Publié le 6 Nov 2012 - 14:36
PROCÈS LUC NICOLAÏ

Me Baboucar Cissé, ''J’ai des révélations à faire'

 

 

Le combat ficelé depuis le 31 octobre dernier et opposant le promoteur des grands évènements à Bertrand Touly a été une nouvelle fois reporté. Ainsi, Luc Nicolaï, Abdou Khadre Kébé, Pape Massiré Guèye Thiam, Djibril Diop et Mamadou Lamine Mbaye seront finalement jugés par le tribunal spécial de Thiès, le 12 prochain.

 

Le monde de la lutte s’est encore déplacé hier au tribunal régional de Thiès pour assister au combat spécial mettant aux prises Luc Nicolaï, Abdou Khadre Kébé et Pape Massiré Guèye Thiam, ainsi que les deux employés de l’hôtel Lamantin Beach, Djibrine Diop et Mamadou Lamine Mbaye, d’une part et Bertrand Touly, président directeur général dudit hôtel, d’autre part. Malgré 8 tours d’horloge, le combat s’est limité à un round d’observation, appelé communément ‘’lewto’’ dans le monde de l’arène. Le public a été tenu en haleine pendant des heures par une trentaine d’avocats dans une bataille de procédure. En effet, des exceptions ont été soulevées de part et d’autre. Pour départir les parties, le juge Abdourahmane Diallo et ses deux assesseurs ont mis l’affaire en délibéré pour le lundi 12 octobre 2012.

 

Luc Nicolaï avec une mine renfrognée

Luc Nicolaï et Cie ainsi que la partie civile, Bertrand Touly, sont arrivés à 9h 20mn. Le promoteur mbourois était habillé de la même tenue que la fois dernière. Un boubou Basin Djezner blanc assorti de fil doré. Toutefois, il affichait une mine différente de celle de sa première comparution. Exit du sourire, c’est avec une mine renfrognée que Luc Nicolaï a vécu l'audience, surtout lorsque son regard a croisé celui d'Erick Philibert. Tenant son menton dans sa main gauche, le promoteur paraissait énervé et n'a cessé de secouer la tête, en levant les yeux au ciel. Quant à Bertrand Touly, installé derrière ses adversaires, il est resté impassible jusqu’au début du procès, à 10h 45mn. Cependant, cela a vite tourné en une bataille de procédure. Toutefois, avant ces joutes, les avocats ont pris la température autour de la question du renvoi. En effet, après l’isolement des témoins dont seuls trois étaient absents, sur les 21 cités, les conseils de Bertrand Touly ont demandé un renvoi du procès.

 

Un second renvoi évité de justesse

Me Ciré Clédor Ly, le premier à formuler la demande, voulait faire comparaître trois autres témoins du Lamantin Beach. ‘’Estimez-vous nécessaire la présence de ces témoins ?’’, lui a demandé le juge. Répondant par l’affirmative, Me Ly a argué que l’audition de ces derniers pouvait éclairer l’affaire. D’autant que ceux-ci, a-t-il dit, étaient présents au moment de l’opération. À sa suite, son confrère Me René Lopy appuyait le renvoi en estimant que leur client n’avait pas été convoqué, mais plutôt extrait. ‘’Me Bertrand Touly croyait qu’il allait au tribunal pour être entendu par le juge d’instruction’’, a lancé le conseil. Alors que son confrère Me Moussa Félix Sow a laissé entendre qu’ils avaient besoin de mieux préparer leur défense.

 

‘’C’est une demande purement dilatoire’’, a contre-attaqué le substitut du procureur Cheikhna Hann. ‘’Les avocats de la partie civile se sont constitués avant même l’arrestation de Bertrand Touly. (…) Ils ont tous la copie du procès-verbal et ils viennent chaque jour à la maison d’arrêt et de correction de Thiès’’, révélera-t-il. Et de railler les conseils de Bertrand Touly : ‘’Qu’ils ne viennent pas nous dire qu’ils veulent s’imprégner. Car même ma grand-mère qui est au fin fond du Fouta est au courant de cette affaire.’’ S’inscrivant dans la logique du Parquet, l'avocat de Luc Nicolaï, Me Mouhamadou Bamba Cissé, lancera à ses confrères : ‘’Il faut dire que vous n’êtes pas prêts.’’ Son collègue Me Baboucar Cissé qui, dans un premier temps, a laissé entendre qu’il ‘’préférait économiser ses salives‘’ a fini par se lasser de la longueur des débats. ‘’ Ayons le courage de plaider cette affaire’’, martèlera-t-il. Aussi le tribunal les a-t-il suivis. Un renvoi évité de justesse et qui a arraché un sourire au public venu massivement soutenir le promoteur.

 

Ensuite, le juge a notifié les préventions aux prévenus. Tout ceci dans un wolof mélangé de français. Ne comprenant pas le wolof, Bertrand Touly a sollicité un interprète par l’intermédiaire de ses conseils. Une demande satisfaite par le tribunal. A la fin de l’identification des prévenus, les sept avocats des douaniers ont soulevé des exceptions. Ils ont demandé au tribunal de se déclarer incompétent, arguant que leurs clients sont des paramilitaires et de ce fait, doivent être jugés uniquement devant un tribunal militaire, surtout que les faits ont été commis dans l’exercice de leur fonction. D’autre part, Me Omar Faty et ses confrères ont estimé que la procédure est nulle, puisque les douaniers n’ont pas été poursuivis sur la base d’un ordre de poursuite. Assez pour que les avocats de Luc Nicolaï estiment que leur client doit bénéficier du même sort.

suite et fin

‘’Vos arguments ne dépassent même pas la gare routière de Thiès’’

Face à ces arguments, le substitut Cheikhna Hann a violemment réagi. Versant toujours dans l'ironie, il assénera : ‘’Vos arguments ne tiennent pas la route. Ils n’ont pas quitté la gare routière’’. Ce qui n'a pas eu l'heur de plaire aux avocats qui ont trouvé ces propos déplacés et lui ont demandé de les retirer. S'étant exécuté, le juge a toutefois maintenu sa position. Puisque, selon lui, il s’agit d’infractions de droit commun.

Alors que l’on croyait la bataille de procédure finie, les avocats de la partie civile ont enclenché une seconde manche. Considérant qu’il y a une connexion entre ce dossier et l’affaire Bertrand Touly, pendant devant le juge d’instruction, Me Ciré Clédor Ly et ses confrères ont estimé que l’affaire doit passer en instruction et non en flagrants délits. ‘’Les faits n’ont rien à voir avec le trafic de drogue, étant donné que ce sont seulement 50g de cocaïne qui ont été saisis par les douaniers, car les autres boulets étaient mélangés à de la farine’’, rétorquera le substitut Cheikhna Hann. Tout comme la défense, il a estimé que l'exception est irrecevable.

 

 ''J’ai des révélations à faire''

Le Parquer s’est également opposé à la constitution de l’agent judiciaire de l’État aux côtés des douaniers. Sur ce point, le juge a eu la même position que les conseils de Bertrand Touly. Ceux-ci ont jugé irrégulière cette constitution, alors que les avocats de Luc Nicolaï l’avaient approuvée. Dans cette bataille procédurale qui n'en finissait pas, Me Baboucar Cissé, impatient, finira par lancer avec dépit : ‘’Qu’on le veuille ou non, ils ont obtenu le renvoi. Ils ont amené notre brillant confrère Me Ciré Clédor Ly qui a étalé toute sa connaissance en droit national, droit international et même de la Cour de La Haye. Mais moi je suis pressé d’aller au fond, car j’ai des révélations à faire.’’

En fin de compte, le procès a été renvoyé, puisque le juge s'est donné une semaine pour statuer sur toutes les exceptions soulevées. La suite du procès dépend de la décision qui sera rendue par le tribunal. Le fond sera-t-il abordé ? Réponse lundi prochain, 12 novembre.

 

NDÈYE FATOU NIANG ( Thiès)

 

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