Les étudiants tendent la sébile
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Depuis le 20 novembre, les repreneurs des restaurants de l’Université de Thiès ont retourné les marmites pour une dette de plus d’un milliard F Cfa. Laissés à eux-mêmes, les étudiants ont investi certaines maisons et même la gare routière pour tendre la main, afin de manger.
Au milieu de la foule noire de colère, un étudiant tient un bol. Tantôt, il tape dessus pour alerter les Thiessois qui suivent le déroulement de la marche. Tantôt de la main, il fait un signe indiquant la faim qui les guette dans le ‘’temple du savoir’’. Puis, il esquisse des pas de danse rythmés par une chanson. ‘’Être étudiant, c’est compliqué, nous avons faim’’ ! De l’intersection de la route de l’Université de Thiès au monument du chemin de fer, en passant par l’avenue Caen, les étudiants ont étalé toute leur colère, dans la diplomatie, à travers certaines rues de la capitale du Rail.
A l’origine de ce mouvement d’humeur, l’absence d’œuvres sociales. En effet, depuis le 20 novembre dernier, les 5 000 étudiants de l’Université de Thiès ont vu les portes des restaurants fermés, les quatre campus sociaux également (Ensa, Ecole polytechnique, Hôtel du rail...). Depuis lors, les pensionnaires de l’UT se prennent totalement en charge pour leur restauration. Principale cause, une dette estimée à 1 milliard 500 millions de F Cfa que l’État doit aux repreneurs.
‘’Porte-monnaie vide’’, les étudiants ont décidé, avant-hier, au terme d’un point de presse, d’investir les maisons et certains lieux publics pour trouver quoi se mettre sous la dent. De quoi exaspérer Serigne Mansour Diène et ses camarades. ‘’Hier (mercredi), les étudiants étaient obligés de quémander pour manger. Alors que sa vocation n’est pas de tendre la main. Ils sont sortis pour solliciter de l’aide auprès des personnes de bonne volonté. Mais, cela ne suffit pas. On ne peut restaurer 5 000 étudiants en se basant uniquement sur l’aumône. Ce n’est pas possible’’, s’insurge-t-il.
Tout en réitérant leur volonté d’étudier, ils ont rappelé à l’opinion qu’il est difficile de suivre convenablement les cours quand on n’a pas mangé. ‘’On ne peut pas atteindre l’excellence, si on a faim’’, fait remarquer Serigne Mansour Diène. Jugeant le dénouement de la situation incertaine, le président de la Conférence des présidents d’amicales des étudiants de l’Université de Thiès estime que le combat ne doit pas être seulement celui des étudiants. ‘’Ce pays, avec toute la société civile qui s’y trouve, devrait avoir honte de ce qui se passe à l’Université de Thiès. Aujourd’hui, on devrait être dans les amphis pour étudier. Mais, nous voilà dans les rues en train de marcher, parce qu’on ne peut pas allier faim et études. Ce que nous vivons est pitoyable’’, s’insurge-t-il.
L’ultimatum, le dernier mot
A l’Université de Thiès, la dette contractée par l’État auprès des repreneurs a laissé un vent de désolation. ‘’Nous avons décidé de marcher pour revendiquer notre droit le plus absolu : le droit à la restauration. Vous imaginez des étudiants qui restent des jours sans manger ? Dans cette affaire, le Centre régional des œuvres universitaires de Thiès est autant responsable que l’État. Celui-ci doit payer les repreneurs’’, martèle le président de la Conférence des présidents d’amicale de l’Université de Thiès. Pour trouver une solution, une rencontre a été annoncée entre le ministre de l’Enseignement supérieur, Mary Teuw Niane, et les gérants des restaurants. Seulement, révèle Mansour Diène, la réunion a avorté. Un échec qui met les étudiants dans tous leurs états.
Par ailleurs, M. Dieng indique que ses camarades et lui n’excluent pas d’intensifier la lutte, si rien n’est fait dans les prochains jours. ‘’A l’heure où nous marchons à travers les rues de Thiès, les autorités devraient être en train de négocier afin de trouver une solution à notre principale revendication. Nous donnons un ultimatum à l’État. Si ce problème n’est pas réglé d’ici lundi, notre lutte prendra une autre tournure’’. Les étudiants disent avoir opté, dans un premier temps, pour une marche pacifique, parce qu’ils veulent que tout se fasse dans la diplomatie. Mais, préviennent-ils, ça ne saurait perdurer. ‘‘L’heure est grave. Si le problème ne se règle pas dans les meilleurs délais, que l’État endosse toutes les responsabilités, parce que nous sommes prêts à tout. Ceci est notre dernier mot.’’
GAUSTIN DIATTA (THIES)