A propos des débats télévisés
Tout le long de chaque semaine que Dieu fait, ou à chaque quinzaine par mois, des débats sont organisés dans des Chaînes de télévision avec, autour du plateau, un, deux ou plusieurs invités.
Les sujets abordés varient selon l’actualité et sont souvent d’ordre politique, sociologique, religieux, culturel, éducatif, économique ou sanitaire etc.
Débats télévisés et motivations :
Au regard de la vocation de service public et de pôles de développement de ces Chaînes de télévision, nous pensons que leurs Directeurs concoctent dans leurs programmes ces Débats, d’abord pour des raisons professionnelles pour se faire une place dans l’espace médiatique audiovisuel pour la renforcer et s’y maintenir, ensuite, pour vendre leurs produits pour des gains en termes de rentabilité, de promotion de la Chaîne, de popularité et enfin, pour meubler le temps d’antenne alloué à la Chaîne.
Les Animateurs ou Modérateurs, qu’ils soient hommes ou femmes, chevronnés et dont le professionnalisme n’est pas mis en doute, rivalisent de culture, de savoirs, de savoir-faire et d’habilité, dans la conduite des discussions, faisant preuve, à chaque fois, de beaucoup de tact et de présence d’esprit, le savoir–être aidant.
Rendement, inutilité et difficultés :
Le problème qui se pose, est de savoir maintenant, si ces Débats ont un rendement réel ou, tout bonnement, ne servent absolument à rien.
Dans tous les cas, leurs Animateurs espèrent toujours amener les intervenants à des objectifs de rendement et d’utilité publique, pour aider à corriger, réorienter, parfaire et promouvoir une politique gouvernementale du régime en place, à des fins de développement social, économique, sanitaire etc., bref, à avoir une bonne vision d’un développement harmonisé et équilibré de la Nation, grâce à des suggestions et critiques objectives et constructives, sans parti-pris.
Mais malheureusement, ce à quoi nous assistons la plupart du temps, c’est à des discussions de politique politicienne, partisanes, inutiles et stériles qui tirent en longueur et répétitives, où chaque participant tire la couverture de son coté, discussions qui donnent lieu souvent, à de chaudes empoignades verbales quand celles-ci ne tournent pas à un manque d’égards, avec des propos colériques, incommodants, malvenus et indésirables dans un débats civilisé entre intellectuels appelés à de la retenue.
A une question d’un compagnon qui lui demandait de lui faire une recommandation, le Prophète Mohammad (SAW) lui répondit « Ne te mets pas en colère » Trois fois de suite, à la demande du compagnon, de la même recommandation, trois fois de suite, le Prophète donna la même réponse. Les téléspectateurs attendent des débatteurs mieux qu’une crise hystérique, une première difficulté du genre, dans ce type de débats, un manque de maîtrise de soi, en se donnant en spectacle.
Nous avons encore en mémoire, une image fraîche d’un certain débat télévisé qui a inspiré et motivé cette Contribution. Les Animateurs sont alors appelés à faire des rappels à l’ordre à ces participants surexcités et des mises au point, quand certains parmi les invités, sortent du cadre des discussions. Pour chaque émission, un thème est retenu et autour duquel gravitent ces débats.
Dans la démarche cartésienne, on devrait aboutir à une conclusion pour tirer la morale et les enseignements du thème débattu, utiles à quelque chose. C’est la seconde difficulté liée à la synthèse d’une pluralité d’opinions aussi divergentes que variées et où les protagonistes restent figés dans leurs positions respectives.
Les téléspectateurs sont laissés à leur faim par ce que rien n’est précis et que tout reste dans le flou et le décousu. Comme on le constate assez fréquemment, la fin de l’émission en queue de poisson, une brillante illustration du désaccord, oblige l’animateur à mettre un terme aux débats en interrompant tout le monde et l’émission télévisée s’en arrête là, le temps imparti épuisé, oblige.
Rares sont les débats qui se terminent dans la bonne humeur, mais ils mettent toujours, de côté, les enseignements à tirer, laissés à l’initiative du téléspectateur. Dans ce cas, il y aura autant de conclusions que de téléspectateurs puisque chacun y va de son point de vue qui sera peut – être, différent de la conclusion qui, si elle était amenée par une démarche cartésienne, serait dégagée dans la logique d’une synthèse. Ces débats sont ceux où beaucoup de participants ont été invités.
Par contre, les débats avec un seul invité sur le plateau, revêtent un cachet particulier. Ils font plutôt, la promotion de l’invité que l’animateur présente d’abord en faisant appel à son curriculum vitae et à son expertise professionnelle avant d’en venir au thème qu’il lui propose. Ces débats concourent plus à la popularité et à la célébrité de l’invité qu’à ses avis qui se diluent dans les commentaires, s’estompent dans les esprits et finissent dans l’oubli.
Une troisième dimension de ces débats télévisés, propres à un culte de la personnalité et qui s’écarte de beaucoup, de la vocation et de la mission de service et d’utilité publique d’une télévision. Je reste sceptique sur le rendement et l’impact des contributions de tels débats dans le développement économique et social du pays quant à leur prise en charge par le pouvoir en place par ce que, tant que cela n’est pas fait, c’est un travail de Sisyphe ou le tonneau des Danaïdes c'est-à-dire un travail inutile.
Alors quelles attitudes prendre ?
Que faire maintenant ? Changer de stratégie, dans une nouvelle démarche de la conduite des débats avec un ou plusieurs invités ? Continuer à garder le statu quo des discussions avec ce même goût d’inachevé ? Ou se faire violence pour aboutir à des recommandations pertinentes, applicables au sortir de ces débats pour avoir le sentiment du devoir accompli.
La balle est dans le camp des Directeurs de Chaînes de télévision, disposés, je le suppose, à recevoir de leurs téléspectateurs, des suggestions constructives et objectives, pour aller dans le sens d’une amélioration des débats télévisés.
L’objectif de cette Contribution aura été, non seulement de déceler des difficultés à ces Débats mais aussi de susciter un autre débat autour de ceux-ci, de leur rendement ou de leur inutilité même si, malgré tout, ils seraient conservés pour meubler le temps d’antenne par opportunisme programmatique et par nécessité professionnelle, dans l’espace médiatique et pour emboiter le pas à ce qui se fait ailleurs, en Afrique et dans le monde, dans d’autres Chaînes, actualité oblige.
Kaolack, le 20 Janvier 2014
Mamadou Moustapha THIAM, Inspecteur Adjoint
de l’Enseignement à la retraite à Kaolack