Publié le 9 Mar 2021 - 22:27
MANIFESTATIONS SUR L’ETENDUE DU TERRITOIRE

Les évêques du Sénégal dénoncent l’encrage de la violence

 

Les évêques de la Province ecclésiastique de Dakar ont lancé, hier, un appel au calme et demandent à tous d’arrêter les dégâts pendant qu’il en est encore temps, dans un message qui interpelle la conscience nationale.

 

‘’Pendant qu’il en est encore temps, efforçons-nous alors de limiter les dégâts, et même de les arrêter’’. Ce sont les propos des évêques du Sénégal. Ils demandent à toute la population et aux autorités sénégalaises d’arrêter l’engrenage de la violence. ‘’Nous le pouvons et nous le devons, non seulement en défendant nos droits, mais aussi en assumant nos devoirs, pour asseoir les conditions idoines d’un meilleur vivre ensemble. Privilégions le dialogue qui n’est possible que dans un climat de paix et de sérénité’’, conseillent les religieux.

Dans un communiqué parvenu hier à ‘’EnQuête’’, ils exhortent tous et chacun à faire cause commune, pour sauver notre nation. Tous, disent-ils, gouvernement, forces de défense et de sécurité, manifestants, acteurs et partis politiques, chefs religieux, société civile, parents, simples citoyens.  ‘’C’est possible, et nous le devons au Créateur, auquel nous croyons, qui attend de nous tous un engagement sincère et vrai, en vue du bien de tous. Nous le devons aussi aux jeunes générations qui attendent de leurs aînés d’hériter des idéaux de vérité, de droiture, de justice, d’entente et de paix, comme un précieux patrimoine reçu de nos ancêtres’’, soutiennent-ils.

Par ailleurs, ils se sont inclinés, ‘’avec douleur et contrition’’, devant la mémoire des victimes de la crise que vit le pays. ‘’Des vies humaines ont été arrachées à l’affection des leurs, par suite du déchaînement d’une violence aveugle. Des blessés graves vont porter les séquelles de notre violence durant le restant de leur vie. Des biens publics et privés, fruits d’un patrimoine acquis par le travail, ont été saccagés, pillés, volés, en dehors de toute considération morale, éthique, défiant toute justice, rendant encore plus précaire la situation de nombreux travailleurs et de leurs familles. Membres d’une même communauté, dans un pays qui s’honore pourtant d’être celui de la ‘Teranga’. Il nous faudra du temps, pour guérir des nombreux traumatismes subis ces jours-ci’’, regrettent-ils.

‘’La vérité fera de vous des hommes libres’’ (Jn 8,32)

Citant un verset biblique, ils précisent à tous les Sénégalais et hôtes de notre pays, que ‘’la vérité fera de vous des hommes libres’’ (Jn 8,32). Selon eux, ce sont ces paroles de Jésus, dans l’Évangile de Saint Jean, qui leurs viennent à l’esprit, à la lecture des événements qui secouent la vie de notre pays, le Sénégal, depuis quelques jours.

C’est pourquoi, soutiennent les évêques, après avoir suivi, non sans inquiétude, ces événements, ils ont estimé qu’il est de leur devoir, dans l’exercice de la responsabilité pastorale qui est la leur, de prendre la parole pour exhorter tous les compatriotes, à tous les niveaux, à faire preuve de raison, de sagesse et de civisme dans l’intérêt supérieur de la nation.

‘’Comme vous pouvez le deviner, notre prise de parole de ce jour a été précédée par la prière. Puisque nous assumons aussi une mission d’intercession auprès de Dieu pour son peuple dont nous sommes pleinement solidaires. Nous continuons à prier, pour que le Seigneur, le Tout-Puissant, protège notre pays et tous ses habitants. Pour qu’il apaise les cœurs et éclaire les esprits.  Qu’il inspire nos paroles, nos faits et gestes, afin que ce que nous disons et faisons contribue à la gloire de Dieu, à la paix et à notre sauvegarde’’.

De l’avis des évêques, comme pasteurs de son peuple, Dieu les appelle aussi à assumer leurs responsabilités morales et spirituelles dans la vie de la nation. Or, soulignent-ils, les événements graves qui secouent actuellement le pays, dans le contexte de pandémie de la Covid-19, ont montré comment on peut basculer dans une violence aveugle, susceptible de menacer la cohésion sociale. Si on se laisse dominer par les passions et les intérêts personnels.

‘’La tentation de la violence se tapit en chacun de nous. Elle peut prendre différentes formes : de la violence verbale qui embrase et attise le feu, à la violence physique qui blesse et tue, jusqu’à la violence immorale qui dévie les intelligences et manipule les consciences’’. C’est ainsi qu’à la suite d’un fait social dont la presse a rendu compte, à travers divers organes, le pays est entré dans une spirale de violences qui, selon les religieux, témoigne d’une crise profonde au sein de la société sénégalaise.  

‘’Mais cette crise n’est-elle pas un miroir de ce qui se tapit ou de ce qui sommeille en nous ? Ne nous appelle-t-elle pas alors à mesurer nos responsabilités et à nous ressaisir ? Ne nous interpelle-t-elle pas  tous, et à tous les niveaux, du sommet de l’État au citoyen, en passant par toutes les institutions étatiques, les structures économiques, sociales, culturelles, religieuses, au nom du respect de la vie humaine et du bien commun ?’’, se demandent-ils.

VIVIANE DIATTA

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