Une affaire ethnique
Aussi bien dans le milieu religieux que culturel, la place de la virginité est spéciale aux yeux de tous. C'est une pratique très respectée par les sages, et les pratiques différent d'une ethnie à une autre.
Chez les Soninkés : ''… l'opprobre de la famille''
Couché sur un lit dans le salon à Yarakh, Waly Pène peine à se relever. A 75 ans, il parle, avec un brin de nostalgie, de cette pratique culturelle. Des larmes ruissellent sur ses joues. Le Vieux Waly se rappelle que chez les Sarakholés, la virginité d'une fille est une exigence. Malheur à celle qui ose passer outre. «Quand un homme et une femme font l'amour, alors qu'ils ne sont pas mariés. Du côté de l'homme, sa maman et une de ses sœurs seront punies. Elles ne partageront plus rien avec les autres membres de la famille. Du côté de la fille, on prend un morceau de pain, on enlève la mie, puis on l'attache au seuil de la porte. Durant toute sa vie, ce morceau vide de pain sera sur sa porte d'entrée. Pour faire savoir à tout le monde qu'elle était vide le jour de son mariage'', explique-t-il. En revanche, si la fille est vierge, son mari tue, pour elle, obligatoirement, 5 moutons. Un pour son père, l'autre pour sa maman et les trois autres pour tous les parents.
Chez les Diolas : ''Le sang d'une fille vierge est sacré''
Chez les Kassa et les Fogny, la virginité est très valorisée, au point que les parents prennent la peine d'exciser leurs filles. Sadibou Bassène, 58 ans, habite dans la même localité. ''Chez les Fogny, les filles sont souvent excisées, afin de pouvoir garder leur virginité. Ce qui est interdit, c'est le fait de montrer le drap des deux conjoints le lendemain'', explique-t-elle. ''Le sang d'une fille vierge est sacré, seule la sœur du père a le droit de le voir. C'est pour cette raison qu'on interdit de sortir le drap et de le montrer le lendemain. Mais, être vierge pour nous est signe de retenue'', souligne Bintou Diémé.
Chez les Peulhs : ''Être comme on est venu au monde''
Le jour du mariage, la femme doit être comme au jour de sa naissance. Rien ne doit changer en elle. Ni son physique encore moins son être. C'est la règle d'or dans la tradition peulh, similaire à celle des Toucouleurs. Avant de consommer son mariage, la fille va être de nouveau purifiée par ses tantes paternelles. C'est-à-dire qu'elle doit faire des bains. «Si elle n'est pas vierge, ses tantes le sauront parce que l'eau et le produit utilisés pour ses bains vont changer de couleur. À ce moment, tout le monde l'abandonne et c'est sa maman qui s'occupe de tout. Si elle est vierge, elle reçoit la bénédiction de ses parents. Le lendemain, ses tantes lui font des massages, en déclamant des chansons traditionnelles en son honneur'', indique Oulimatou Diallo, qui assure ignorer son âge ; ses cheveux blancs en disent assez.
Chez les Sérères : ''C'est une honte pour la famille''
Dans la culture sérère, la conservation de la virginité est aussi importante aux yeux des parents et des jeunes. Elle renforce la confiance de l'homme en la femme. Selon Ndiollé Faye, trouvée au quartier populaire de la Médina, être vierge est une fierté. ''La fille est portée en haute estime dans son milieu''. Pour ce sexagénaire, le mari la couvrira de cadeaux et fera des efforts pour lui rester fidèle. ''La femme est traitée comme une véritable reine dans la maison. Si la famille a des greniers, c'est à elle de faire sortir le mil ou le riz gardés chaque hivernage'', explique la vieille. Ngor Ndiaye, rencontré à la Médina, cheveux blancs, canne à la main, ne dit pas autre chose. ''Dans la tradition sérère, explique-t-il, faire l'amour avant le mariage, c'est humilier sa propre famille. C'est une honte pour la famille qui ne sera jamais respectée.»
Viviane DIATTA
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