Macky chiffre et interpelle
Le président de la République a livré hier ses chiffres sur le secteur de l’Education. Macky Sall a profité de l’occasion pour égratigner les enseignants, sur les nombreuses grèves. Il présidait la cérémonie d’ouverture de la Triennale de l’Education et de la formation.
La Triennale 2017, qui se tient du 15 au 17 mars au Centre international de conférence Abdou Diouf (Cicad), a été un bon prétexte pour le chef de l’Etat d’exposer aux yeux de l’Afrique ce que le Sénégal investit dans le secteur de l’Education. Le président Macky Sall a fait son bilan dans ce secteur. D’après lui, 1 748 milliards de F Cfa ont été dégagés durant la première phase du programme d’amélioration de la qualité, de l’équité et de la transparence (Paquet), entre 2013 et 2015. ‘’On a connu une croissance en matière de financement de l’éducation (de l’ordre de) 6,2%. C’est énorme’’, s’exclame-t-il.
Si l’on en croit le Président, les dépenses totales de l’Etat allouées à l’Education n’ont cessé d’augmenter. Elles sont passées de 22,4% du budget de l’Etat, en 2013, à 26,5% en 2015, soit un taux d’accroissement annuel de 3,2% sur les dépenses d’éducation. De la même manière, la part de l’aide publique au développement en faveur du secteur représente en moyenne 6% de dépenses sectorielles qui sont octroyées au Sénégal. ‘’Au demeurant donc, le Sénégal a ainsi largement dépassé la recommandation de l’Unesco, confirmée par l’ODD n°4 d’allouer 20% du budget des Etats à l’éducation et à la formation. Nous sommes à 26% que nous allons augmenter’’, promet-il.
Dans le détail, 66,17% des dépenses publiques sur les ressources internes allouées servent à financer les salaires du personnel enseignant et non enseignant. Viennent ensuite les subventions, les bourses et les aides à hauteur de 9% des dépenses. Les fournitures, les investissements et les autres dépenses courantes prennent le reste. Une répartition qui apparemment ne fait pas plaisir au chef de l’Etat qui insiste particulièrement sur un point. ‘’La part des salaires est particulièrement exorbitante dans le sous-secteur de l’enseignement élémentaire qui représente 82% de budget de l’enseignement élémentaire, 84,7% pour l’enseignement secondaire général, 83% du budget pour la formation professionnelle’’. Il n’y a que dans le supérieur que Macky Sall ne s’est pas montré préoccupé par la facture des salaires (19%). Au contraire, il s’en réjouit même.
Par contre, il y a une rubrique qui semble prendre beaucoup de ressources. Il s’agit des bourses et des aides qui représentent 38% du budget de l’enseignement supérieur. Mais le chef de l’Etat a une justification pour cela. ‘’Nous avons une politique inclusive qui permet d’aider les étudiants, pour que le facteur économique ne soit pas un frein à l’accès à l’Enseignement supérieur et à la recherche’’, dit-il. Ceci fait que, d’après lui, les Etats africains n’ont qu’une faible marge de manœuvre leur permettant d’investir davantage dans l’infrastructure et l’équipement qui participe à l’amélioration de la qualité. Le Président estime qu’il faut donc accorder une place plus importante à l’investissement et faire plus d’efforts pour la petite enfance, actuellement sous-financée.
Une fois les chiffres livrés, Macky Sall s’est adressé aux enseignants comme il est de coutume, à chaque fois qu’il se prononce sur l’éducation. Et ce n’est guère pour caresser dans le sens des poils. ‘’Aujourd’hui, il est important que les moyens dégagés par les Etats et le partenariat servent vraiment à former des produits de qualité. Il faut donc stabiliser les espaces universitaires et scolaires. Car lorsqu’on met autant de ressources sur un pays en développement dans un secteur, nous sommes en droit d’exiger la qualité et les résultats attendus pour un tel investissement’’, apostrophe-t-il.
Une pierre dans le jardin des enseignants
A l’intension de la communauté éducative, le chef de l’Etat rappelle qu’il existe d’autres priorités telles que la santé, la sécurité, l’agriculture, l’industrie, le terrorisme. Il les invite donc à prendre conscience des ‘’efforts consentis’’ et à savoir raison garder. ‘’On ne peut pas aussi passer son temps à mettre autant de ressources pour des résultats mitigés. C’est ça le problème. Sur 9 mois de cours, il y a 6 mois de grève. C’est un problème à terme. Je laisse la communauté universitaire et scolaire régler les problèmes, mais il faut que la qualité soit là. On ne peut pas continuer cet effort si à la fin, nous n’avons pas les résultats escomptés’’, prévient-il. Reste à savoir si c’est une stratégie d’anticipation sur ce qui s’annonce ou pas. Car au moment même où il tenait son discours, dans le supérieur, le Saes était en grève d’avertissement de 24 heures non renouvelables. Dans l’Education nationale, plusieurs syndicats se signalent avec des préavis et des mises en garde, face à ce qu’ils qualifient de dilatoire de la part du gouvernement.
BABACAR WILLANE