Les acteurs interpellent l’Etat
Célébrant la Journée mondiale de la pêche ce week-end à Joal, les acteurs des organisations de pêche de cette commune ont profité de l’occasion pour s’insurger contre la politique de la pêche de l’Etat du Sénégal.
Les acteurs de la pêche de Joal ont célébré la Journée mondiale de la pêche dans l’amertume. Elle a été commémorée sous le thème ’’L'émigration clandestine n'est pas une option : pour régénérer nos ressources, sauvons nos vies’’. Occasion saisie par le monde de la pêche de Joal pour s’offusquer de la gestion nébuleuse de la pêche au Sénégal. Ils accusent l’Etat d’avoir vendu les ressources halieutiques du pays à un prix qu’ils peuvent eux-mêmes payer pour protéger le poisson.
‘’Nous ne pouvons pas comprendre que l'État continue à signer des accords de pêche au moment même où le ministre soutient que les ressources sont surexploitées. D’où d’ailleurs la création d’aires marines protégées, de récifs artificiels et de CLPA installés pour la régénération de la ressource. Au même moment, ce même État signe des licences. C'est contradictoire avec la politique de pêche du Sénégal. On ne peut pas vendre ce qui est insuffisant pour les pêcheurs’’, s’est lamenté le président de la Plateforme des pêcheurs artisanaux du Sénégal (Papas). ‘’Peu importe le prix auquel l'Etat a vendu nos côtes, s'il nous l'avait demandé, on aurait pu payer le prix qu'il souhaite afin qu'il nous laisse nos côtes. Tout notre espoir réside dans la mer. Si l'État veut nous aider, il doit revoir sa politique de pêche, au lieu de vendre nos côtes. C'est répugnant de célébrer la Journée mondiale de la pêche à Dakar en grande pompe, sachant que c'est vous-même qui avez vendu nos côtes’’, s’est insurgé Abdou Karim Sall.
L’Union européenne en a également pris pour son grade. Monsieur Sall trouve qu’il est contradictoire qu’elle s’accapare les ressources halieutiques du Sénégal et qu’en retour, refoule les émigrants qui n’ont plus de ressources à exploiter chez eux à cause de la surexploitation des eaux sénégalaises, même s’il ne soutient pas les candidats à cette aventure périlleuse. De ce point de vue, ils ne voient plus la pertinence de telles licences dont ils exigent la suspension pure et simple.
‘’Nous invitons l'État à geler la délivrance des licences de pêche à l'Union européenne, à faire adhérer le Sénégal à la Fithi, à protéger le métier des femmes transformatrices, à geler les exploitations d'usine de farine de poisson, à interdire l'utilisation de poisson frais pour ravitailler les usines de farine de poisson, entre autres’’, a demandé le président des aires marines protégées de l'Afrique de l'Ouest qui estime que sur 718 km de côtes, avec 21 000 pirogues et 120 bateaux de pêche, la ressource au Sénégal ne suffit même plus pour ses propres pêcheurs.
Dans cette même dynamique, les organisations de la pêche demandent à l'État du Sénégal d'identifier et de mettre en œuvre des mesures durables, afin de permettre la restauration des ressources et la réhabilitation des habitats critiques.
IDRISSA AMINATA NIANG (mbour)