Ici repose Essamay
De l’aéroport de Ziguinchor au cimetière mixte de la capitale méridionale, en passant par la maison familiale au quartier Korentas puis aux Hlm Boudody où il avait élu domicile, les populations casamançaises ont rendu un vibrant hommage à leur fils, Jules François Bertrand Bocandé.
Il est 8 heures à Ziguinchor, mais on se croirait à midi. Les principales rues de la capitale sont jonchées d’élèves, de jeunes, de femmes, et de vieux. Un arc-en-ciel de mains fraternelles pour non pleurer leurs fils, père, neveu ou encore «Mame Bocandé», mais plutôt pour le célébrer, pour le fêter. A l’école Moussa Barry, près du rond-point Amadou Belal Ly du nom d’un gouverneur que Ziguinchor a adopté, des écoliers portent des pancartes sur lesquelles il est inscrit, entres autres : «Tonton Jules, la Casamance ne t’oubliera jamais, adieu», «Mame Jules, repose en paix» ou encore «au revoir Essamay». De l’autre côté de l’aéroport, c’est une foule immense qui s’est massée jusqu’aux confins du Lycée Djinabo. Et dans le salon d’honneur, des responsables politiques, administratifs, coutumiers, religieux, des amis et compagnons de Jules, des parents, le monde du football… Des «salamalecs» par-ci, des retrouvailles par-là, l’on bavarde en sourdine, un petit sourire, un visage triste, un sanglot et puis le vrombissement du moteur d’un Fokker de l’armée. Il est 09 heures 20 minutes. Le ciel, relativement nuageux à l’aurore, a fini de jeter ses flèches de chaleur sur le tarmac de l’aéroport et un peu partout en Casamance. Certainement pour ne pas rater «l’événement». Mieux, pour attester de sa reconnaissance et de sa gratitude à «Essamay».
Santhiaba, la dernière demeure
L’appareil, doucement et sûrement, pose ses petites roues. A l’intérieur, la dépouille du «héros», du «champion», du «patriote». Minutieusement, les militaires de la Cofuair font sortir la caisse dans laquelle dort le «lion». Les visages se renferment, un sanglot brise le silence, une tape d’encouragement par-là et la chorale des supporters du comité «allez Casa» entonne «Bocandé Essamay» puis «Oli Casa». Toutes des chansons tirés du répertoire des supporters et fans de «Fanfo», comme familièrement l’appellent ses amis d’enfance. Discours, recueillement et prières rythment cette première étape des obsèques de Jules François Bertrand Bocandé à Ziguinchor. Non loin de l’aéroport, la foule immense en provenance de tous les coins et recoins de la Casamance est impatiente. Une attente vite brisée par un mouvement soudain qui s’est dégagé du salon d’honneur. Il est 10 heures 20 minutes à Ziguinchor. Le soleil a fini d’étaler ses rayons sur la Casamance. C’est le début de la procession. Le cortège funèbre s’ébranle. A un pas de l’aéroport, le quartier Biagui 01 où le jeune Bocandé et compagnons squattaient souvent à la recherche de fruits. Puis le stade Néma, lieu mythique où «Boc» a fait ses premiers grands pas dans le football avec le Casa Sports sous la direction d’un certain Bocar Diouf, proviseur du Lycée Djinabo. Direction, la rue Insa Ndiaye. Là même, où l’ancien capitaine des «Lions» a grandi après avoir, avec sa maman, quitté le quartier Korentas, en centre-ville. Le cortège arrive chez la demeure familiale du défunt. Un arrêt de quelques minutes avant que le quartier Boudody accueille, enfin, son «guerrier» de retour d’un combat mortel. Dans l’après-midi, Jules François Bertrand Bocandé a eu droit à une célébration eucharistique digne d’un «fils de Dieu» à la Cathédrale Saint Antoine de Padou de Ziguinchor, là même où il a été baptisé avant que sa dernière demeure au cimetière mixte de Santhiaba ne l’accueille pour un repos éternel. Adieu champion !
HUBERT SAGNA
(Correspondant, Ziguinchor)