L’axe Dakar - Nouakchott en First Class
Dans le cadre de sa première visite officielle en tant que président du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye a choisi de se rendre en Mauritanie, un pays voisin avec lequel le Sénégal entretient des liens historiques et stratégiques.
La visite du président sénégalais nouvellement élu, Bassirou Diomaye Faye, initialement prévue le mercredi 17 avril en Mauritanie se fera le jeudi 18 avril.
L’arrivée du nouveau chef de l’État sénégalais est annoncée à 10 h 30 à Nouakchott. Il devrait reprendre les airs le soir même. Il sera accompagné d’une forte délégation composée notamment des ministres Yacine Fall (Intégration africaine), Malick Ndiaye (Infrastructures), Birame Soulèye Diop (Énergie, Pétrole et Mines) ou encore Fatou Diouf (Pêche).
Le Premier ministre Ousmane Sonko ne devrait pas prendre part à cette visite.
Pour le chercheur en géopolitique Amadou Moctar Ann, en matière de diplomatie de bon voisinage, les principes qui devraient guider le président Faye devraient être de façon classique : le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale des pays frères, le principe de non-ingérence dans leurs affaires intérieures, le règlement pacifique des différends par le dialogue et la négociation, la coopération économique, culturelle et sociale mutuellement bénéfique et la promotion de la paix, de la sécurité et de la stabilité régionales.
Renégocier le contrat du GTA
Les deux chefs d’État discuteront sans doute des questions liées à la coopération bilatérale, en particulier le projet du gisement partagé de l’exploitation du champ gazier Grand Tortue Ahmeyim (GTA).
La Mauritanie occupe une place de choix dans la politique étrangère sénégalaise. Les deux pays sont liés par de nombreux facteurs, notamment la co-exploitation du gisement gazier de Grand Tortue Ahmeyim, situé à la frontière maritime entre les deux nations. Après plusieurs reports, l'extraction des premiers pieds cubes de gaz naturel liquéfié (GNL) est désormais prévue pour la fin de l'année 2024, ce qui offre un potentiel de production sur 30 ans. Cette manne gazière constitue une aubaine économique pour la Mauritanie et le Sénégal, qui devront coordonner leurs efforts pour en tirer le meilleur parti.
Au-delà de ces enjeux énergétiques, le Sénégal et la Mauritanie entretiennent des relations diplomatiques, commerciales et sécuritaires étroites. Leur appartenance commune à l'Organisation de la conférence islamique (OCI) témoigne de cette volonté de coopération.
En campagne, le candidat du Pastef avait annoncé son intention de renégocier les contrats signés avec les opérateurs étrangers, une promesse qui semble difficile à concrétiser, ces accords ayant été conclus avant l’arrivée au pouvoir des deux dirigeants.
Avec ces visites, le président de la République entend s’inscrire dans la continuité du renforcement des liens historiques de bon voisinage et de brassage socioculturel entre ces pays et le Sénégal, note le communiqué du Conseil des ministres de ce mercredi 17 avril 2024.
Par ailleurs, le Sénégal et la Mauritanie ont réaffirmé leur engagement à renforcer leur coopération bilatérale à travers la signature de plusieurs accords et protocoles d'entente dans des secteurs stratégiques tels que l'agriculture, les finances, les douanes, l'élevage, la pêche et la transformation numérique.
Sur le plan agricole, les deux chefs d’État devraient échanger sur la lutte contre les ennemis des cultures transfrontalières, appui aux politiques agricoles, développement du secteur agricole.
En ce qui concerne les questions liées à la fiscalité : l’élimination de la double imposition, la lutte contre l'évasion fiscale, l’élaboration d'une nouvelle convention fiscale conforme aux normes internationales, le régime fiscal des entreprises exécutant les marchés du pont de Rosso et le régime fiscal et douanier du champ gazier Grand Tortue Ahmeyim seront revus à la baisse.
Coopération douanière : mise en place d'un comité technique mixte de coopération douanière pour un accord transversal couvrant tous les domaines douaniers.
En outre, l’approvisionnement du Sénégal en moutons pour la Tabaski, l’opérationnalisation du Comité de suivi de l'opération Tabaski, le programme exécutoire de l'accord réglementant la transhumance et du protocole d'accord de coopération dans le domaine de la santé animale seront aussi sur la table.
Les accords de pêche et protocoles d'application, l’autorisation de 500 pirogues de senne tournante à pêcher dans les eaux mauritaniennes, le renforcement de la coopération dans les domaines de la pêche maritime et continentale, entre autres, seront aussi des sujets à évoquer.
Ces accords et protocoles d'entente témoignent de la volonté des deux pays de consolider leurs relations bilatérales et de promouvoir un développement économique et social inclusif au profit de leurs populations respectives.
Il est aussi fort à parier que les deux chefs d’État évoqueront le volet sécuritaire et la menace terroriste. D’autant que les autorités mauritaniennes renseignent que des éléments du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jnim), pourchassés par l’armée malienne au nord du Mali, se sont repositionnés dans le sud, aux environs de la ville de Kayes, aux portes du Sénégal et de la Mauritanie.
Amadou Camara Gueye