Publié le 22 Aug 2013 - 13:40
POURSUIVI POUR ESCROQUERIE AU VISA

L'opérateur économique mouille toutes les institutions de la République

 

Alors qu’il est poursuivi pour escroquerie au visa au préjudice de plusieurs personnes, Ousmane Thiam n’a pas hésité à mouiller toutes les institutions de la République, au cours de son procès d’hier. Il encourt cinq de prison ferme pour les délits d’escroquerie, de faux et usage de faux et détention illégale d’arme.

187 passeports dont 150 numérisés, 7 passeports gambiens, 31 cartes professionnelles de la RTS (Radiodiffusion télévision du Sénégal), 3 cartes de la Chambres des métiers de Kaolack, 3 badges de la Direction de l’automatisation du fichier ( DAF), 2 cartes de sous-officiers de l’armée, des cachets de la Primature, de l’Assemblée nationale…. La liste est loin d’être exhaustive, mais tout cet arsenal a été découvert par devers Ousmane Thiam. Le prévenu est poursuivi pour escroquerie, faux et usage de faux et détention illégale d’arme. Car, l'opérateur économique a promis à plusieurs personnes des visas pour l’Europe moyennant de l’argent. Un business dans lequel il se meut depuis 2005. Il résulte des éléments de l’enquête que Ousmane Thiam se fait passer pour l’ami d’enfance de l’ex-Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye. A ce titre, il bénéficiait de la confiance de candidats à l’immigration. Son modus operandi consistait à faire passer les candidats, soit pour des agents de la RTS, soit pour des membres d’un groupe de musique.

''Complicité avec les ex-députés libéraux Pape Meïssa Codé Diop et El Hadj Malick Guèye de Latmingué''

Selon ses aveux faits à la police de Grand-Yoff et réitérés hier à la barre, il bénéficiait de complicité au niveau de toutes les institutions de la République. De la Présidence à la Primature, en passant par l’Assemblée nationale, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) et certains ministères et de la police et de la gendarmerie. Au niveau de l’Assemblée nationale, il a expliqué qu’il bénéficiait de la complicité des ex-députés libéraux Pape Meïssa Codé Diop et El Hadj Malick Guèye de Latmingué. Lorsque le premier nommé devait aller en mission, de faux documents étaient confectionnés avec la complicité de deux policiers en service à la DAF. Il s’agissait de donner le patronyme de Diop au candidat qui était présenté comme le fils du député. Selon les dires du prévenu et mentionnés dans le procès-verbal, si une commission d’un montant de 1 million de francs Cfa était versé au parlementaire, les policiers recevaient pour leur part 100 000 francs par personne.

Perdu par la chute des libéraux

Seulement après la survenue de la seconde alternance, il a perdu ses connexions. C’est pourquoi, quatre candidats à l’émigration l’ont traîné en justice. Il s’agit des nommés Moustapha Diakhaté, Térence Boissy, Tafsir Mamadou Guèye et Aly Sow. Les deux premiers ont été mués respectivement en bassiste et guitariste et devaient, à ce titre, faire partie d’une tournée en Europe du chanteur Abdoulaye Mbaye. Quant au troisième, il devait voyager comme cameraman de la RTS devant aller en mission avec l’ex-député.

Devant la barre, Ousmane Thiam a reconnu que les parties civiles ont voyagé sous de fausses identités, mais il a contesté l’escroquerie et le faux. Il a laissé entendre qu’il n’était qu’un simple intermédiaire désireux d’aider les plaignants. ‘’Je n’ai rien gagné dans ces opérations, au contraire, des gens que j’ai aidés à voyager me doivent 119 millions, car certains ne paient pas à leur arrivée en Europe’’, s’est-il défendu. Et d’ajouter que l’argent versé par les victimes était reversé à des consuls ou des chargés d’affaires des Ambassades qui en faisaient la réclamation.

''Documents et cachets remis par Massamba Sarr, adjoint au protocole de la Présidence''

S’agissant du délit de faux, Ousmane Thiam a nié l’avoir commis et en avoir usé. Car, dit-il, les documents et autres cachets qu’il détenait lui ont été remis par Massamba Sarr, adjoint au protocole de la Présidence. Suffisant pour que le représentant du parquet parle de véritable ‘’catastrophe’’. ‘’C’est une véritable industrie d’escroquerie et de faussaires qui met en cause les différentes institutions de la République’’, a asséné le substitut Baye Thiam. Considérant Ousmane Thiam comme un ‘’danger public’’, il a requis 5 ans, 2 ans et 1 an pour respectivement les délits d’escroquerie, de FUF et de détention illégale d’arme. Toutefois, il a demandé une confusion des peines.

Une enquête tronquée

Pour la défense, leur client doit être relaxé purement et simple. A l’instar de leur confrère de la partie civile, Mes Oumar Diop et Mamadou Guèye Mbow ont décrié l’enquête. Ils ont estimé qu'elle devait être menée jusqu’au bout pour que toutes les personnes citées soient entendues. Même si l’enquête n’est pas exhaustive, Me Malick Mbengue a réclamé le remboursement des 4,5 millions versés par son client Térence Boissy qui devait se rendre en Suisse. Me Ousseynou Gaye a réclamé 8 millions pour Tafsir Amadou Guèye. Il a aussi demandé au tribunal d’ordonner la restitution du passeport de son client sous astreinte de paiement de 100 000 francs par jour de retard. Moustapha Diakhaté a réclamé le remboursement de 3,650 millions. Délibéré le 23 août.

 

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