La traque ne faiblit pas

Très attendu sur les questions de liberté et de l'indépendance de la justice, le nouveau s'est montré intraitable sur certains cas de délits d'opinion. On lui reproche une restriction des libertés individuelles.
À son arrivée à la présidence e la République, nombreux étaient ceux qui espéraient une rupture avec la politique judiciaire de l’ancien régime par rapport au traitement des délits d'opinion. Mais les événements survenus depuis la prise de pouvoir de Diomaye Faye ont nuancé cette perception. En effet, il a été enregistré une série de poursuites pour ces types d'infraction (diffusion de fausses nouvelles, diffamation, offense au chef de l'État ou au Premier ministre...), comme on l'avait noté sous le régime du président Macky Sall.
Parmi les cibles de ces poursuites, il y a surtout des responsables de l'ancien régime, des activistes présentés comme étant contre le régime actuel ou même parfois des journalistes. En ce qui concerne les responsables politiques poursuivis et parfois condamnés pour des chefs comme la diffusion de fausses nouvelles, diffamations, injures ou offense au chef de l'État, il y a le cas de Moustapha Diakhaté condamné à deux mois ferme de prison pour des propos jugés injurieux à l'endroit de certaines catégories de la population (militants et sympathisants de Pastef). Son camarade de parti et ancien ministre conseiller de Macky Sall, Oumar Sow, a eu plus de chance, puisqu'il s'en est sorti avec une peine assortie du sursis. Monsieur Sow était poursuivi, à la suite d’un post sur sa page Facebook dénonçant un ostracisme du régime contre les Peuls. Des propos jugés ethnicistes.
Par ailleurs, d’autres affaires ont attiré l’attention durant la première année du président Diomaye. Parmi les plus médiatisées, il y a eu le cas des chroniqueurs et activistes hostiles au pouvoir, notamment Bah Diakhaté, Abdou Nguer, Abdou Diallo et le plus récent celui d’Ardo Gningue.
Impliqué dans des procédures judiciaires liées à des propos injurieux, son affaire a alimenté les débats sur les limites de la liberté d’expression au Sénégal. Avant lui, Bah Diakhaté et imam Ndao ont été condamnés à trois mois de prison pour diffusion de fausses nouvelles. Une décision qui avait ravivé les discussions sur la répression des propos jugés offensants à l’égard du pouvoir.
Interdictions de sortie du territoire
À côté des détracteurs du régime poursuivis pour des délits d'opinion, il y a les interdictions de sortie du territoire qui pose également de sérieux problèmes de respect des libertés. La dernière en date est celle concernant Mansour Faye bloqué à l'aéroport alors qu'officiellement, aucune ouverture de poursuite ne lui a été notifiée. Avant lui, l'homme d'affaires et ancien directeur d'une société nationale a eu à regretter ces interdictions de sortie du territoire. Dans une moindre mesure, on note les procédures devant le Pool judiciaire financier avec les craintes d'instrumentalisation que cela soulève.
Mais sur ce point, il faut noter que jusque-là, il n'y a pas de griefs objectifs à déplorer.
La Cybercriminalité sortie de l'ombre
Les journalistes ne sont pas non plus épargnés par la poursuite de ces pratiques. Ils sont même les plus exposés, compte tenu de la nature de leur profession. L'on se rappelle l'interpellation des journalistes Mohamed Guèye et Pape Moussa Traoré, respectivement directeurs de publication du “ Quotidien” et de “La tribune”, pour diffamation et diffusion de fausses nouvelles. Heureusement pour eux, la justice a pour ces cas été bien plus flexible en classant leurs dossiers sans suite.
Adama Gaye a été moins chanceux. Il a été interpellé, placé en garde à vue et jugé, avant de bénéficier d'une relaxe. Il s'était, lui, prononcé sur la mort de l’ancien ministre des Finances Moustapha Ba, en tenant presque les mêmes propos que ceux tenus récemment par le ministre porte-parole du gouvernement.
Pour rappel, sous le régime de Macky Sall, la chronique a souvent fait état de ce genre de dossier politico-judiciaire. Au chapitre des délits d'opinion, on note surtout les affaires Pape Allé Niang, Pape Ndiaye de Walf, Bassirou Diomaye Faye, Ousmane Sonko pour les plus emblématiques.
Au chapitre des poursuites pour des affaires financières, on se rappelle surtout les dossiers Khalifa Sall, Karim Wade, entre autres, qui avaient fini d'impacter gravement la réputation de l'institution judiciaire auprès de certaines catégories de la population. Sans parler de toutes ces centaines de détenus envoyés en prison juste pour des propos tenus sur les réseaux sociaux ou dans les médias.
Si, à l'époque, on parlait plus de la Sureté urbaine, de la Dic et de la Section de recherches, aujourd'hui, c'est plus la Cybercriminalité qui est mise en avant.
MAGUETTE NDAO