plaidée, il y avait un greffier du tribunal’’, explique-t-il. Avant d’asséner que le tribunal ne peut pas prétexter de la grève pour proroger le délibéré, alors que des personnes innocentes sont en prison.
‘’Quel que soit le greffier qui sera à l’audience, cela me laisse pantois, car je ne suis pas partie civile et c’est la liberté qui m’intéresse’’, fulmine pour sa part Me Khassimou Touré.
FATOU SY