‘’Les mesures d’accompagnement ne suivent pas convenablement’’

Après la quatrième place du Sénégal au championnat d’Afrique féminin de volley-ball, le coach des Lionnes dresse le bilan de la participation de son équipe dans un entretien avec EnQuête. Amadou Sène a également dénoncé l’insuffisance des moyens alloués par l’Etat par rapport aux ambitions de la discipline sur le plan continental.
Le Sénégal est classé 4e au dernier championnat d’Afrique féminin de Yaoundé. Qu’est-ce qui a fait défaut aux Lionnes pour arriver au bout de la compétition ?
En 2015, on était bien arrivé en demi-finales avec des conditions de préparation déjà insuffisantes mais de loin meilleures que celles qu’on a eues cette année. Il fallait s’y attendre. Quand on part, on ne sait pas ce qu’on trouve sur place. A fortiori, ce sont les pays qui se sont mieux préparées qui arrivent devant. Pour le Sénégal, il y a eu des insuffisances pendant la préparation. Pour la capitaine Fatou Diouck, par exemple, elle ne s’est entraînée avec l’équipe que pendant trois jours. C’est elle qui a été distinguée meilleure marqueuse. Cela montre que le potentiel est là mais ce sont les mesures d’accompagnement qui ne suivent pas convenablement. Ceux qui gèrent le sport, notamment le ministère des Sports, ont l’expérience et savent qu’une équipe doit bien être préparée pour avoir plus de chance pour s’imposer sur le plan continental.
Cela a été fait avec le football, le basket qui a confirmé. Le volley est arrivé à un stade où ces mesures d’accompagnement doivent être mises en place. Les techniciens ont fait leur travail de détection, d’encadrement de la volleyeuse qui est mise dans un environnement lui permettant de progresser. Ce travail a payé puisque ces athlètes se sont expatriées et se distinguent dans les championnats de haut niveau. Maintenant, c’est l’équipe nationale, on fait venir tout le monde mais on ne doit pas faillir au respect du protocole qui doit être suivi pour l’encadrement d’une équipe de haut niveau. Celui-ci, malheureusement, n’a pas été suivi. On a essayé de s’accrocher bon an, mal an. Mais c’est insuffisant. Le temps de travail est approximatif, le cadre n’est pas amélioré. Ensuite, il n’y a pas de match de préparation. Tout ça, c’est des aspects incontournables pour une préparation en haut niveau. Le Sénégal n’est plus au stade de la figuration. On a les athlètes qu’il faut et la capacité de nous imposer en Afrique. La qualité individuelle y est. Lors du championnat des clubs en Asie, c’est une Sénégalaise qui a été distinguée MVP. Dans le championnat espagnol, il y a une joueuse sénégalaise dans le 6.
Vous avez eu le sentiment d’être laissés à vous-mêmes lors de ce tournoi, à Yaoundé ?
On ne peut dire qu’on est laissés à nous-mêmes car mine de rien, c’est le ministère (Sports, Ndlr) qui a payé les billets d’avion. Il y a quelque chose qui a été fait. C’est indéniable. Mais c’est de loin très insuffisant par rapport au projet de l’équipe qui consiste à s’imposer dans le continent.
‘’L’équipe de volley a quitté ce pays, on ne lui a même pas remis le drapeau national. Est-ce qu’on est des citoyens à part ? C’est choquant’’
Malgré les conditions difficiles de préparation, le Sénégal est quand même arrivé en demi-finales. Qu’est-ce qui a fait la différence ?
C’est le potentiel qui a fait la différence. On n’a pas eu un match amical. Donc c’est le premier tour qui a servi de préparation à l’équipe. On est tombés sur des équipes fortes certes mais on a pu gérer petit à petit. Le dispositif a changé d’un match à un autre parce qu’il y avait toujours quelque chose à régler. Arrivé en demi-finales, face au Cameroun, on a cherché la solution pendant les deux premiers sets qu’on a trouvée au troisième. On avait une balle de match. Si on l’avait réussie, cela aurait complètement relancé le match.
Sur le plan sportif, quel bilan tirez-vous de la participation du Sénégal au championnat d’Afrique, à Yaoundé ?
C’est un bilan positif parce qu’il n’y a pas de contreperformance. L’équipe est restée toujours à la 4e place. Les filles ont été impeccables. Ce sont les mesures d’accompagnement qui doivent être revues à la hauteur des ambitions. C’est la même chose dans toutes les disciplines. Il y a la motivation des athlètes aussi. Figurez-vous que cette équipe est partie au Championnat d’Afrique, et jusqu’à l’heure où je vous parle, les filles n’ont pas encore reçu leur per diem. C’est gravissime. Déjà que leur per diem, ici, c’était une très modique somme.
Mais arrivée sur place (Yaoundé), on nous parle d’aujourd’hui, demain. Au lieu de se concentrer sur la compétition, on pense à ce qu’on va dire aux athlètes après. Arrivés à l’aéroport, les filles nous regardaient et on n’avait pas les éléments de réponse. C’est des frustrations. Elles ne méritent pas ça. Il y a le représentant du ministère, ancien directeur technique de volley, qui est parti depuis ce matin (hier, Ndlr) et jusque-là, je n’ai pas encore de réaction. Vous imaginez ça au football ou au basket ? L’équipe de volley a quitté ce pays, on ne lui a même pas remis le drapeau national. Est-ce qu’on est des citoyens à part ? C’est choquant. C’est dommage que le Sénégal en soit arrivé à ce stade.
LOUIS GEORGES DIATTA