Publié le 5 Aug 2014 - 19:04
L’INCOMPETENCE DE LA CREI SOULEVEE

Les juges au banc des accusés

 

La bataille de procédures se poursuit, dans le procès de Karim Wade ouverte jeudi dernier. Pour la seconde journée du procès de Karim Wade, les juges étaient au banc des accusés.

 

Karim Wade et ses coïnculpés devront encore prendre leur mal en patience, avant de pouvoir s’expliquer sur les faits d’enrichissement et de complicité qui leur sont reprochés. La bataille sur la forme se poursuit. Après les exceptions d’irrecevabilité, hier, c’était au tour des exceptions d’incompétence soulevées par la défense. Ainsi le président Henry Grégoire Diop et ses quatre assesseurs se sont retrouvés au banc des accusés.

La défense juge incompétente la Cour et estime que c’est la Haute cour de justice (HCJ) qui est habilitée à juger les prévenus. Aux yeux de Me Jean-René Farthouat, la CREI est incompétente pour juger Karim Wade, du fait de son statut d’ancien ministre de la République. ‘’Le ministère public avait la possibilité de saisir une juridiction compétente, mais elle vous a saisie’’, a renchéri Me Ciré Clédor Ly. Avant de poursuivre : ‘’de par l’exposé des motifs de la loi sur la CREI, il y a tous les éléments pour saisir la HCJ’’.

L’affaire des Chantiers de Thiès comme argument de défense

Pour appuyer son argumentaire, Me Ly a convoqué l’affaire des Chantiers de Thiès dans laquelle, l’ancien Premier-ministre Idrissa Seck a été poursuivi pour détournement de deniers publics, avant de bénéficier d’un non-lieu. ‘’Idrissa Seck a été poursuivi avec Salif Bâ pour des infractions de droit commun, sans leur qualité respectif de Premier-ministre et de directeur, mais ils ont été traduits devant la HCJ’’, a rappelé l’avocat, tout en soulignant que cela devrait inspirer la Cour.

Mieux, pour l’avocat libéral, il y a ‘’une double incompétence’’. Premièrement, la première fonction de Karim Wade a été conseiller, en 2003. Deuxièmement, le fils de l’ex-président a occupé différents postes ministériels de 2003 à 2012. ‘’Vous ne pouvez pas juger un ministre, même pas pour un simple délit de diffamation’’, a souligné l’ancien Garde des Sceaux, avant d’asséner à la Cour : ‘’vous êtes radicalement incompétente, en vertu de l’article 101 alinéa de la Constitution’’. Ledit article dit : ‘’Le Premier Ministre et les autres membres du Gouvernement sont pénalement responsables des actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions et qualifiés crimes ou délits au moment où ils ont été commis. Ils sont jugés par la Haute Cour de Justice’’.

‘’Traquenard judiciaire’’

C’est pourquoi, dira Me Madické Niang : ‘’revenez  à la Constitution, vous aurez permis au droit d’être dit de la manière la plus belle’’. Son confrère Me Ousmane Sèye de renchérir : ‘’débarrassez-vous de ce dossier et donnez-le à une juridiction compétente’’. Les conseils des présumés complices se sont engouffrés dans cette brèche ouverte par les avocats de Karim Wade pour soulever à leur tour l’incompétence de la Cour. Pis, selon Me Papa Leyti Ndiaye, un des conseils de Bibo Bourgi, au-delà d’être incompétente, la Cour est ‘’inexistante légalement’’.  ‘’Si une loi reste inactive pendant 26 ans, 30 ans, elle tombe dans la désuétude’’, a argué la robe noire, selon qui la loi a été abrogée. Il s’y a ajoute, a-t-il poursuivi, que la CREI ne fait plus partie des juridictions.

Pour finir, Me Ndiaye a attaqué la procédure, pour juger illégale la seconde mise en demeure servie à son client par le truchement de Karim Wade. ‘’La procédure aurait dû être clôturée depuis le 14 octobre 2013. Donc, elle est nulle, car la Cour n’a pas été saisie dans les délais de deux mois’’, a encore martelé l’avocat, en soulignant au passage que Karim Wade et Cie sont victimes ‘’d’un véritable traquenard judiciaire’’. ‘’La seconde inculpation est une supercherie’’, a avancé Me Ndiaye. Comme excédé par la longueur des débats, Me Abdou Dialy Kane, conseil de Pierre Agboba de lancer : « Pourquoi ce débat ? On doit débattre sur quelque chose d’obscur, mais tout est limpide dans cette affaire. »

Le parquet spécial s’érige en bouclier

La réplique du parquet ne s’est pas fait attendre. Mais avant d’apporter des réponses à la défense, le parquet a demandé à celle-ci de soulever une fois pour toutes ses exceptions. ‘’Elle peut présenter 1 000 exceptions, mais qu’elle ne les présente pas une à une pour faire du dilatoire’’, a soutenu le Procureur spécial dont les propos ont fini par irriter certains avocats comme Me Alioune Badara Cissé. "Ce n'est pas la période où vous étiez en train de faire des réquisitions aux gendarmes. Vous n'êtes ni la Cour, ni la barre", a rétorqué l’avocat. Au moment où le parquetier demandait à la Cour d’intervenir, Me Borso Pouye d'emboucher la même trompette : "Vous ne pouvez nous empêcher de formuler des exceptions. Si cela doit prendre trois mois, nous le ferons".

La défense accusée de confondre ‘’prescription’’ et ‘’compétence’’

Même s’ils n’ont pas obtenu ce qu’ils voulaient, les parquetiers n’ont pas fait dans la dentelle pour répondre à la défense, mais aussi démonter les arguments relatifs au privilège de juridiction brandis. Prenant la parole en premier, Antoine Félix Diome a relevé des ‘’confusions’’ et contradictions dans le camp de la défense.  ‘’Vous ne cessez de dire que la CREI est incompétente et qu’elle n’existe pas. Mais Pourquoi faire des recours et obtenir des décisions devant une juridiction que vous ne reconnaissez pas ?’’ s’est interrogé l’adjoint du PS.

Avant d’ajouter : ‘’Que faites-vous du parallélisme des formes ? Car si vous dites qu’une loi est abrogée, il doit y avoir une autre loi’’. Au-delà de ces ‘’incohérences’’, le parquetier a déploré une certaine confusion de la défense entre ‘’compétence et prescription’’. Selon lui, la plupart des questions soulevées relève plutôt de la prescription. A sa suite, le procureur spécial a rétorqué aux conseils de Karim Wade que leur client est bel et bien devant la CREI. ‘’C’est faux de dire qu’il n’avait pas de fonction jusqu’en 2003, car il a avoué sur le PV qu’il a été ministre-conseiller à partir de 2002’’, a asséné Alioune Ndao.

Avant de lancer à la défense du fils de l’ex-président : ‘’Pourquoi voulez-vous que les 12 années soient étendues au privilège de juridiction, en tant que ministre ? Que faites-vous alors de ces années passées par Karim Wade en tant que conseiller spécial du chef de l’Etat et de responsable de l’ANOCI ?’’ Sur sa lancée, le PS a écarté la jurisprudence Idrissa Seck, tout en rappelant que l’ancien PM n’a jamais été poursuivi pour enrichissement illicite.

‘’Tous les chefs d’inculpation sont disponibles. Le délit d’enrichissement illicite n’a été évoqué aucunement’’, a insisté Alioune Ndao. Par rapport aux accusations sur la seconde inculpation, il a répondu : ‘’ Il n’y a pas de triche et on n’a jamais comploté avec la CREI. C’est après avoir demandé à la commission rogatoire d’enquêter à Monaco que nous avons découvert qu’il  y a beaucoup de milliards’’. Les débats se poursuivent aujourd’hui…

FATOU SY

 

 

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