Abou Diallo écope d’une peine avec sursis
Le chroniqueur Abou Diallo est condamné à trois mois assortis du sursis, pour diffusion de fausses nouvelles. Il a fait face, hier, aux juges du tribunal des flagrants délits de Dakar. Devant la barre, il a apporté des explications sur les propos qui lui ont valu sa comparution avant de s’amender.
Placé sous mandat de dépôt le 21 janvier, Abou Diallo a fait face, hier, aux juges du tribunal des flagrants délits de Dakar. Le chroniqueur est poursuivi pour discours publics contraires aux bonnes mœurs, discours de nature à inciter à la discrimination ethnique et diffusion de fausses nouvelles. Des faits qu’il a contestés devant les magistrats. Ce, même s’il avoue être l’auteur de l’audio qu’on lui a fait écouter à la barre. A l’en croire, en se prononçant sur l’affaire Farba Ngom, il a donné une réponse politique à une attaque politique. ‘’On était sur le terrain politique. C'était juste une bataille de communication politique. Je m'adressais à la base politique de Farba qui est le Fouta. Je n’ai pas fait allusion à une ethnie. D’ailleurs, la justice ne s'était pas encore saisie de l'affaire’’.
Sur la diffusion de fausses nouvelles qui lui est reprochée, il a affirmé : ‘’On n'avait pas encore levé son immunité parlementaire au moment où je tenais mes propos. Donc, je n'ai pas diffusé de fausses nouvelles.’’ Le juge de lui rappeler : ‘’Vous avez été affirmatif en disant que Farba ne sera jamais condamné.’’ Le prévenu Abou Diallo de rétorquer : ‘’Je crois à la présomption d'innocence. De plus, je sais qu'il aura une bonne défense.’’
N’étant pas satisfait de la posture du comparant, le maître des poursuites a lui lancé : ‘’Je croyais que vous aviez mesuré la gravité de vos propos. Que vous alliez faire amende honorable.’’ La remarque du représentant du ministère public a fait réagir le prévenu qui a précisé : ‘’Je n'ai jamais tenu un discours de nature discriminatoire.’’ Il s’est ensuite confondu en excuses. ‘’Si j'ai heurté les bonnes mœurs, je présente mes excuses. Je promets d'apprendre de mes erreurs’’, s’est-il amendé.
Convaincu de la culpabilité du prévenu, le substitut du procureur de la République a requis six mois d’emprisonnement, dont 15 jours ferme. ‘’À la suite de l'apparition d'un communiqué du procureur du Pool financier concernant un détournement de 125 milliards F CFA, il a tenu un certain nombre de propos au cours d'une émission. Concernant la diffusion de fausses nouvelles, le prévenu a déclaré que les poursuites initiées contre Farba n'aboutiraient jamais à une condamnation, si on demande à tous les habitants du Fouta de former un bouclier autour de Farba. C'est des propos qui entraînent la division au sein de la population, des discours à caractère discriminatoire. Il a visé nommément le Fouta. Il vise à instaurer une division. Toutes les infractions sont constituées. Nous sommes dans une logique d'apaisement. Personne ne cherche à museler qui que ce soit. On n'a pas besoin de personnes qui donnent leurs avis sur la situation du pays’’, a soutenu le maître des poursuites.
Prenant la parole, Me Mame Coumba Kane de la défense a relevé que le parquet a eu beaucoup de difficultés à caractériser les infractions. ‘’La diffusion de fausses nouvelles n'existe pas. S’agissant du délit de discours de nature à inciter une discrimination ethnique, il n'a fait référence qu'au Fouta qui constitue une base politique pour Farba. Il n'a pas visé d'ethnie. Il a déclaré que Farba avait besoin de soutien politique et moral’’, a plaidé Me Kane.
Pour sa part, Me Aboubacry Barro a précisé que son client, contrairement au journaliste, est un chroniqueur. Donc, a-t-il dit, il est subjectif. ‘’Il a besoin, en tant que chroniqueur, de donner son avis’’, a déclaré Me Barro. ‘’Il était à une émission éminemment politique. Il a analysé des faits qui lui sont déférés. Au moment où il tenait ses propos, Farba n'était pas encore poursuivi. On a longtemps dit que le Fouta est le titre foncier de l'APR. Il n'a jamais dit les Foutankés, il n'a jamais dit les Hal Pulars. Le Fouta est constitué de Sérères, de Diolas... Aucune infraction ne peut être reprochée au prévenu’’, a poursuivi Me Seyba Danfakha. Son confrère Abou Dialy Kane, qui a abondé dans le même sens, a déclaré : ‘’Depuis dix ans, personne ne l'a vu faire des diatribes. Pourquoi le maintenir en prison pour 15 jours ? Ce n'est pas de l'apaisement. Quand on veut apaiser, on libère. Il ne mérite pas de rester en prison pour ce dossier.’’ Quant à Me Souleymane Soumaré, il a sollicité une application bienveillante de la loi, si le tribunal estime qu’il y a infraction. D’ailleurs, dit-il, Abou Diallo s’est amendé à la barre.
Le tribunal a condamné Abou Diallo à trois mois assortis du sursis pour diffusion de fausses nouvelles.
MAGUETTE NDAO