Publié le 3 May 2021 - 15:25
SORTIE DU PRESIDENT SUR LES TARIFS DE L’AUTOROUTE A PEAGE

La réaction scandalisée de l’opposition 

 

Des déclarations jugées maladroites, le président de la République les multiplie. Après avoir assuré qu’il ne ‘’voyait pas des brassards rouges’’, puis ‘’menacé’’ d’offrir les vaccins contre la Covid-19 à des pays de la sous-région, si les Sénégalais ne voulaient pas les utiliser, le président Macky Sall vient de faire une sortie polémique sur l’autoroute à péage.

 

A l’origine, cela ne devait qu’être une répartie saillante pour répondre à des syndicalistes toujours plus exigeants. Au final, le chef de l’Etat s’est attiré une grosse polémique et la foudre de ses opposants politiques et de membres de la société civile, pour avoir demandé aux Sénégalais qui ne peuvent pas payer le péage de se contenter des routes cahoteuses et parsemées de nids-de-poule.

Ce 1er Mai, au palais de la République, lors de la cérémonie de remise des cahiers de doléances, répondant à une interpellation du syndicaliste Mademba Sock sur les tarifs élevés de l’autoroute à péage Dakar - Diamniadio, le chef de l’Etat a rétorqué : ‘’Si vous ne voulez pas payer, il y a une route alternative à côté. On fait toujours des routes alternatives pour ceux qui ne veulent pas prendre l’autoroute. Oui, c’est comme ça ! Parce que tu ne peux pas ! Mais si tu veux rouler en toute sécurité, sans trous, il y a un prix.’’

Depuis lors, les réactions scandalisées se multiplient. C’est le cas d’Ousmane Sonko qui s’offusque de l’attitude du président de la République qui, selon lui, a renvoyé ‘’tout simplement ses administrés qui n’auraient pas les moyens d’honorer les tarifs exorbitants de l’autoroute à péage, à leur situation de «misérables damnés de la République», tout juste bons à endurer les secousses éreintantes des routes «alternatives» périlleuses qui, si l’on suit sa logique, ne méritent aucune attention de l’État’’.

Dans la note parvenue à ‘’EnQuête’’ intitulée ‘’Un lion égaré en pleine savane !’’, le leader de Pastef/Les patriotes déplore de ‘’tristes propos sortis de la bouche d’un homme «élu» par un peuple pour assurer une offre de biens et services publics satisfaisante et équilibrée à tous’’.

Un terrain sur lequel il a été précédé de quelques heures par l’ancien Premier ministre et président de l'Alliance pour la citoyenneté et le travail (ACT) Abdoul Mbaye, pour qui ‘’Macky Sall n’a pas encore compris que le péage en autoroute n’est pas le choix de la qualité, mais rémunère un investissement souvent privé qui propose un gain de temps. L’Etat normal continue de devoir des routes bien construites et bien entretenues aux usagers.  Pauvre Sénégal...’’.

‘’Une route pour les pauvres, une route pour les riches…’’

Loin d’être aussi ‘’mesurée’’, la réaction de l’activiste Guy Marius Sagna frôle l’indignation. Selon lui, la réponse du chef de l’Etat à une demande sociale montre, ‘’de manière décomplexée, (que) le président Macky Sall vient de nous avouer qu’au Sénégal, il y a des routes à deux vitesses : une pour les pauvres Sénégalais et une autre pour les riches et les voleurs du peuple sénégalais’’. Sans décolérer, il dénonce par la même occasion ‘’deux écoles, deux universités, deux hôpitaux, deux justices… C’est maintenant officiel ! La devise du Sénégal n’est pas “Un peuple, un but, une foi” mais “Deux peuples, deux buts, deux fois’’.

Dans sa déclaration devant les syndicalistes, le président a tout de même rappelé les efforts de l’Etat du Sénégal pour améliorer l’usage de cette autoroute. Ceci pour dire qu’’’on a renégocié le contrat de la concession de l’autoroute. Il y a des améliorations, pas sur les tarifs, mais plutôt sur la qualité de l’ouvrage et sur le revenu que le Sénégal peut tirer de ça’’. Suite à cet accord signé, il y a quelques mois, l’Etat du Sénégal va entrer à hauteur de 25 % dans le capital de la société Eiffage de la concession de l’autoroute de l’Avenir (SECAA SA). Et celle-ci va désormais lui verser une redevance domaniale annuelle d’au moins 800 millions de francs CFA, au lieu de 1 000 F CFA dans le contrat précédent. En contrepartie, la durée d’exploitation de l’autoroute par la SECAA a été prolongée.

Si Macky Sall se contente de ces termes, ce n’est pas le cas du leader de Pastef. Pour Ousmane Sonko, le président de la République a tout faux de croire que pour bénéficier d’autoroutes sans trous et sécurisées, les Sénégalais doivent forcément payer. Certes, reconnaît-il, il est tout à fait admis qu’un péage soit la rémunération, la contrepartie d’un investissement public ou privé offrant un gain de temps à l’usager. ‘’Sauf qu’une autoroute n’est pas forcément payante, car partout dans le monde, il existe des réseaux gratuits de qualité à côté des péages. Ce que monsieur Macky Sall ignore, c’est que les concessions d’autoroutes n’exonèrent pas les pouvoirs publics (États et collectivités locales) de leurs responsabilités par ailleurs, mais au contraire, doivent leur permettre de mieux se consacrer à l’amélioration des infrastructures secondaires’’.

Plus scandaleux, selon l’opposant, le contribuable sénégalais, usager ou pas, supporte en réalité presque la moitié de l’investissement (49,39 %). Et en faisant les différentes contributions au financement public privé de cette infrastructure, le leader de Pastef retient que dans les 367 milliards de francs CFA qu’a coûté l’autoroute, ‘’l’usager, supposé rembourser les prêts (34,1 %) et la participation du concessionnaire (16,6 % seulement), supporte lui les 50,7 % du coût de l’infrastructure’’.

Dakar - Diamniadio, trois fois moins long, mais trois plus chère que Casablanca - Rabat

Malgré ce financement très avantageux, c’est le concessionnaire qui se taille la part du lion dans la répartition du tarif de 1 000 F payé par l’usager, regrette Ousmane Sonko. Il explique une telle affirmation : 31 % pour les impôts et taxes, 25 % pour l'exploitation, l'entretien et le renouvellement, et 44 % pour l'amortissement de l'investissement. L’opposant ne s’en arrête pas là et compare les prix appliqués sur l’autoroute à péage Dakar - Diamniadio à ceux pratiqués sur l’autoroute Casablanca – Rabat, au Maroc.

Au Sénégal, l’usager ‘’est obligé de payer, pour 32 km seulement, 1 400 F CFA pour les voitures et taxis, 800 F CFA pour les motos, 2 000 F CFA pour les ‘’cars rapides’’ et minibus, 2 700 F pour les autobus et camions. L’usager de l’autoroute Casablanca - Rabat, exploitée par la Société nationale des autoroutes du Maroc, sur 95 km (le triple du trajet Dakar - Diamniadio), paye un tarif de 21 dirhams, soit 1 050 F CFA ; largement en deçà des tarifs du concessionnaire SENAC SA’’.

Autant de raisons qui poussent le leader de Pastef à affirmer que le montage de l’autoroute à péage Dakar - Diamniadio est une grosse arnaque contre le citoyen sénégalais. Estimant que le peuple ne mérite pas un président qui ne défend pas ses intérêts, il demande ‘’la publication des contrats, initial et complémentaire, ainsi que celui renégocié’’, entre autres exigences formulées à l’endroit du chef de l’Etat.

Lamine Diouf

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