‘’Le marché africain doit impérativement se baser sur des outils digitaux’’C
Aujourd’hui, le marché africain doit ‘’impérativement’’ se baser sur des outils digitaux, avec l’opérationnalisation de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). C’est ce qu’a soutenu, ce week-end, l’administrateur de Gaïndé 2000 et spécialiste du digital, Ibrahima Nour Eddine Diagne, qui estime que ce sont ces questions qui vont pouvoir accélérer la mise en œuvre réelle de ce marché unique africain.
La question avec l’opérationnalisation de la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) qui est effective depuis le 1er janvier dernier, c’est de voir comment quitter cette volonté politique matérialisée pour aller réellement à l’échelle continentale vers le libre-échange. Et, à ce niveau-là, l’administrateur de Gaïndé 2000 soutient que le digital doit jouer un rôle fondamental.
‘’D’abord, sur les règles d’origine, parce que ce qui fait le marché africain, c’est les règles d’origine. C’est-à-dire tout ce qui est origine africaine et circulant sur le territoire africain. La question, c’est comment définir cette origine africaine et comment certifier cette origine des produits d’un pays à l’autre. Sur cela, nous avions travaillé, dès 2014 ou 2015, sur le certificat d’origine dématérialisé avec une signature électronique. C’était à l’échelle de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) que nous avions porté ce projet’’, indique Ibrahima Nour Eddine Diagne.
D’après le spécialiste du digital, ils étaient bien avancés sur le sujet et ils avaient réussi à faire des opérations entre le Sénégal et la Côte d’Ivoire. Par la suite, cela n’a pas tenu et la tradition a repris son cours. ‘’Aujourd’hui, le marché africain doit impérativement se baser sur des outils digitaux. Il s’agit des guichets uniques, des signatures digitales, les certificats dématérialisés, etc. Ce sont ces questions qui vont pouvoir accélérer la mise en œuvre réelle de ce marché unique africain. Si on reste encore sur des papiers, avec des cachets et des signatures, ce sera encore un rêve de trop. On n’arrive sans doute pas aux résultats escomptés avec la Zlecaf’’, préconise-t-il.
Cependant, d’après l’administrateur de Gaïndé 2000, le digital doit être porté par des Africains, au lieu d’attendre des financements de la Chine ou de l’Union européenne pour le faire. ‘’Nous avons les compétences. Cela ne demande pas beaucoup de moyens financiers. Il faut qu’on commence à avoir cette culture africaine. Il ne peut pas attendre le financement d’autres puissances alors qu’il y va de notre intérêt, de nos économies et de nos entreprises. Il faut vraiment aller dans ce sens. (…) L’Afrique doit inventer son champion de e-commerce. Parce que si l’Afrique ne le fait pas, les champions des autres continents viendront capturer la valeur ajoutée en Afrique. Les plateformes qui vont venir de plus en plus s’intéresser à l’Afrique, lorsque nous leur ouvrirons nos portes, nous fermerons en même l’avenir de nos futurs champions africains’’, souligne M. Diagne.
Or, il signale que s’il n’y a pas de champion, les pays africains ne pourront pas exister économiquement et faire exister leur jeunesse et leurs entrepreneurs. ‘’Si, dans 20 ans, nous n’avons pas des capacités à créer des entreprises et des emplois, c’est nous qui allons être enfermés dans un cercle infernal où nous dépendrons de l’aide multilatérale ou bilatérale pour pouvoir survivre. Alors qu’on a les moyens de par nos compétences, nos économies de construire des valeurs ajoutées qui peuvent nous mettre dans un confort dans les années qui viennent. C’est un vrai défi, stratégique, etc. Et chaque année perdue sans construction stratégique est une année qui ne se rattrape pas. C’est vraiment le moment de porter le débat économique sur ces questions-là’’, prévient le spécialiste des Tic.
Aujourd’hui, Ibrahima Nour Eddine Diagne relève qu’il est établi que le digital au sens large et le commerce électronique pris en particulier, sont des véhicules de valeur qui vont de moins en moins avoir un impact. Plus on prend du retard, plus les constructions qui vont se faire par ailleurs vont capitaliser cette valeur qui est normalement destinée aux acteurs économiques locaux. Il y a un enjeu de vitesse qu’il faut aujourd’hui avoir : c’est celui de transversalité et de cohérence. ‘’Un pays comme le Sénégal investit beaucoup dans l’entreprenariat. Il y a beaucoup de partenaires au développement qui viennent nous appuyer dans cet exercice. Mais nous souffrons d’une forme de désarticulation de ces efforts. Ce sont des dimensions qui doivent avoir une prise en charge au plus haut niveau. Le ministère du Commerce a cette volonté de faire cette construction. Mais c’est un ministère sectoriel. Alors que le e-commerce, c’est l’affaire de tous. Il touche l’agriculture, l’artisanat, l’économie, l’assurance, les banques, etc. Tout cela fait que c’est assez difficile, si jamais il n’y a pas cette politique d’ensemble de cette prestation afin de créer cette valeur ajoutée’’, soutient-il.
Par rapport à la dématérialisation des procédures administratives, l’administrateur de Gaïndé 2000 a indiqué qu’il faut se réinventer tous les 5 ou 6 ans. ‘’Parce que nous sommes dans un secteur qui bouge. Les besoins bougent, les méthodologies changent, les exigences, les satisfactions des personnes sont assez mouvantes. Nous sommes dans ce schéma et nous y sommes en partenariat avec la Der pour le financement de l’entreprenariat. Nous sommes vraiment un acteur ouvert sur tous les partenaires qui permettent de construire des valeurs ajoutées supplémentaires. Notre ancrage, c’est des opérations import-export qui sont liées aux opérations douanières’’, fait-il savoir.
Il faut noter que l’administrateur de Gaïndé 2000, Ibrahima Nour Eddine Diagne, était l’invité, ce samedi, de l’émission en ligne ‘’Comprendre l’économie’’.
MARIAMA DIEME