Menteur compulsif
Âgé de tout juste 30 ans, Ibrahima Guèye était entendu, hier, dans le cadre du procès inaugural de cette première session d’Assises de l’année, pour homicide sur la personne de son ami Oumar Camara.
Les faits ont eu lieu en 2006. Ibrahima, encore très jeune, n’en était pas moins un déviant notoire : il consommait alcool, drogue et cigarette. Par deux fois, il avait déjà été arrêté par les forces de police pour une affaire de trafic de chanvre indien (il fut vite relâché) et un vol.
Un caractère marginal et belliqueux dont peut attester sa propre mère, Anta Diagne. Dans son témoignage, recueilli par le juge d’instruction, elle a déclaré que son fils Omar était pour elle une source d’inquiétude constante. Ne s’arrêtant pas là, cette mère peinée avait même confié au magistrat que pour payer les multiples consultations de marabout entreprises pour le soigner, elle avait eu à vendre tous ses effets de valeur. En vain.
Si les déclarations de la dame sont dignes de foi, il n’en va pas de même de celles de l’accusé. De la bouche d’Ibrahima Guèye, la cour n’a rien pu en tirer et pour cause : il ment comme il respire.
L'accusé a d’abord été coincé sur une simple question de chiffres. Les informations données sur son âge, en l’occurrence celui où il a commencé à fréquenter l’école coranique et celui où il est devenu apprenti dans un garage, ne rimaient pas du tout.
L’avocat général, lui-même, a signifié à Ibrahima Guèye que si l’on suivait son raisonnement, il serait allé en prison avant même d’avoir commencé à boire de l’alcool. Alors que ce dernier, pour sa défense, impute son acte à un cocktail (explosif) de whisky, vin rosé et bière consommé au moment des faits !
Les contradictions n’ont pas cessé de s’accumuler tout au long de l’interrogatoire d’Ibrahima Guèye. Lequel a réfuté presque toutes les déclarations qu’il avait lui-même faites lors de l’enquête : poids, situation familiale, domicile au moment des faits, emplois successifs… rien n’a été épargné par la langue fourchue du coquin.
Le seul fait sur lequel l’accusé est resté néanmoins constant, est qu’il maîtrisait la récitation du verset du Trône (Ayatou al Koursiyou), 255e du Coran, sans pour autant être allé loin dans son étude du Livre saint musulman, après... 4 années passées au daara. Un fait assez étonnant mais sur lequel le Président des Assises et ses assesseurs ont choisi, tant bien que mal, de le croire.
Sophiane BENGELOUN
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